logo Info-Social RH
Se connecter
Newsletter

Actu

Refiscaliser les heures sup a-t-il un impact sur l’emploi ?

Actu | L’éco du mois | publié le : 02.11.2013 |

non
Nicolas Bouzou Fondateur de la société de conseil dans le domaine économique Asterès.

Après l’instauration de la défiscalisation des heures supplémentaires en 2007, le nombre moyen d’heures sup a augmenté de 37 % entre 2007 et 2008. La hausse a ensuite été plus faible: 9 % entre 2008 et 2012. à l’inverse, la refiscalisation a accentué la baisse du recours. Le nombre moyen d’heures sup a diminué de 5,7 % entre le dernier trimestre 2011 et le dernier trimestre 2012, et de 6,9 % entre le premier trimestre 2012 et le premier trimestre 2013. Cette chute n’est pas seulement liée à la fin des avantages fiscaux puisque la tendance depuis l’année précédente était négative. La refiscalisation a participé à la baisse du nombre moyen d’heures sup, sans en être l’unique cause. La manipulation de la fiscalité a des impacts sensibles sur le revenu des ménages. Les exonérations d’impôts et la réduction de cotisation s’élevaient à 3,7 milliards d’euros pour les salariés. La refiscalisation a entraîné une hausse directe des charges et impôts des foyers fiscaux concernés.

La mesure a donc eu un impact sur environ 9,2 millions de salariés appartenant aux classes populaires et moyennes pour leur majorité. La perte moyenne pour les salariés est de l’ordre de 400 euros par an. Ensuite, les heures supplémentaires rapportent en moyenne 150 euros par mois aux salariés qui en effectuent. La baisse due à la réforme, soit environ 5 %, entraînerait une baisse du pouvoir d’achat de 7,95 euros par mois. L’effet de la défiscalisation comme de la refiscalisation sur l’emploi est beaucoup plus difficile à établir. Certes, certains macroéconomistes soutiennent que les heures supplémentaires peuvent se substituer à de nouvelles embauches. Cette assertion reste néanmoins théorique et peu vraisemblable pour qui fréquente le monde de l’entreprise.

oui
Éric Heyer Directeur adjoint au département analyse et prévision de l’OFCE.

L’impact de la refiscalisation des heures supplémentaires sur l’emploi est ambigu. En effet, deux effets de sens contraire se superposent. Le premier est négatif : face à l’augmentation du coût des heures supplémentaires, les entreprises seraient incitées à diminuer le temps de travail des salariés en place. La moindre rémunération de ces heures supplémentaires engendrerait une baisse du pouvoir d’achat entraînant un effet négatif sur l’emploi. Le deuxième est positif : en augmentant le coût d’une heure supplémentaire, cela dissuade les entrepreneurs à allonger la durée du travail, favorisant alors la situation des outsiders (les chômeurs) au détriment de celle des insiders (les salariés). Cela engendre une baisse de la productivité par tête des salariés français, ce qui permet à la croissance d’être plus riche en emplois.

À l’horizon 2014, cette réforme devrait, selon nous, provoquer une baisse de 7,1 % des heures supplémentaires. Elle permettra, selon nos simulations, la création ou la sauvegarde de 17 900 emplois, l’effet négatif lié à la baisse du pouvoir d’achat des salariés bénéficiant des heures supplémentaires (- 29 000 emplois) étant plus que compensé par l’effet positif résultant de la réduction du recours aux heures supplémentaires dans les entreprises de plus de 20 salariés (46 900 emplois). Par ailleurs, sur cette période, une fois le bouclage macroéconomique réalisé, cette réforme permettra de réduire le déficit des administrations publiques de 5,2 milliards d’euros. Ce résultat conforte l’idée selon laquelle, dans une conjoncture dégradée, comme cela est le cas dans la période récente, la défiscalisation des heures supplémentaires apparaît clairement inadaptée et contre-productive pour l’emploi.

POUR EN SAVOIR PLUS

La suppression de la défiscalisation des heures supplémentaires va-t-elle créer des emplois E. Heyer

www.ipp.eu/wp-content/uploads/2011/11/n1-notes-IPP-mars2012.pdf

La défiscalisation des heures supplémentaires : les enseignements de l’expérience française. P. Cahuc et S. Carcillo.

www.ipp.eu/wp-content/uploads/2011/11/n1-notes-IPP-mars2012.pdf