Une batterie d’indicateurs inadaptés, des dispositifs en concurrence, un sous-dimensionnement des effectifs… Pôle emploi ne permet pas de lutter efficacement contre le chômage de masse, démontre le sociologue Jean-Marie Pillon dans un essai très documenté, nourri par des immersions en agence. La nouvelle entité, issue de la fusion de l’ANPE et des Assedic en 2009, renonce rapidement au conseiller unique, censé gérer l’indemnisation, le contrôle et le placement. L’auteur décrit le jeu complexe des relations entre les contrôleurs de gestion, présents à tous les niveaux de l’organisme, et les managers, autour des indicateurs de performance. Une politique du chiffre qui pèse sur les conseillers, prisonniers de logiciels contraignants et confrontés à un rationnement des dispositifs d’accompagnement. Générant une éviction des demandeurs d’emploi les moins employables, parce qu’ils mobilisent beaucoup de ressources, et une concurrence néfaste entre les conseillers des agences, des plates-formes téléphoniques et des équipes spécialisées. Une analyse éclairée par de multiples verbatim, qui méritera d’être actualisée au regard des nouvelles orientations prises ces deux dernières années : différenciation de l’accompagnement selon le niveau d’autonomie, mise en place de 4 200 conseillers entreprise, multiplication des services en ligne.

Pôle emploi, Gérer le chômage de masse, Jean-Marie Pillon. Presses universitaires de Rennes. 274 pages, 22 euros.