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Décodages

« Les ordonnances auront des conséquences graves pour la sécurité des femmes »

Décodages | Responsabilité sociale | publié le : 05.12.2017 | V.A.

RACHEL SILVERA, économiste à l’université Paris X et co-directrice du réseau Mage (marché du travail et genre).

Quelles incidences peut avoir le nouveau Code du travail sur les salariées ?

Toutes les décisions prises ces dernières années comme la loi Rebsamen de 2015 ont renforcé les précarités et les inégalités. On détricote le Code du travail et on allège indirectement un certain nombre de droits fondamentaux comme l’égalité professionnelle et la lutte contre les discriminations. Alors qu’un arsenal considérable avait été instauré pour lutter contre ces discriminations, les lois actuelles visent à aller vers une politique du moins-disant. Des lois peu appropriées et appliquées et qui remettent en cause les droits au travail et le droit des femmes en particulier.

Concrètement, quel impact vont avoir les ordonnances pour les femmes au travail ?

En cas de harcèlement ou d’agression, les femmes pouvaient se tourner vers le CHSCT. Mais le CHSCT va disparaître. Et cela aura forcément un impact sur la prévention des violences sexuelles au travail. Et des répercussions sur les femmes les plus précaires. Ensuite, le droit d’expertise dédié à l’égalité entre les femmes et les hommes, autrefois à la charge de l’employeur, devra dorénavant être financé par le comité d’entreprise. Or les CE ont déjà un budget limité. Là encore, des choix devront être faits. Et l’égalité risque de passer à la trappe, notamment dans les entreprises où les femmes sont peu représentées. Autre nouveauté, le gouvernement souhaite que les négociations d’entreprises et de branches priment sur la loi. Certes, l’égalité professionnelle reste une obligation pour les branches, mais son contenu pourra être plus flou, les indicateurs moins précis et le rythme de négociation obligatoire, notamment sur les inégalités salariales, passer de un à quatre ans… Demain, les accords d’entreprise pourront réduire certains droits des salarié(e)s. Par exemple, votre temps de travail pourra être allongé. Mais une femme seule avec enfants ne pourra pas s’adapter. Son employeur pourra la licencier sans pour autant que ce soit un licenciement économique. Ces ordonnances auront des conséquences graves pour l’égalité, l’emploi et la sécurité notamment des femmes.

Les sanctions peuvent-elles être une solution ?

Concernant l’égalité professionnelle, nous avons bien avancé ces dernières années grâce à de nombreuses négociations. Certes, la sanction à l’encontre des entreprises impulsée en 2013 était un bon début. Mais les sanctions sont trop rares. Et pour sanctionner les entreprises, il faut renforcer les moyens de contrôle de l’inspection du travail qui ne cessent de diminuer. Et puis, les femmes sont davantage employées dans les PME et les TPE : les secteurs professionnels les moins couverts syndicalement. Or, 80 % des accords sont engagés auprès des grands groupes. Concernant le harcèlement, l’auteur est responsable pénalement. Mais tout le monde sait qu’une fois de plus c’est la salariée qui perd le plus souvent son emploi.

Auteur

  • V.A.