La thèse de Jean-Michel Quatrepoint tient en quelques mots : la France a laissé un de ses fleurons industriels filer sous la coupe d’une multinationale américaine pour un plat de lentilles. Ou presque : une amende de 772 millions de dollars. Le département américain de la Justice l’a infligée au groupe Alstom, pour des actes de corruption, à un moment si bien choisi que que celui-ci n’a eu d’autre choix que vendre sa branche énergie. Le « complot » a pu fonctionner grâce à une série de mauvaises décisions industrielles, disséquées dans cet ouvrage polémique. L’auteur replace cette triste destinée dans un contexte tout aussi déprimant. De Lafarge à Alcatel, plusieurs de nos joyaux finissent dans des mains étrangères, ce qui est pour le moins le signe, à ses yeux, d’un renoncement de notre pays à avoir une « grande politique industrielle ». « Quelles que soient les déclarations d’intention, les garde-fous mis ici ou là, le déplacement du centre de décision marque toujours une rupture dans la vie de l’entreprise », avertit-il. Dans ce réquisitoire, tout le monde en prend pour son grade. « Si les dirigeants ont trop souvent fait passer leur ego avant l’intérêt général, il appartenait à l’État et à ceux qui l’incarnent de les remettre dans le droit chemin », estime Jean-Michel Quatrepoint. Son essai est une implacable leçon de choses.