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Édito

Le choix d’une France non qualifiée

Édito | publié le : 03.04.2014 | Sandrine Foulon

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Le choix d’une France non qualifiée

Crédit photo Sandrine Foulon

Et pour quelques milliards de plus, 10 exactement, le gouvernement fera-t-il le choix de l’emploi non qualifié Le suspense devrait cesser ce mois-ci. Histoire de donner des assurances à Bruxelles sur la maîtrise de nos déficits, les dernières inconnues sur le pacte de responsabilité auront été levées et les arbitrages rendus sur les allégements de charges concédés aux entreprises. Sauf surprise, l’exécutif devrait plutôt cibler ces 10 milliards d’euros supplémentaires – en plus du CICE – sur les bas salaires. Ce serait pour lui un moyen rapide de faire chuter le chômage. Un calcul court-termiste que viennent de conforter des études d’économistes. Appliqués à toutes les entreprises, les allégements de charges sur les bas salaires pourraient créer de 500 000 à 800 000 emplois au bout de cinq ans. De quoi faire rêver un chef de l’État rivé sur la courbe du chômage.

Reste à savoir jusqu’où il déplacera le curseur. Pour contenter tous les partenaires sociaux, et surtout la métallurgie – peu consommatrice d’emplois non qualifiés –, le gouvernement pourrait bien trouver un compromis dont il a le secret. S’il accède aux demandes du Medef de porter les allégements de charges au-delà de 1,6 smic, ces derniers favoriseraient des emplois à plus forte valeur ajoutée mais avec le risque que les effets sur l’emploi tant espérés soient dilués. Et que les entreprises utilisent ce ballon d’oxygène pour restaurer leur compétitivité sans recruter… Mais surtout, quoi qu’en disent les oracles, baisser le coût du travail n’est pas forcément un gage de créations d’emplois. A fortiori quand on s’y prend en même temps que ses voisins. Le ticket de la déflation compétitive n’a alors guère de chances d’être gagnant. Sans oublier l’écueil le plus trivial : quelle que soit la nature des allégements consentis, les carnets de commandes des entreprises doivent être pleins pour les inciter à embaucher.

De Balladur en 1993 à Fillon en 2008 en passant par Juppé et Jospin, les allégements de charges sur les bas salaires n’auront pas eu raison du chômage de masse. Opter pour cette politique, c’est aussi ouvrir en grand les trappes à bas salaires et condamner les salariés non qualifiés à rester abonnés à la précarité et aux boulots les moins payés. Dans une récente note, le think tank Terra Nova, proche du PS, préconise de conditionner ces allégements à un effort de formation. Une solution pour enclencher un cercle vertueux. C’est le double pari de François Hollande. Compter sur une baisse du chômage à court terme et espérer sortir de la nasse de l’emploi non qualifié grâce à la réforme de la formation professionnelle. Encore faut-il que les entreprises maintiennent leurs investissements en formation, aujourd’hui en baisse. Un dernier défi gourmand en temps. Qui n’est pas celui des échéances électorales. Le camouflet des municipales lui laisse peu de marge.

Retrouvez la chronique de Sandrine Foulon « Ma vie au boulot » dans l’émission d’Alexandra Bensaid « On n’arrête pas l’éco », tous les samedis à 9 h 10, sur France Inter.

Auteur

  • Sandrine Foulon