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Éditorial

Un accord de temps de crise

Éditorial | publié le : 02.02.2013 | Jean-Paul Coulange

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Un accord de temps de crise

Crédit photo Jean-Paul Coulange

Le hasard fait bien les choses : à cinq ans d’intervalle, jour pour jour, les partenaires sociaux ont trouvé un accord sur l’emploi. En 2008, le texte visait sobrement « la modernisation du marché du travail ». Cette année, le ton se veut plus emphatique. L’accord national interprofessionnel du 11 janvier prétend concourir, ni plus ni moins, à « un nouveau modèle économique et social au service de la compétitivité des entreprises et de la sécurisation de l’emploi et des parcours professionnels des salariés »…

À elle seule, la longueur de l’intitulé de l’ANI de 2013 dit toute la difficulté de ces négociations qui ont duré plus de trois mois. Des 19 articles du texte de 2008, on a souvent tendance à ne retenir que son article 12, instaurant une rupture amiable du contrat de travail entre l’employeur et le salarié. Véritable révolution dont le succès ne se dément pas, le cap du million de ruptures conventionnelles ayant été franchi. Des 28 articles de son pendant de 2013, on serait bien en peine de n’aborder qu’un sujet. Certes, la généralisation de la complémentaire santé est citée par les organisations syndicales signataires en tête des concessions arrachées de haute lutte au camp des employeurs. De même que la « taxation » des contrats courts, qui a donné lieu à une foire d’empoigne au sein de la délégation patronale mais ne s’avère, in fine, guère pénalisante. Si les deux textes ont une nette filiation dans le domaine de la GPEC ou de la portabilité des droits notamment, l’accord de 2013 s’inscrit clairement dans un contexte de crise. Qui aurait imaginé il y a tout juste un an, lorsque l’éphémère négociation imposée par Nicolas Sarkozy sur les accords dits compétitivité-emploi a fait long feu, qu’une majorité d’organisations syndicales finiraient par avaliser ce type d’accords dérogatoires et les licenciements économiques afférents en cas de refus du salarié ? On objectera que les entreprises devront en passer par un accord majoritaire, ce qui est loin d’être acquis. Il n’empêche. Une digue a été emportée au nom du réalisme économique.

Qualifié de « gagnant-gagnant » par la Rue de Grenelle, l’accord du 11 janvier comporte effectivement des avancées, à confirmer, pour les salariés à temps partiel, pour les chômeurs, avec l’instauration de droits rechargeables, pour les intérimaires, qui pourraient signer des CDI, pour les IRP, avec un accès amélioré aux informations dites stratégiques… Mais il vise aussi à mieux encadrer le contentieux judiciaire sur les licenciements économiques. Finalement, le sentiment que laisse le texte est mitigé sur son ambition. Seule certitude : François Hollande et son gouvernement ont bien manœuvré. Car la fenêtre de tir était étroite avant que ne soit publiée, au printemps, la liste des organisations syndicales représentatives au niveau national et que les cartes soient rebattues. À l’avenir, il n’est pas du tout certain que CFDT, CFE-CGC et CFTC fassent une majorité.

Retrouvez la chronique de Sandrine Foulon « Ma vie au boulot » dans l’émission d’Alexandra Bensaid, « On n’arrête pas l’éco », tous les samedis à 9 h 10 sur France Inter.

Auteur

  • Jean-Paul Coulange