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Robin des Bois à l’hôpital

Actu | Eux | publié le : 02.12.2013 | Emmanuelle Souffi

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Robin des Bois à l’hôpital

Crédit photo Emmanuelle Souffi

La vie est parfois une drôle de ritournelle… C’est peut-être ce que se dit Martin Hirsch à quelques jours de prendre la tête de l’AP-HP, de ses 37 établissements et de ses 92 000 salariés. Des chiffres qui donneraient des sueurs froides à plus d’un, tant l’AP-HP est une poudrière. Mais pas à cette tête bien faite qui, parmi sa batterie de diplômes, n’oublie jamais de rappeler qu’il est titulaire d’un DEA de neurobiologie et qu’il fut directeur de la Pharmacie centrale des Hôpitaux de Paris. « C’est un animal politique comme on n’en fait plus », dit de lui Benoît Genuini, ancien P-DG d’Accenture France, avec qui il a fondé en 2006 l’Agence nouvelle des solidarités actives. « Il fait de la politique pour les autres, par pour un parti. »

Encarté nulle part mais le cœur à gauche, cet homme engagé a chèrement payé son entrée dans le gouvernement Sarkozy. Taxée de « traître » par ses amis socialistes, la caution sociale de la droite ne restera que le temps de sa mission : en dix-huit mois, il réforme le RMI et créé le RSA. Qu’importe si, finalement, les bénéficiaires du RSA activité sont trois fois moins nombreux qu’attendu (un demi-million en janvier 2013, contre 1,5 million) et si la pauvreté n’a pas chuté de 7 à 5 millions de personnes, comme il l’avait espéré. L’énarque et normalien s’en va trois ans plus tard diriger l’Agence du service civique. Ce M. « Toujours plus » a davantage l’habitude de bâtir des droits nouveaux plutôt que de réduire la voilure. C’est pourtant ce qu’il va devoir faire à l’AP-HP. Mireille Faugère s’y est cassé les dents. « Elle ne connaissait pas le monde médical, tempête un chef de service. On ne lui avait pas donné de cap. Martin Hirsch aura plus d’écoute car il a une étoffe et une sincérité. » L’ancienne directrice de SNCF Voyages paie la fermeture début novembre des urgences de l’Hôtel-Dieu, jugées trop peu sûres. « Chaque coup de peinture ici, c’est de l’argent en moins pour le futur hôpital du nord de Paris ! Là-bas, des malades ne sont plus soignés ! » estime un praticien qui pointe les déséquilibres dans l’offre de soins. Marisol Touraine avait juré qu’on n’y toucherait pas. « C’était un marché de dupes, il fallait calmer la tempête à l’approche des municipales », analyse Jean-Marc Devauchelle, secrétaire général de SUD Santé. Exit, donc, la diplômée de HEC et place au Robin des Bois du social, qui a toujours eu l’oreille de François Hollande.

La puissante commission médicale d’établissement – qui regroupe le personnel médical et participe aux décisions prises par l’administration – redoute que le nouveau patron ne revienne sur la nécessaire réforme de l’AP-HP. « À Paris, la sécurité, ce n’est plus un problème de proximité. Martin Hirsch va devoir faire comprendre que les restructurations ne correspondent pas à une démarche comptable, mais à une offre de soins modernisée. Sa crédi­bilité sociale sera un atout », note Pierre ­Coriat, chef de service à la Pitié-Salpêtrière. Tout le contraire du discours des syndicats. « Je ne vois pas quelle est l’utilité d’un changement de tête si la feuille de route reste la même », prévient le syndicaliste de SUD. Faire la synthèse entre des positions aux antipodes et se frotter à des mandarins qui ne fonctionnent pas comme des directeurs de caisse d’allocations familiales… Le pari est tentant. Mais risqué. « Tout se mérite », lui disait sa mère. La victoire. Comme l’échec.

Martin Hirsch

Directeur général de l’AP-HP.

1997

Directeur de cabinet de Bernard Kouchner, secrétaire d’État à la Santé, puis conseiller santé de Martine Aubry, ministre de l’Emploi.

2002

Président d’Emmaüs France.

2007

Haut commissaire aux solidarités actives contre la pauvreté.

2013

Directeur général de l’Assistance publique-Hôpitaux de Paris.

Auteur

  • Emmanuelle Souffi