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Sur le Net, les boîtes font briller leur marque

À la une | publié le : 03.05.2016 | Éric Béal

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Sur le Net, les boîtes font briller leur marque

Crédit photo Éric Béal

Les employeurs ont investi le Web 2.0. Pour cultiver leur image, ils y déploient tous azimuts leur communication corporate. Et s’appuient sur des salariés ambassadeurs pour gagner en authenticité.

Il est loin le temps où les entreprises pouvaient se contenter de publier des petites annonces dans les journaux pour faire connaître leurs métiers et trouver l’oiseau rare. Les candidats ne lisent plus guère la presse papier et trouvent sur le Web toutes les infos possibles sur le futur employeur, de la situation économique au climat social. Mieux, en fouillant les réseaux sociaux ou les sites de notation, ils peuvent tomber sur des tuyaux concernant l’ambiance, les évolutions de carrière ou la qualité du management. Des informations données par… les salariés eux-mêmes. Qui parfois se lâchent et renvoient une image peu valorisante de l’entreprise.

« C’est une lame de fond. Avec Internet, le contact est direct entre les salariés et le public. Tout décalage entre la communication d’entreprise et le vécu des collaborateurs abîme la réputation de l’entreprise et la rend moins attractive », affirme Gilles Verrier, directeur général du cabinet Identité RH et ancien DRH. Un danger dont les groupes ont pris conscience. Pour s’en prémunir, ils développent des stratégies numériques très poussées pour cultiver leur image et maintenir leur attractivité.

Le Crédit agricole est de ceux-là. LinkedIn, Twitter, Facebook, Viadeo, JobTeaser mais aussi Pinterest ou Instagram… la banque est partout ! Même sur Youtube, où elle dispose de sa propre chaîne pour diffuser ses pubs, présenter ses métiers, détailler sa politique RH. « Nous voulons tisser des liens avec les internautes, explique Anne-Sophie Bourgeois, responsable marque employeur, recrutement et mobilité groupe de Crédit agricole SA. Au-delà de notre site corporate, c’est une façon d’entrer en relation avec les communautés qui nous intéressent. » Cette utilisation massive des réseaux sociaux s’adresse aussi aux 140 000 salariés. « Si ce que nous racontons sur les réseaux entre en résonance avec ce qu’ils vivent, ils n’hésitent pas à le diffuser sur leur réseau personnel et à manifester leur fierté d’appartenance », justifie la dirigeante.

Salariés volontaires.

Chez Renault, la présence numérique se veut plus ciblée. Le constructeur mise d’abord sur les classiques LinkedIn, Youtube et Facebook pour dynamiser sa politique de recrutement. « Nous diffusons de l’information sur le groupe et les produits ainsi que sur les offres de poste. Nous utilisons aussi Twitter et Instagram, en relayant des annonces de recrutement ou des informations ponctuelles », relève Corina Cimpeanu, responsable image employeur et école RH. En quête d’authenticité, le constructeur automobile mobilise aussi ses troupes. « Une série de vidéos met en scène des salariés qui parlent de leur travail. Tous sont volontaires, nous avons plutôt l’embarras du choix. De même, ils relaient spontanément nos informations sur leurs propres réseaux sociaux, car travailler chez Renault est un motif de fierté », ajoute-t-elle.

Un rapide détour sur Youtube suffit pour constater que le phénomène touche tous les secteurs professionnels. Exemple parmi d’autres, celui d’Amel, ingénieure système contrôle aérien chez Thales. Grand sourire un peu timide pour cacher son trac, la jeune femme détaille son métier dans une vidéo de presque huit minutes. Elle est loin d’être la seule. Sur son site, le groupe présente une vingtaine de vidéos de ce type, dans lesquelles des salariés jouent les ambassadeurs.

Chez le géant des travaux publics Colas, on encourage aussi salariés et stagiaires à s’exprimer. Y compris sur le site de notation Glassdoor. Cédric Mendes, responsable recrutement et relations écoles de Colas, fait le décompte : « 60 % de nos recrues sont des débutants issus de la formation en alternance ou d’anciens stagiaires. Ce qu’ils disent de nous a beaucoup de retentissement auprès de leurs pairs. Même les avis négatifs sont utiles car ils renforcent la crédibilité des échanges. Sous réserve que les commentaires positifs soient plus nombreux ! »

Certains employeurs vont plus loin encore. Tel le groupe d’assurances Covéa, qui regroupe les marques MMA, Maaf, GMF, Assurances mutuelles de France et Fidélia. Lui a adopté une stratégie de communication très centrée sur ses salariés. Il ne se contente pas de publier des vidéos métiers mais propose aux volontaires de faire office « d’ambassadeurs de marque ». « Il s’agit de salariés qui acceptent de voir leurs vidéos déposées sur les sites du groupe et de faire connaître notre marque employeur sur leurs réseaux professionnels, précise Véronique Jolly, la directrice du développement des parcours et des compétences. Certains d’entre eux diffusent des visuels ou autres matériaux internes comme ils le souhaitent. Ils sont libres de témoigner à tout moment sur le Net. » Les troupes se voient ainsi confier une partie de la communication sur la marque employeur. Un choix osé si le climat social se détériore un jour…

Chez GiFi aussi, les salariés interviennent dans la communication externe. Philippe Gineste, le patron, a invité ses collaborateurs des services transversaux à participer à une vidéo à l’occasion de la Fête de l’entreprise 2014. Toujours visionnable sur le site de GiFi, ce film kitsch met en scène Manolo, le chanteur des Gipsy Kings, interprétant « J’aime ma boîte » devant des salariés en train de danser et des ballets de voitures aux couleurs de l’enseigne. Aucune information sur les métiers ou les perspectives offertes par l’entreprise, mais une mise en valeur de l’ambiance interne. Fabrice Brun, le délégué CFDT, reconnaît le côté paternaliste de l’initiative mais précise que l’enthousiasme des collaborateurs n’était pas feint. « Les conditions de travail et le dialogue social sont bons. Les salariés des services centraux touchent de la participation et de l’intéressement. Mais pas forcément ceux des magasins, qui ne dépendent pas de la même unité économique et sociale. » Une expérience isolée, les entreprises privilégiant les vidéos consacrées à leurs métiers.

Randstad, BNP Paribas, Vinci, L’Oréal, Fnac… la liste des groupes qui recourent aux témoignages de leurs salariés sur la Toile est impressionnante. Tous font le constat que, pour soigner leur marque employeur, il n’y a rien de tel que de « vrais » témoignages. « Les gens recherchent une communication plus authentique pour compléter les informations factuelles disponibles sur les sites institutionnels. Les employeurs en tiennent compte », souligne Agnès Duroni, consultante spécialisée en stratégie RH.

Preuve que le sujet est sensible, des experts du marketing ont fait leur apparition dans la plupart des services RH des groupes. À eux de cultiver ce lien direct entre salariés et internautes. « Un témoignage naturel est un puissant relais de la marque employeur à l’extérieur. Et il produit un effet positif en interne », témoigne l’une de ces spécialistes. Qui confie ne jamais former les volontaires à l’expression orale avant de les filmer. Par souci d’authenticité, encore et encore…

“Il est bon de partager son expérience” Emmanuel Rougier, inspecteur au Crédit agricole

Âgé de 26 ans, Emmanuel Rougier a intégré l’inspection générale du Crédit agricole après avoir réussi le concours d’entrée alors qu’il était en poste chez Ernst & Young. On peut le découvrir sur JobTeaser présenter son métier d’auditeur/inspecteur dans une vidéo de trois minutes destinée aux candidats. « J’ai accepté de jouer le jeu par curiosité et parce qu’il est bon de partager son expérience. D’un point de vue personnel, c’était aussi un challenge », dit-il dans un sourire.

Flatté qu’on lui propose de témoigner, le jeune inspecteur n’avait pas eu besoin du Net pour avoir envie de candidater. « Je me suis inscrit au concours sur le conseil d’amis. Ce n’est qu’après l’avoir passé que j’ai découvert les vidéos concernant le métier. » Actif sur Facebook, LinkedIn et Instagram, Emmanuel Rougier n’a pas pour autant communiqué sur les réseaux sociaux pour médiatiser sa vidéo. « Ça me paraissait trop égocentrique », confie-t-il. Ce qui ne l’empêche pas d’apprécier les retours positifs qui lui sont renvoyés lorsque ses relations le découvrent sur le Net.

Auteur

  • Éric Béal