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Idées

Plus de moyens pour la justice sociale !

Idées | Juridique | publié le : 03.03.2016 | Isabelle Taraud

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Plus de moyens pour la justice sociale !

Crédit photo Isabelle Taraud

Au cœur des artifices mobilisés pour réclamer une réforme du Code du travail, le patronat prétend que le risque et le poids des condamnations aux prud’hommes sont un frein aux embauches. Mais la réalité du terrain est celle de salariés opprimés par la lenteur des décisions de justice. Un cadre attend plus de trois ans la première audience de jugement à Nanterre ; pour plaider devant le juge départiteur, il faut attendre au moins dix-huit mois à Paris, Marseille, Bordeaux, vingt-quatre à Créteil, trente à Bobigny au lieu du délai légal d’un mois…

L’État a déjà été condamné maintes fois. En 2011, à l’initiative du Syndicat des avocats de France, 71 salariés ont obtenu sa condamnation sur le fondement de l’article 6-1 de la Convention européenne des droits de l’homme qui garantit que « toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue équitablement, publiquement et dans un délai raisonnable par un tribunal indépendant et impartial ». Depuis, en dépit du changement de majorité, rien n’a été fait. Et 307 plaignants ont de nouveau saisi la justice. La première audience s’est tenue le 10 février. Le parquet se mobilise encore à leurs côtés, reconnaissant pleinement les carences de l’État. L’Agent judiciaire de l’État admet la faute et plaide seulement pour minimiser l’évaluation des préjudices. Les pistes de réforme procédurale conçues dans la loi Macron sont pour l’essentiel inadaptées et si complexes que, sept mois plus tard, l’élaboration du décret est enlisée. Aucun budget supplémentaire ne sera mobilisé pour la justice du quotidien. Nos gouvernants préfèrent développer la médiation, conçue pour désengorger les juridictions, et non pour mieux répondre aux besoins des justiciables, invités à brader leurs droits.

Et comment mieux contraindre les salariés à s’y résoudre qu’en plafonnant leur espoir d’indemnisation, objectif tenace du gouvernement, malgré la censure du Conseil constitutionnel de l’été dernier ? Dans le rapport Badinter, rien n’a été indiqué pour garantir au salarié licencié l’indemnisation intégrale de son préjudice ni un accès au juge dans des délais raisonnables. Cela ne serait-il pas digne de figurer dans les principes essentiels du droit du travail ? Rien ne sert d’édicter des lois pour protéger les plus faibles si aucun juge ne peut efficacement sanctionner leur violation.

Auteur

  • Isabelle Taraud