logo Info-Social RH
Se connecter
Newsletter

À la une

Espagne Les CE négocient salaires et conditions de travail

À la une | publié le : 02.10.2017 | Valérie Demon

Image

Espagne Les CE négocient salaires et conditions de travail

Crédit photo Valérie Demon

Un système dual d’IRP et droit du travail semblable à la France caractérise la représentation des salariés chez les Ibères.

Deux textes encadrent la représentation des salariés dans les entreprises espagnoles, le statut des travailleurs (équivalent du droit du travail en France) et la loi sur la liberté syndicale de 1985. Comme en France, deux systèmes coexistent : les délégués du personnel et le comité d’entreprise d’une part, la section syndicale et son délégué d’autre part. L’élection de représentants de l’ensemble du personnel est possible dans toutes les entreprises, sauf celles qui ont moins de six employés. Dans les PME de six à dix salariés, l’élection d’un délégué du personnel est organisée si la majorité des employés le demande. Une condition qui tombe pour les sites plus importants. À partir de 50 salariés, les délégués du personnel se fondent dans un comité d’entreprise (CE). « Les CE se constituent dans chaque site. Ils ont cinq élus pour les entreprises de moins de 100 personnes, neuf jusqu’à 250. Le nombre de membres peut dépasser la vingtaine dans les plus grosses entreprises. Souvent, les directions évitent de recruter plus de 100 personnes par site pour limiter le nombre d’élus », fait remarquer Francisco Conde, associé du cabinet d’avocat Cuatrecasas.

Dans les grandes structures, de plus de 250 employés, les membres de chaque syndicat siégeant au comité d’entreprise peuvent désigner un délégué syndical. Il représente directement son syndicat au sein du comité d’entreprise avec droit de parole, mais sans droit de vote. Un comité de sécurité et d’hygiène est également créé au-delà de 50 salariés. Il est paritaire entre représentants de l’employeur et des travailleurs. Comme le prévoit d’ailleurs la directive européenne, l’employeur a l’obligation de consulter le CE préalablement à toute restructuration. Celui-ci peut négocier un accord avec l’employeur en cas de licenciement économique, avec ou sans les DS selon le cas.

Dans la réalité, on retrouve dans la majorité des CE de grandes entreprises des adhérents des deux principaux syndicats : les Commissions ouvrières (CCOO) et l’Union générale des travailleurs (UGT). Sauf au Pays basque et en Galice où les syndicats locaux sont plus largement implantés. Les CE ont droit à l’information, et sont consultés sur les décisions stratégiques. Mais ils prennent aussi part à la négociation sur les salaires et les conditions de travail. Les syndicats peuvent participer à une négociation concernant les salariés de l’entreprise uniquement s’ils sont majoritaires au sein du CE. Les syndicats représentatifs sont également les seuls à pouvoir négocier aux niveaux sectoriel et national.

Équilibre rompu.

Le tissu économique espagnol est constitué à 95 % de PME dont les salariés ne sont pas toujours couverts par une convention collective. « Quatre à cinq millions de salariés ne sont pas inclus dans une négociation collective, explique Fernando Lezcano, secrétaire de la CCOO. Comme en France, implanter un syndicat et développer la négociation dans les petites entreprises est compliqué. Les statuts sont souvent précaires, ce qui n’encourage pas les employés à devenir DP. » Par ailleurs, depuis la réforme du marché du travail de février 2012, les syndicats font face à un autre problème. Adoptée par le gouvernement au plus fort de la crise économique, cette loi permet aux entreprises de déroger aux règles de la convention collective du secteur si leurs recettes baissent pendant trois trimestres consécutifs. Cette clause leur permet de négocier avec les syndicats un gel ou une baisse des salaires pour éviter des licenciements. « Cette réforme a rompu l’équilibre de la négociation au profit des directions, mais cela n’a pas signifié la mort de la négociation collective. Nous avons résisté là où c’était possible », estime le syndicaliste. Ces dernières années, nombre d’entreprises ont procédé à des dévaluations salariales pour sauver des emplois.

Éclairage

Le droit du travail espagnol date des années 1980, à une époque où le pays découvrait la démocratie. Les bases de la représentativité des salariés sont très proches de celles qui existaient en France jusqu’ici. Comme en Allemagne, le CE se réunit sans la présence de représentants de la direction. Mais ses prérogatives et ses moyens sont bien moins développés. Les élus du CE participent aux négociations avec le syndicat et la direction. Un accord est adopté uniquement s’il est approuvé à la majorité.

Catherine Vincent, chercheure à l’Ires.

Auteur

  • Valérie Demon