Elle apparaît au grand jour, après avoir travaillé dans l’ombre de Jean-Paul Bailly. La nomination de Dominique Blanchecotte (61 ans) comme médiatrice de la vie au travail du Groupe La Poste, est directement liée aux suicides de deux postiers bretons survenus au début du mois de mars (voir également l’éditorial page 5). Cette diplômée en marketing, droit privé et gestion de l’université Paris IX-Dauphine était depuis près de dix ans la directrice de cabinet du P-DG. Lequel l’a bombardée médiatrice et membre du comité exécutif du groupe en même temps qu’il annonçait le lancement d’un grand dialogue sur la vie au travail et promettait « une série de mesures concrètes » pour la fin avril. Avec la création du poste de médiateur, Jean-Paul Bailly espère frapper les esprits et améliorer une situation sociale qui se détériore depuis qu’il a entraîné La Poste dans une restructuration à marche forcée, dénoncée par les organisations syndicales. « Il faut réhumaniser La Poste, alors qu’un emploi est supprimé chaque heure depuis dix ans », affirme Hervé Tellier, secrétaire fédéral de la Fapt CGT. Tous les syndicalistes font le lien entre les réorganisations internes, les nouvelles méthodes de management et les suicides sur le lieu de travail. L’an dernier, certains d’entre eux se hasardaient à une comptabilité macabre, indiquant que l’entreprise avait connu quelque 70 suicides de salariés en dix-huit mois. D’autres sont plus prudents. « Nous n’avons pas obtenu la création d’un observatoire des suicides par la direction, indique Régis Blanchot, de SUD PTT, mais nous constatons une nette intensification du mal-être chez les postiers. » Un malaise également dénoncé en 2010, devant une commission d’information parlementaire, par une association de médecins du travail. Pour la direction, il était urgent de réagir. En novembre 2011, une inspectrice du travail a transmis un rapport au parquet de Paris concernant le suicide d’une salariée dans un centre financier de La Poste. Elle concluait à la « faute caractérisée » de la part de l’entreprise.

Autant dire que la mission de Dominique Blanchecotte va s’avérer délicate. Chargée de recueillir les doléances des postiers, de leurs représentants syndicaux ou des médecins de prévention, cette jeune grand-mère devra démontrer qu’elle peut contribuer à l’amélioration des conditions de travail des personnels qui s’adresseront à elle. Sous peine de perdre rapidement sa crédibilité.

À son actif, la médiatrice de la vie au travail peut revendiquer une réelle connaissance des problèmes concrets rencontrés par les salariés. L’ancienne directrice de cabinet, que les syndicats décrivent comme quelqu’un d’agréable et d’ouvert, recevait les délégations syndicales qui demandaient à parler au P-DG chaque fois que Jean-Paul Bailly se rendait sur le terrain. Mais cette proximité suscite des interrogations. « Jean-Paul Bailly parlait d’une instance de médiation indépendante. On peut se poser la question de savoir jusqu’où ira l’indépendance de la nouvelle médiatrice, alors qu’elle a travaillé en étroite collaboration avec le P-DG pendant toutes ces années », note Régis Blanchot, de SUD PTT.

Déterminés à obtenir que la direction « ouvre les yeux sur la situation réelle des postiers », les syndicats ont signé un communiqué commun réclamant « l’arrêt ou le gel des restructurations, des réorganisations, de la destruction de l’emploi qui ne visent que la rentabilité » comme préalable indispensable à l’amélioration des conditions de travail. De son côté, Jean-Paul Bailly n’a promis qu’un dialogue accru et des « ajustements ». Entre les deux, la nouvelle médiatrice devra trouver le ton juste.

Médiatrice de la vie au travail du Groupe La Poste.

1994

Directrice nouveaux produits, qualité de service, direction des escales de Paris, groupe Air France.

2001

Directrice du cabinet du P-DG de la RATP.

2002

Directrice du cabinet du P-DG du Groupe La Poste.