Les managers se trompent souvent. L’erreur est même presque consubstantielle à la fonction, particulièrement dans notre monde où règnent de multiples incertitudes, financières, techniques et géopolitiques. Mais, en France notamment, un patron a du mal à reconnaître ses erreurs.

Christine Kerdellant, elle, en a identifié 12 formes à partir de 150 cas dûment analysés. La première, la plus fréquente, est celle qui empêche la conquête d’un marché : pourquoi ni Microsoft ni Amazon n’ont réussi à arracher le marché du smartphone à Apple ? Deuxième catégorie, les erreurs directement liées à la culture de l’entreprise ou à la psychologie de son chef : absence d’un véritable contrôle, mégalomanie, sous-capitalisation chronique, etc.

L’ouvrage commence avec l’échec des Google Glass, qui paraissaient vouées à un triomphe, mais qui, comme on dit pudiquement, n’ont pas trouvé leur « public ». Autre illustration d’une mauvaise perception des souhaits du marché, la stratégie menée il y a quelques années par Carrefour de « chercher la marge plus que le chiffre d’affaires ». Avoir raison trop tôt est aussi une erreur grave, comme le destin du Concorde l’a montré. Aujourd’hui, ce qui domine, c’est la crainte de rater un virage technologique, à la manière de Kodak face au numérique, ou de se faire « ubériser », comme les taxis parisiens. Il y a aussi la faute caractérisée de communication, qui peut coûter cher, Christine Kerdellant rappelant les exemples fameux de la campagne de Publicis pour la R14, assimilée à une poire, ou de celle de Benetton, inutilement provocante du fait des photos trash de Toscani.

Le livre s’achève sur « la tentation mégalomane », celle où la vision du P-DG est d’une ambition littéralement écrasante pour son entreprise. Messier à Universal, Tchuruk chez Alcatel, Lauvergeon chez Areva figurent parmi les illustrations choisies par la journaliste de l’Express-Expansion. « Quel comportement les entreprises les plus performantes adoptent-elles face à l’erreur, une fois celle-ci actée ? Tout est là », prévient-elle. La plus grave erreur étant peut-être de croire qu’on ne la fera pas deux fois.

Ils se croyaient les meilleurs. Histoire des grandes erreurs de management. Christine Kerdellant. Éditions Denoël. 528 pages, 21,50 euros.