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Tableau de bord

À qui doit profiter la baisse des cotisations sociales ?

Tableau de bord | publié le : 01.02.2012 |

Pierre-Mathieu Duhamel Professeur de finances publiques à l’IEP de Paris. Associé KPMG.

Ce projet dit de « TVA sociale » souffre depuis l’origine d’une difficulté d’appellation car l’objectif premier n’est pas la fiscalité mais bien la réduction du coût du travail grâce à un allégement des prélèvements qui le grèvent, essentiellement destinés au financement de la protection sociale.

Une telle mesure a pour but de rendre plus attractif le travail en France : il s’agit d’améliorer la compétitivité du territoire et de favoriser l’emploi. L’entreprise peut utiliser cette marge de manœuvre de plusieurs manières : au profit du consommateur, sous forme de baisse des prix pour accroître ses parts de marché puis sa production et, à terme l’emploi ; au profit de l’investissement pour se moderniser, améliorer sa productivité et, là encore, favoriser sa compétitivité par rapport à ses concurrents étrangers et donc l’emploi en France.

Utiliser ces marges au profit des salaires reviendrait en revanche à nier la logique de la mesure. Par définition, un transfert entre la partie brute et la partie nette du salaire n’aurait aucun effet de réduction du coût global du travail et donc aucun impact, ni sur la compétitivité ni sur l’emploi.

Pierre Concialdi Économiste et chercheur à l’Ires.

L’allégement des cotisations employeurs lié à la mise en place d’une « TVA sociale » ne se répercutera pas intégralement sur les prix et viendra gonfler les marges, au moins pour une partie des employeurs. On sait bien que ce type de mesure s’accompagne d’effets d’aubaine. Le très faible impact sur l’emploi des exonérations de cotisations sociales sur les bas salaires est, à cet égard, particulièrement éclairant. Cette mesure viendra ponctionner encore davantage le pouvoir d’achat des salariés. En période d’économie atone, ce n’est conjoncturellement pas une bonne mesure pour l’emploi. Ce n’est pas non plus une réponse aux problèmes structurels de compétitivité. Il est illusoire de vouloir concurrencer par les coûts les pays à bas salaires. Surtout, la compétitivité des pays développés ne se joue pas principalement sur les coûts (comparables en France à ceux de ses principaux concurrents), mais sur un ensemble de facteurs plus qualitatifs sur lesquels le retard français s’est accumulé. Notamment parce que les entreprises françaises se sont accoutumées à voir dans la baisse des salaires – encouragée par les politiques publiques – la principale voie d’amélioration de la compétitivité.

Arnaud Chéron Directeur de recherche à l’Edhec Business School

Augmenter la TVA pour abaisser les cotisations patronales est un moyen de profiter d’une assiette du financement de la protection sociale plus large: on diminue plus le taux de cotisations employeurs qu’on n’augmente la TVA. Cela peut constituer un levier intéressant pour accroître la compétitivité des entreprises françaises à long terme. Les évaluations suggèrent en général une progression modeste de l’emploi, et si un risque inflationniste existe il se trouvera compensé par une progression des revenus, permettant une augmentation de la consommation globale. Toutefois, le problème posé est celui de l’incidence à court terme de cette mesure, en particulier dans le contexte actuel d’une conjoncture dégradée. La baisse du coût du travail ne sera répercutée que progressivement en diminution des prix hors taxes, impliquant une hausse instantanée des prix de détail TTC, pénalisant la consommation. Une alternative consisterait à répercuter la hausse de la TVA en baisse des cotisations « employés », permettant de maintenir le pouvoir d’achat des salariés, y compris à court terme. Laurence Parisot évoquait il y a peu l’idée de combiner baisse des cotisations « employés » et « employeurs »; la discussion ne fait que commencer !

Pour en savoir plus

Maîtriser nos finances publiques. Assurer notre avenir, dirigé par Pierre-Mathieu Duhamel. www.fondationconcorde.com/publications.php.

Quel avenir pour la « TVA sociale », Pierre Concialdi. www.eurofound.europa.eu/eiro/2008/01/articles/fr0801039i_fr.htm.

La TVA sociale, rapport d’Éric Besson. www.ladocumentationfrancaise.fr/rapports-publics/074000556/index.shtml.

Qu’attendre de la « TVA sociale », Patrick Artus. http://cib.natixis.com/flushdoc.aspx ?id=61654.