Nous aimons tous la simplicité, nous aimons tous les relations authentiques, et pourtant nous avons bâti dans nos grandes entreprises des systèmes qui génèrent une grande complexité, avec de moins en moins d’authenticité. Même si le chief happiness officer est arrivé chez vous, il n’est pas certain que son injonction à vous rendre heureux entre 9 heures et 17 heures soit un remède au défaut plus profond qui s’est installé dans les relations de travail. Jusqu’à présent, la réussite de nos carrières tenait aussi à ce savoir-faire d’effacer nos émotions au travail. Mais à force de considérer nos émotions comme des perturbateurs, à trop vouloir faire de nos collaborateurs des robots, nous aurons bientôt la joie de les remplacer effectivement par des robots ! Et pourtant, l’émotion est l’essence de l’engagement, c’est elle qui soulève des montagnes ! Si on la remet à sa juste place et que l’on invite chacun à rester authentique, on recrée des systèmes en mesure de s’adapter plus facilement, par la seule force de la cohésion des équipes, qui se mettent en phase avec des valeurs humaines reposant sur le principe de respect de la singularité des personnes.
L’entreprise doit faire suffisamment face à la complexité. Il appartient aujourd’hui à nos directeurs des ressources humaines de reprendre la main sur l’humanisation des relations de travail. Particulièrement dans cette période où l’on imagine les machines remplacer jusqu’aux cols blancs. Et il ne s’agit pas d’une humanisation formatée, aseptisée, organisée dans des programmes qui s’abattent de manière mécanique en marge de notre réalité quotidienne au travail. Cet élan ne peut se circonscrire à un cours de yoga ou à un espace de travail aménagé en salle de jeux. Il s’agit bien d’une valeur managériale incarnée au plus haut niveau, qui doit inonder les relations de travail et permettre de réattribuer à l’entreprise l’atout RH qui fait sa singularité. C’est en redonnant place aux émotions et à l’authenticité dans les relations que l’on renforcera efficacement le lien social. Les humains ont besoin d’occuper un espace qui leur permette de se réaliser, à leur façon. Certains vont chercher à prendre un espace, d’autres se contenteront d’occuper celle qu’on leur donne. Certains ont besoin de combat et de rivalité, d’autres de coopération. Mais tous ont besoin d’un sens fort pour se surpasser, se coordonner et produire une confrontation positive. Plus que jamais ce sens se révèle dans le débat, dans la capacité de l’organisation à se mettre en conversation. Et cette grande conversation ne peut exister que dans l’authenticité des relations.
Parce que les systèmes de gestion ont voulu tout organiser, tout prévoir, gérer le moindre risque, penser le moindre objectif, le moindre processus, jusqu’à normaliser les relations entre collègues, la grande entreprise serait-elle devenue un lieu qui ne fait plus rêver, ni les jeunes, ni les autres ?
L’entreprise a produit de l’infantilisation en imaginant contrôler toute sa complexité, au lieu de s’appuyer sur la bonté humaine et la force de la confiance. Alors c’est décidé, je lâche prise et me mets une fois pour toute dans la tête, qu’en l’absence de robots qui occupent ma place, je comprends que les entreprises qui réussissent passent toutes en « mode mammifère » !
Elles mettent leur énergie sur l’intelligence collective : elles acceptent que les êtres humains agissent selon leur instinct et ressentent des émotions à chaque instant, émotions qui, au choix, les paralysent, les mettent en retrait, ou leur donnent des ailes !
