Patron avant-gardiste

Avec trois associés, il crée en 1998 Convers, un centre d’appels très atypique. « Les concurrents embauchaient beaucoup de jeunes et formaient peu. Nous avons au contraire misé sur la maturité pour améliorer la qualité de services, en recrutant beaucoup de seniors (30 % de plus de 50 ans aujourd’hui) et de femmes (notamment celles ayant arrêté de travailler quelques années) », résume Philippe de Gibon. Résultat, la PME niçoise réalise aujourd’hui un chiffre d’affaires de 8 millions d’euros (2012) et emploie 230 salariés sur la promenade des Anglais. Convaincu que les « chefs d’entreprise doivent faire preuve de plus d’audace », le P-DG de Convers est un hyperactif, attaché au dialogue social, impliqué dans le recrutement de salariés handicapés (8 % des effectifs) et de jeunes de quartiers défavorisés (24 % de l’effectif). Plateau aménagé avec l’Anact, marges de manœuvre laissées aux téléconseillers…, il mise sur la qualité de vie au travail, en favorisant aussi le « temps convenu » : deux fois par an, les salariés optent pour 20, 25, 30 ou 35 heures hebdomadaires en fonction de leurs contraintes personnelles et peuvent choisir chaque semaine leurs jours et heures de travail. D’où un turnover d’environ 8 %, soit trois à quatre fois moins que la moyenne du secteur… et une grosse clientèle du CAC 40, attirée par cette gouvernance éthique. Très sollicité, Philippe de Gibon est président d’Opcalia Paca, de C3 Paca (club de centres de contacts) et membre du conseil d’administration d’IMS-Entreprendre pour la cité.

Détracteur du « tout financier »

Aerospatiale, Alcatel Space, Alcatel Alenia Space et enfin Thales Alenia Space. Quatre périodes pour une même société, où Éric Brunet-Manquat est entré il y a trente-deux ans comme technicien supérieur à Cannes.« Métiers pointus et passionnants, perspectives de carrière attrayantes, dialogue social de qualité », le secrétaire du CCE et DS FO met en avant sa fierté d’appartenance au fabricant de satellites (7 500 salariés dont 2 000 à Cannes). Et souligne l’implication très forte du personnel… jusqu’à présent. Avec un carnet de commandes moins rempli, « la direction parle de sureffectif ciblé et envisage des mobilités et des mises à disposition, alors qu’elle devrait davantage investir en R & D et mieux rétribuer les salariés au regard des bénéfices réalisés. Elle semble obnubilée par la profitabilité, comme en 2010 ». Année où l’intersyndicale avait occupé les locaux plusieurs jours avant d’obtenir des concessions salariales.

Le pivot RH

Directeur des RH mais aussi de l’organisation, Jean Blandin accompagne depuis cinq ans et demi l’expansion de Façonnable, fabricant et distributeur niçois de vêtements haut de gamme pour hommes depuis 1950 (600 collaborateurs dans le monde, 300 en France). À son actif, l’harmonisation des process entre l’Europe et les États-Unis, la formalisation des valeurs de Façonnable ou encore la création d’un programme de développement des talents.

Le positionnement de plus en plus haut de gamme de la marque et la hausse régulière du nombre de points de vente impliquent d’approfondir la formation des 235 vendeurs (deux tiers de femmes) et des managers. « Le DRH doit être le directeur des interrelations, au croisement des intérêts et des questionnements des différents acteurs, hors des jeux de pouvoir », estime Jean Blandin, qui aime présenter son métier devant des publics de jeunes.

Niçoise depuis toujours, Mireille Damiano est l’un des rares avocats du département estampillés prosalariés. La plupart de ses pairs plaident autant pour les patrons que pour les employés. Le territoire compte énormément de TPE-PME dans lesquelles « il y a une grande part d’affect dans les relations du travail et où la présence syndicale est très faible », assure M^e Damiano, qui déplore « le recours croissant à des licenciements pour faute grave et la multiplication de situations de harcèlement moral ». Elle planche sur le harcèlement dans le cadre de la commission santé et souffrance au travail du Syndicat des avocats de France, organisation qu’elle a présidée en 1998.

Depuis trois ans, elle collabore au groupe RPS des Alpes-Maritimes initié par la Direccte. Au programme, des matinales de sensibilisation au travers de thèmes tels que l’inaptitude, la charge de travail et, bientôt, l’expertise CHSCT sur la souffrance au travail. L’avocate a eu à défendre la famille d’une salariée qui s’est suicidée devant son entreprise, des cadres précarisés de SSII et intervient actuellement sur des dossiers de discrimination syndicale dans le secteur bancaire.

Incontournable sur la formation

Fin connaisseur des rouages de la formation professionnelle et de l’emploi, Luigi Poma dirige depuis seize ans l’Association pour le développement de l’emploi par la formation. Mission : informer, former et accompagner les entreprises, les associations et les acteurs institutionnels. Deux ou trois fois par semaine, il adresse un courriel d’actualité à près de 1 200 interlocuteurs. « L’information sur la formation est très compartimentée, d’où la nécessité de la regrouper et de la mettre en perspective », insiste le formateur, reconnu et apprécié. Son leitmotiv : « Mettre en réseau les acteurs, au plus près du terrain, c’est-à-dire au niveau départemental, pour être opérationnel. » Il préside la commission emploi-formation-éducation de l’Union patronale des Alpes-Maritimes, qui regroupe les différents types d’interlocuteurs sur ces thématiques. Un atout de taille pour s’adresser aux TPE-PME. À l’actif de la commission : un guide sur le tutorat interne et externe impulsé par Opcalia et le FPSPP, une information régulière sur les aides mobilisables pour chaque dispositif et la formation des partenaires institutionnels.

Combattant antiprécarisation !

Cordial, sérieux, pragmatique, tenace ». Ainsi est décrit le leader, depuis sept ans, de la CFDT des Alpes-Maritimes – qui regroupe plus de 8 000 adhérents. Cet ancien éducateur spécialisé, qui a travaillé longtemps auprès des SDF, combat l’ouverture 7 jours sur 7 de nombreux supermarchés, interdite par arrêté préfectoral (sauf l’été).« Nous avons gagné en première instance, en appel et en cassation, relève-t-il. Nous ne sommes pas là pour faire payer les contrevenants, mais pour faire cesser les infractions. » Autre priorité, la lutte contre le travail illégal : main-d’œuvre italienne dans le BTP, salariés grecs détachés d’Allemagne pour nettoyer les véhicules de location à l’aéroport. Refusant tout positionnement politique, Jean-Michel Hervo s’efforce de peser davantage, dans un environnement marqué par les liens étroits entre FO, les organisations patronales et la mairie de Nice.

Elle conduit depuis cinq ans des transformations qui ont profondément modifié la politique RH de l’aéroport de Nice, avec son équipe, qu’elle n’oublie pas de mettre en avant. Naviguant depuis vingt-trois ans dans l’univers aéroportuaire, Geneviève Canterini a piloté en 2008 la création de la société gestionnaire des aéroports de Nice et Cannes-Mandelieu et le passage du statut CCI au privé pour 486 agents, une évolution formalisée fin 2009 par un accord signé par tous les syndicats. Depuis, tout s’est enchaîné : mise en place des IRP, d’une complémentaire santé-prévoyance, accords seniors puis intergénérationnels, intéressement, PEE, Perco, égalité professionnelle, GPEC… Primée au niveau régional dans le cadre du tour de France de la Charte de la diversité, la politique handicap a permis la sensibilisation de l’ensemble du personnel et pas seulement des managers, grâce à un dispositif de formation innovant, sur une période de moins de trois mois malgré un fonctionnement en continu. Depuis mi-2013, un SIRH unique gère le recrutement, les entretiens annuels, les visites médicales, la formation… ainsi qu’un portail salariés et managers.« Chaque année, avec l’équipe, on se dit qu’on va souffler, mais on a toujours de nouveaux projets à conduire », assure cette insatiable DRH. Parmi les prochains chantiers : l’évolution des outils de paie et de gestion des temps et l’élaboration de passerelles de mobilité.

Facilitateurd’actions handicap

Pour sa contribution depuis près de vingt ans à l’insertion professionnelle des personnes handicapées, Georges-Éric Martinaux a reçu en novembre le prix de la bonne pratique « excellence opérationnelle », au nom de Handy Job 06. Mission de cette association qui emploie une trentaine de salariés : accompagner les entreprises dans le maintien dans l’emploi, présélectionner des candidats, réaliser un audit handicap, concevoir une sensibilisation du personnel… « Mieux vaut un discours de mobilisation que de culpabilisation, juge Georges-Éric Martinaux.Nous pouvons aussi agir sur les offres d’emploi, souvent restrictives. Nombre de salariés handicapés possèdent le “savoir-être” et peuvent acquérir le savoir-faire. » Résultat : près de 1 200 « placements » chaque année, à 80 % en CDI ou en CDD de plus de trois mois. Et près de 400 maintiens dans l’emploi.

Le chantre de l’innovation

Ancien dirigeant du groupe de BTP Cari, Georges Dao s’est lancé un défi début 2013 avec son équipe : sélectionner de jeunes entreprises innovantes, les aider à valider leur projet et leur apporter des fonds propres, parce que le territoire manque cruellement de fonds d’amorçage. « Sur 5 000 créations d’entreprises par an dans le département, une centaine a un fort potentiel de croissance, explique le président de BA06 Accompagnement. Nous en aidons déjà une douzaine grâce à une levée de fonds de près de 2 millions d’euros. Elles pourraient générer 250 emplois à l’horizon de trois ans. » À la tête de la commission développement économique durable de l’UP des Alpes-Maritimes, il porte aussi le projet « Performance globale 06 », qui aide une vingtaine de PME à établir un bilan carbone et à s’initier à la norme ISO 26 000. Et milite en faveur de moyens de transport alternatifs.

Apôtre de l’anticipation

Avec deux associés, il a créé en 1981 à Nice l’un des plus gros cabinets des Alpes-Maritimes : près de vingt avocats, dont huit en droit social. Régulièrement sollicité par les fédérations professionnelles, Christian Delplancke est mandaté par des clients sur la question des forfaits jours, pour décrypter les arrêts de la Cour de cassation, voire pour participer à la rédaction de projets d’accords sécurisés. Il intervient également fréquemment en matière de détachement des travailleurs.« Lorsqu’une entreprise française du bâtiment fait appel à des artisans polonais, l’Urssaf peut choisir de requalifier en contrats de travail les prestations de ces sous-traitants. Une décision parfois contestable, qui peut mettre en danger la pérennité de l’entreprise », prévient l’homme de loi. Face à la méconnaissance en droit social de nombreuses PME, l’ancien président de l’Association des avocats praticiens en droit social du département plaide pour une consultation en amont plus systématique de l’avocat.