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Idées

Attention au dialogue de sourds !

Idées | Bloc-notes | publié le : 03.11.2015 | Catherine Barbaroux

Air France, hélas

En quelques images, ce qui s’est passé le 5 octobre à Air France a douché les espoirs naïfs de ceux qui espéraient que le rapport Combrexelle pourrait ouvrir une voie pour la refondation rapide du dialogue social. Ces violences visibles inexcusables contre la violence invisible des destins brisés par le chômage ont révélé notre difficulté collective à passer d’un monde à l’autre. La transition qu’elle soit économique, numérique ou écologique n’en finit pas de créer des tensions douloureuses et sous-estimées dans leur impact humain et social. Les politiques et les syndicats s’épuisent dans le vacarme, l’essoufflement et l’impuissance qui nourrissent une exaspération croissante. Et l’enthousiasme de ceux qui voient le monde de demain plein d’opportunités ne permet pas de la contrecarrer. La solution n’est évidemment pas dans le déni de la réalité, qu’il s’agisse de la concurrence (le low-cost dans le transport aérien) ou de l’allongement de la durée de la vie (le déséquilibre des régimes de retraite), comme persistent à le faire certaines organisations syndicales. Elle n’est évidemment pas non plus dans la stigmatisation des personnes et des fonctions. Faire de Xavier Broseta le symbole du DRH inhumain est inacceptable. Pour l’avoir connu comme collaborateur à la DGEFP, je peux attester qu’il porte des valeurs personnelles et professionnelles respectables et respectueuses des autres.

Paritarisme

Dans ce contexte d’affrontement violent, l’accord sur les retraites complémentaires apporte un démenti à ceux qui concluent trop vite à l’inutilité ou à l’archaïsme des organisations syndicales.

Au contraire, la prise de responsabilité qui sous-tend le paritarisme permet une pédagogie intransigeante. Compromis n’est évidemment pas compromission. Et la décote modeste et provisoire est un choix plus raisonnable qu’une mesure généralisée, d’autant qu’elle ne concerne pas les retraites les plus modestes.

Les non-signataires peuvent avoir une autre appréciation du rapport de force et préférer une plus forte contribution des employeurs au rééquilibrage des régimes. Mais gageons qu’ils sont soulagés que le « sauvetage » soit fait par les partenaires sociaux et non par une reprise en main de l’État.

Espérons que cette volonté de prendre ses responsabilités restera puissante dans les futures négociations, surtout sur la convention d’assurance chômage.

De quoi parle-t-on ?

La célébration incantatoire du dialogue social tout au long de la 4e conférence sociale pour l’emploi ne conduira pas spontanément à « l’apaisement » recherché par le président de la République. Mêmes les plus radicalisées des organisations syndicales jouent le jeu de la négociation, qui reste active au niveau des branches et des entreprises, comme en témoignent les 85 % d’accords signés par la CGT ou la faible conflictualité. Mais pour réinventer un modèle social adapté aux enjeux d’aujourd’hui, il faut franchir une étape supplémentaire : partager une vision des transformations inéluctables qui remettent en cause ses fondements. Repenser le travail, gérer la porosité entre les statuts d’emploi, construire les nouvelles sécurités professionnelles et redéfinir les contributions aux solidarités nécessitent un changement de registre, qui est loin d’être partagé. Le compte personnel d’activité en sera peut-être la résultante mais sûrement pas le commencement.

Auteur

  • Catherine Barbaroux