Combinée à l’essor des objets connectés, la technologie ouvre des perspectives dans l’évaluation du stress des salariés. Et la possibilité d’anticiper les difficultés.
Dans le système Supermood, il existe trois catégories de salariés : les « ambassadeurs », les « passifs », et les « non-ambassadeurs ». Les premiers sont ceux susceptibles de recommander leur entreprise comme lieu où il fait bon travailler, les deuxièmes brillent par leur neutralité, les troisièmes par leur opposition… Plus ceux-là sont nombreux, plus l’engagement des salariés baisse. En cas de chute soudaine dans un département, « on sait qu’il s’est passé quelque chose », affirme Kevin Bourgeois, le créateur de cette plate-forme de sondages vendue aux employeurs. Pour qu’une telle solution ait la moindre chance de fonctionner, encore faut-il que le taux de réponses au questionnaire, envoyé chaque semaine, soit élevé. Impossible, sinon, pour les services RH de faire un usage éclairé de ces données. D’où une multitude d’astuces pour ne pas lasser les troupes, qui doivent y consacrer trente secondes à chaque fois, pas davantage. En cas de mauvais score, la jeune pousse met à disposition un data scientist et un expert RH pour comprendre d’où vient le problème.
Faut-il croire à ce genre d’outils ? La réponse n’est pas aisée. Mais ces solutions intéressent les entreprises, qui ont besoin de troupes motivées. Pour des raisons de productivité ou d’innovation comme pour des questions d’image et de communication interne. Résultat, beaucoup succombent à la tentation de se rapprocher de leurs salariés en sondant leur vie au travail. Supermood n’est pas la seule jeune pousse à surfer sur cette tendance. D’autres existent, tels Wittyfit, Zest, ou Temperprise.
Mais jusqu’où la collecte et l’analyse de données peuvent-elles aller ? Cocréateur de Broadstory, une « plate-forme d’évaluation du bien-être des salariés en continu », Romain Guitton ne se fixe pas de limite en termes d’analyse de données. En plus du suivi de l’engagement des salariés, il est preneur de toute info, allant de l’état du trafic aux grèves dans les transports en passant par le nombre de mails échangés ou des indicateurs liés au business, tels le niveau de marge ou le nombre d’appels traités. Même les consommations aux machines à café peuvent renseigner sur l’état de stress ou la bonne ambiance dans l’entreprise.
Autant de données qui, moulinées, doivent permettre un jour de déceler avant l’heure des difficultés dans un service ou le burn out latent d’un individu. Étape suivante, les objets connectés. En mesurant le nombre de pas ou le rythme cardiaque, les montres connectées jouent déjà leur rôle de prévention en matière de santé au sein des entreprises américaines. Chez le fabricant Withings, on assure d’ailleurs que les employés stressés par leur job dorment moins et ont un indice de masse corporelle nettement plus élevé…
Ira-t-on plus loin dans la mesure du stress pour mieux le prévenir ? « Aujourd’hui, personne ne sait le mesurer en temps réel », admet Alexis Normand, responsable du développement santé chez Withings, qui voit mal les entreprises investir ce champ… Mais les plus curieux pourraient avoir d’autres données à se mettre sous la dent. Mi-septembre, le Massachusetts Institute of Technology a dévoilé un capteur d’émotions capable de mesurer aux battements du cœur et à la respiration si vous êtes triste ou heureux. Vertigineux !