L’évolution des salaires en Allemagne, marquée par quinze ans de modération, ne préoccupe pas seulement les voisins de la première économie d’Europe. Experts et syndicats allemands constatent ainsi que quelques accords élevés ne suffisent plus à réduire la « fracture salariale » existante. « Auparavant, la thèse dominante était que les syndicats avançaient en convoi. Mais le clivage entre les secteurs s’est agrandi ces quinze dernières années… À la longue, cela peut diviser la société », expliquait, le 15 mai dernier, le président d’IG Metall, Berthold Huber, le jour où tombait une augmentation de 5,6 % pour les métallos allemands. En clair, il n’y a plus de secteur pilote capable de tirer les salaires vers le haut en Allemagne. Ainsi, pendant qu’IG Metall obtient une forte augmentation, les collègues d’Amazon Deutschland luttent contre les bas salaires en lançant la première grève de leur histoire. Ceux de la chaîne de grands magasins Karstadt, eux, ont été mis devant le fait accompli : leurs salaires seront gelés jusqu’en 2015. Dans le commerce, les fédérations patronales ont d’ailleurs décidé de dénoncer tous les accords du secteur pour les renégocier à la baisse !

Chez Lufthansa, on vient aussi de voir qu’une augmentation pouvait cacher une baisse. En effet, l’accord étant valable vingt-six mois, l’augmentation négociée fin avril (de 3 % à 4,7 %) sera assurément dévorée par l’inflation. Dans un pays où l’on recense près de 6,5 millions de salariés travaillant à moins de 8,5 euros l’heure, contre 3,7 millions de métallos, les tensions salariales ne risquent pas d’aller en diminuant.