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Idées

« Le management subsidiaire préserve le pouvoir d’agir »

Idées | Management | publié le : 05.06.2017 | Violette Queuniet

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« Le management subsidiaire préserve le pouvoir d’agir »

Crédit photo Violette Queuniet

Pourquoi cette recherche-intervention sur le management subsidiaire ?

Après dix ans dans une entreprise et dix ans comme consultant formateur en management et négociation, je voyais bien les limites du management traditionnel. J’ai commencé à ressentir de la frustration car j’intervenais toujours sur les postures managériales, jamais sur la dimension organisationnelle. J’ai préparé un master de recherche pour creuser cet aspect.

De nombreux auteurs s’interrogeaient sur la pertinence du principe de subsidiarité, mais sans aller au-delà. Or, cela m’a paru être la solution probable pour lutter contre la souffrance au travail et en même temps gagner en performance. J’ai poursuivi par une recherche-intervention en entreprise qui a duré trois ans, du diagnostic aux premières expérimentations.

Qu’est-ce qui différencie le management subsidiaire du management participatif ?

La différence se situe dans la conception de l’autorité. Dans le management subsidiaire, le pouvoir d’agir est préservé car l’autorité subsidiaire est une autorité de soutien : elle n’intervient que lorsque vous avez besoin d’aide. Et elle tire sa légitimité de sa connaissance du travail, grâce aux délibérations qui se produisent dans les espaces de discussion sur le travail où se fait l’arbitrage entre ingérence et non-ingérence.

Dans les démarches participatives, la conception théorique de l’autorité reste classique : c’est l’autorité taylorienne, qui a du mal à faire confiance. Il se produit alors souvent le paradoxe suivant : l’implication et l’autonomie des salariés progressent en même temps qu’augmentent les dispositifs de contrôle individuel et les prescriptions contraignantes sur le travail. On le voit par exemple avec les cercles de qualité qui s’accompagnent de l’obligation d’appliquer de nouvelles normes. Le pouvoir d’agir diminue donc et le stress augmente.

Et quelle différence avec l’entreprise libérée ?

Dans l’entreprise libérée, c’est celui qui fait qui sait et prend des décisions. On fait confiance. Mais qu’est-ce qui décide de ce qui est fait au niveau local et de ce qui ne l’est pas ? Il me semble que l’autorité y est niée, parce qu’il n’y a pas de dialogue et de débat sur le travail. Je me pose toujours la question suivante : l’entreprise libérée libère de quoi ? S’il s’agit pour le « leader charismatique » de donner le sens et ensuite de dire « débrouillez-vous ! », le stress doit être intense !

Quelles limites voyez-vous au management subsidiaire ?

La principale limite réside dans l’asymétrie entre le salarié et l’employeur, du fait du rapport de subordination juridique. Nous ne sommes pas dans une situation potentielle de cogestion, ce qui limite le champ des possibles concernant l’analyse et les suggestions des salariés sur le travail bien fait à un pré carré relativement étroit. J’identifie aussi un risque : celui de confondre management subsidiaire et lean management et de mettre en place des EDT pour augmenter la productivité. Le principe de subsidiarité est basé sur une anthropologie qui envisage la personne humaine dans sa dignité et sa liberté. La recherche de la performance à tout prix s’y oppose. Il y a un équilibre à trouver entre efficacité maximale et efficacité suffisante.

Auteur

  • Violette Queuniet