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Idées

Management, les liaisons dangereuses

Idées | Livres | publié le : 02.02.2015 | Jean Mercier

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Management, les liaisons dangereuses

Crédit photo Jean Mercier

Le sociologue François Dupuy dénonce la myopie et la paresse managériale des dirigeants. Avec férocité.

Dans son précédent ouvrage, Lost in Management, François Dupuy avait raconté, avec sa férocité coutumière, combien les managers se faisaient des illusions sur le contrôle réel qu’ils possédaient sur leur entreprise et leurs salariés. Et comment ces derniers mettaient en œuvre toutes sortes de stratégies pour échapper aux injonctions au travail et au changement. Poussant un cran plus loin la réflexion, et la critique, l’auteur veut cette fois « démontrer le mécanisme par lequel la pensée managériale conduit les dirigeants, par le biais de décisions paresseuses, dans des impasses aux conséquences très concrètes ». Un second motif parcourt tout cet essai, celui des dommages liés au grave manque de culture générale de la nouvelle génération de gestionnaires. Pour beaucoup, la réalité se réduit à une chaîne de causalités ne dépassant pas le champ de l’immédiatement perceptible : « l’explication devient simpliste, entraînant le simplisme de la solution ».

La première partie du livre fournit des illustrations de cette myopie managériale que trop souvent les intéressés traduisent par « résistance au changement ». Sans réaliser que celle-ci s’explique par le caractère superficiel de leur propre approche. Le professeur reprend sa casquette pour mettre l’accent sur la différence, fondamentale à ses yeux, entre structure et organisation. La structure ? C’est l’organisation telle qu’elle voudrait être. Mais pas la vraie organisation. De même, le pouvoir se répartit rarement comme l’organigramme le prétend. Méconnaître cet enseignement de base de la sociologie des organisations amène à croire qu’en modifiant les structures on change les comportements. Le plus sûr moyen de courir à l’échec.

François Dupuy appelle aussi les directions à en finir avec la rhétorique de « l’intérêt général ». Et à prendre en considération le règne du « chacun pour soi » : au management de se faire le régulateur de ces intérêts particuliers dans un sens favorable à la collectivité de travail. Autre élément que le consultant tient à dénoncer : l’idée que la coercition est un outil efficace de management. Et pourtant, elle existe plus que jamais sous des formes détournées. « C’est un déluge de procès, d’indicateurs de performance et de techniques de reporting qui s’est abattu sur les entreprises et leurs salariés », constate l’auteur. Lui, plaide pour un recours à des relations de confiance, même s’il en reconnaît la difficulté. Mais la facilité, sur laquelle prospèrent business schools et consultants, c’est précisément l’ennemi numéro un du manager !

La Faillite de la pensée managériale, François Dupuy. Éditions Seuil. 234 pages, 20 euros.

Auteur

  • Jean Mercier