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Vie des entreprises

Patrick Boissier poursuit tambour battant la mutation de DCNS

Vie des entreprises | Méthode | publié le : 01.01.2012 | Anne-Cécile Geoffroy

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Évolution des effectifs

Crédit photo Anne-Cécile Geoffroy

Organisation, compétences, méthodes de travail… Patrick Boissier met le constructeur de navires militaires en ordre de marche pour répondre à d’ambitieux objectifs. Mais le dialogue social reste tendu dans cette ex-administration.

Au fond de la cale de l’aviso Lieutenant-de-Vaisseau-Lavallée, amarré dans le port de Brest, les ouvriers se plient pour passer sous les moteurs et entamer leur démontage. Pendant douze semaines, soudeurs, électriciens, mécaniciens, tôliers et chaudronniers se succèdent pour désosser le navire et passer tous les équipements en revue. Un travail de maintenance que DCNS réalise pour la marine nationale depuis toujours. L’entreprise, fondée par Richelieu en 1 624, est aussi le constructeur attitré de la flotte française. Elle a conçu des fleurons comme le porte-avions Charles-de-Gaulle. Chez DCNS travaillent 12 500 salariés, dont 8 000 régis par la convention collective de la métallurgie. Les 5 000 autres sont des ouvriers d’État, avec un statut, des règles d’avancement et d’ancienneté qui leur sont propres. Un héritage de la première vie de DCNS, administration d’État jusqu’en 2003. En moins de dix ans, la vieille dame est devenue une entreprise prospère.

Mais Patrick Boissier, arrivé à la tête du groupe en janvier 2009, ne compte pas en rester là et poursuit la transformation de cette pépite tambour battant. La crise des dépenses publiques l’oblige à évoluer. Déjà, la marine nationale met l’entreprise en concurrence avec STX ou les chantiers bretons Piriou pour maintenir certains navires. Passé par Tréfimétaux, les Chantiers de l’Atlantique et Cegelec, Patrick Boissier attaque de nouveaux marchés : les énergies marines renouvelables, le nucléaire civil, l’export. En 2010, ce capitaine d’industrie met en musique son plan stratégique Championship qui vise à doubler le chiffre d’affaires de l’entreprise et à améliorer sa performance de 30 % d’ici à 2013. Un pari ambitieux.

1-Changer de méthodes de travail.

Depuis un an, tous les sites de DCNS se mettent en ordre de marche pour atteindre les objectifs fixés par Patrick Boissier. Les processus de production sont disséqués et repensés pour optimiser la construction ou la maintenance des navires. À Brest, le principe du « chantier dédié » est expérimenté. « Nous apportons les ressources nécessaires au plus près des bateaux, des pièces de rechange aux vestiaires. L’objectif est de réduire le temps entre le moment où l’ouvrier arrive, prend son bon de travail et monte sur le bateau », explique Pascale Roussel, directrice de la gestion du site et animatrice du programme Championship à Brest.

Dans le bassin réservé au carénage des sous-marins, un ascenseur a été installé pour permettre aux ouvriers de descendre plus rapidement et en toute sécurité. De leur côté, les équipes de production de Cherbourg se sont réorganisées pour produire des sous-marins en série. La marine française a commandé six sous-marins nucléaires d’attaque Barracuda. « Avant on terminait une structure puis on commençait la deuxième deux ans plus tard. L’intérêt de la production en série, c’est de garder en mémoire les bons gestes plutôt que de les réinventer à chaque fois », indique Julien Vinatier, ingénieur au sein de la division coques et structures de Cherbourg.

Sous les nefs qui abritent les ateliers, le travail s’organise en 2 × 8, 3 × 8 ou h 24, selon la charge de travail. Une nouveauté pour les ouvriers. « Les personnels ont joué le jeu des chantiers dédiés, ils se sont mobilisés. Le problème, c’est qu’aucune organisation de travail n’est encore réellement arrêtée. Cela change en permanence », pointe Bruno Simon, secrétaire CFDT du comité central de l’unité économique et sociale (CCUES). La négociation sur l’organisation et le temps de travail s’ouvrira en 2013.

Dans sa logique de chasse aux coûts et d’optimisation des méthodes de travail, DCNS restructure ses 10 sites. Pas un mois sans que la direction n’évoque une nouvelle organisation au comité central d’entreprise. La direction des systèmes d’information est ainsi en train de prendre ses quartiers à Brest : 80 ingénieurs de la région parisienne sont invités à s’installer dans le Finistère. « Beaucoup ne suivront pas, indique Bruno Simon, à la CFDT. Certains détiennent des compétences clés, très spécifiques. Selon notre expert Secafi, ce projet comportait de très gros risques. » Pour compenser, la direction a prévu une centaine de recrutements à Brest. La gestion de la paie, des RH, de l’ingénierie est également repensée. « À Brest, il n’y aura plus d’ingénierie de construction neuve, explique Daniel Albergucci, président du syndicat CFE-CGC. La construction des sous-marins sera centralisée à Cherbourg, celle des bâtiments de surface à Lorient. » « La direction a mis en place des incitations à la mobilité. Mais difficile de faire bouger le personnel, en France ou à l’étranger », note Laurent Hébert, élu CGT à Cherbourg.

2-Maintenir les compétences.

À Brest, Joël Lagadec, délégué syndical central Unsa, fulmine. « Tous les copains fuient. Arrivés à 53 ans, ils remplissent les papiers pour partir en préretraite amiante. Deux mois après, si leur dossier est valable, ils sont dehors », assure ce fils et petit-fils d’ouvriers d’État, entré à 16 ans dans l’entreprise. Chaque année, 600 à 800 personnes quittent l’entreprise, dont une grosse moitié dans le cadre du plan amiante ouvert depuis 2003 aux ouvriers d’État du ministère de la Défense. Annoncé en octobre, un autre plan de départs volontaires permet à 200 personnes des fonctions supports de partir en préretraite d’ici à 2014. « Le message de la direction est clair. Elle pousse vers la sortie les ouvriers d’État sous la pression de Dassault, actionnaire de Thales qui détient 25 % de DCNS », analyse Bruno Simon, à la CFDT.

Pour les syndicats, cette nouvelle vague de départs va encore accélérer l’hémorragie de compétences. « Pourquoi une entreprise qui se porte bien utilise-t-elle un dispositif normalement réservé aux sites en restructuration », s’interroge Daniel Albergucci, de la CFE-CGC. « Cette indemnité de départ volontaire est une disposition statutaire du ministère de la Défense. Il est équitable que les personnels mis à disposition chez DCNS puissent également en bénéficier », rétorque Alain Guillou, le DRH groupe.

L’entreprise a tout de même signé en 2009 un accord de gestion prévisionnelle des emplois et des compétences avec cinq syndicats sur six. « La GPEC nous permet d’être proactifs. Nous réactualisons notre cartographie des métiers tous les ans et orientons nos recrutements en conséquence », indique le DRH. DCNS a en effet doublé ses recrutements en 2010 : 816 collaborateurs sont entrés en CDI l’an dernier contre 408 en 2009. Des ingénieurs principalement. « Nous devons rééquilibrer nos recrutements entre ingénieurs et personnels de production », annonce Alain Guillou. À Cherbourg, Damien Coirier, le DRH du site, met en œuvre cette GPEC au quotidien. « Nous avons nommé vingt-huit référents métiers chargés d’éclairer les évolutions techniques et stratégiques de leurs métiers. Ils participent à tous les processus RH : du plan de formation à l’organisation de la mobilité. » Pour anticiper les départs amiante, le DRH travaille sur les hypothèses de départs et prépare avec les managers des fiches de maintien de compétences.

L’intégration des nouvelles recrues, l’apprentissage du langage DCNSien veulent également faciliter ce transfert des compétences. Trois jours de formation sont proposés « pour leur assurer plus une connaissance approfondie du fonctionnement de DCNS, de ses activités et de ses métiers », assure Damien Coirier. « Ce que les DRH n’arrivent pas à organiser, c’est le tuilage entre la personne qui part et celle qui arrive », complète Bruno Simon, secrétaire du CCUES. La renégociation de l’accord d’ici à juillet risque de s’avérer acrobatique, certains syndicats menaçant de dénoncer l’accord de 2009.

3-Miser sur l’alternance.

Le souci d’anticipation est d’autant plus important qu’il faut des années pour former des soudeurs ou des chaudronniers capables de construire des bâtiments de guerre. « Un formeur qui saura mettre en forme l’acier de coque des sous-marins nucléaires, c’est trois à six ans de pratique. Même chose pour un soudeur qui assemble les parois du cofferdam, pièce essentielle pour la sûreté nucléaire d’un sous-marin », explique Julien Vinatier, ingénieur au sein de la division coques et structures de Cherbourg.

DCNS a donc mis le paquet sur la formation et l’alternance, en se dotant d’un institut des métiers. Des écoles par spécialité lui permettent d’assurer le transfert de compétences. « Nous filmons les ouvriers pour garder la mémoire des gestes et utiliser ces supports pédagogiques dans la formation des nouvelles recrues », explique Joël Bosvy, responsable RH à Cherbourg.

En 2010, 447 jeunes ont signé un contrat en alternance. C’est devenu un canal de prérecru­tement et le meilleur moyen d’assurer le transfert de compétences avec le tutorat. À Brest, Joël Lagadec regrette l’époque du « matelotage ». « Avant la fermeture des Arpètes, l’école des ouvriers d’État, le transfert de compétences était assuré. Les anciens prenaient en charge les plus jeunes. Cela pouvait durer plusieurs années. » « On faisait plus de pratique que les jeunes d’aujourd’hui, ajoute, à Cherbourg, Richard Delœuvre, responsable de l’équipe usinage. Je suis content de pouvoir transmettre ce métier. On manque d’usineurs. »

4-Instiller une culture de la sécurité.

À chaque entrée de chantier, un panneau annonce le nombre de jours sans accident du travail. Patrick Boissier veut tout simplement diviser par dix le taux de fréquence des accidents du travail. « La sécurité est un des moteurs de la transformation de l’entreprise. Elle va de pair avec la performance et la qualité », souligne-t-il. À Toulon, ce taux a déjà été divisé par deux. À Brest, Françoise Abiven, directrice hygiène, sécurité, environnement, est chargée de cette transformation. « À tous les niveaux de l’entreprise, chaque réunion commence par un point sur la santé et la sécurité au travail. L’encadrement réalise des visites de proximité. L’objectif est de faire entrer tout le monde dans une culture de la sécurité. »

Pour les syndicats, ce sont les risques psychosociaux qui devraient être au cœur des préoccupations. « Avec le lean management, la direction met les équipes sous pression », estime Laurent Hébert, élu CGT au comité d’entreprise brestois. « On a des problèmes de non-qualité, ajoute Daniel Albergucci, à la CFE-CGC. Les salariés le vivent mal et sont angoissés. » À Cherbourg, en novembre, une note du directeur du site sur les problèmes de qualité et la mauvaise appréciation de la marine nationale a fait l’effet d’une douche froide auprès des équipes de production. « Lorsque nous étions une administration, on demandait au personnel de faire bien son travail. Aujourd’hui, c’est la rentabilité qui compte avant la qualité », décrypte Bruno Simon, à la CFDT. « On ne conteste pas la stratégie, mais faut-il mener la transformation de l’entreprise au pas de charge ? » demande Daniel Albergucci.

Selon les organisations syndicales, le P-DG prend les risques psychosociaux à la légère. « Pour le moment, nos indicateurs nous envoient des signaux plutôt positifs. Sur 12 500 salariés, une moyenne de 80 personnes connaît des arrêts de travail multiples », note Alain Guillou, le DRH groupe. Un accord sur les RPS est en cours de négociation. Direction et syndicats viennent de désigner le cabinet qui réalisera une enquête sur l’ensemble des sites.

5-Détendre le dialogue social.

Patrick Boissier n’est pas un adepte du dialogue social, d’après les syndicats, alors que son prédécesseur, Jean-Marie Poim­bœuf, ne manquait pas un comité central d’entreprise. « Au début il s’est plié à l’exercice, puis il a fini par laisser le DRH présider les séances », raconte Bruno Simon, secrétaire du CCUES. L’an dernier, lors des NAO, les huit délégués syndicaux centraux ont bloqué l’entrée du siège social parisien pour forcer le P-DG à revenir à la table des négociations. Sur les sites, les salariés ont multiplié les grèves. La direction a fini par lâcher du lest : « Les syndicats ont obtenu 1200 euros au titre de l’intéressement. Habituellement, la prime est de 400 à 600 euros », se félicite Joël Lagadec, DSC Unsa.

La culture syndicale est restée forte dans l’ex-administration. À Toulon, il ne se passe pas une semaine sans que le CHSCT soit convoqué en séance extraordinaire. Les syndicats se ­bagarrent pour faire inscrire DCNS sur la liste des entreprises exposées à l’amiante et permettre au personnel sous convention collective d’être aussi pris en considération. Pour calmer le jeu, Patrick Boissier a fait venir en juillet Alain Guillou, ex-conseiller social de Michèle Alliot-Marie à la Défense. « Il connaît bien la maison. Il a de très bons réseaux au sein du ministère. Les relations sont plutôt bonnes », note Bruno Simon. « Nous avons connu une crise sociale lors des NAO 2011, analyse le DRH. Nous devons recréer la confiance en donnant plus de visibilité aux salariés sur leur parcours professionnel et leurs possibilités de progression. » Un point de crispation entre les personnels mis à disposition, dont l’avancement est garanti, et les autres, pour qui seule la performance compte.

Repères

L’ancienne Direction des constructions navales (DCN) est devenue en moins de dix ans une entreprise publique très rentable. En 2010, le chiffre d’affaires de DCNS atteint 2,5 milliards d’euros et le résultat net se monte à 136,9 millions d’euros, en hausse de plus de 8 % par rapport à 2009.

1624

Richelieu décide de doter la France d’une marine nationale. Pour construire et entretenir les navires, il crée l’arsenal de Brest en 1631.

1961

Le général de Gaulle crée la Délégation ministérielle à l’armement.

2003

La DCN change de statut pour devenir une entreprise publique de droit privé.

2007

Thales devient actionnaire du groupe à hauteur de 25 %. La DCN devient DCNS.

Évolution des effectifs
PATRICK BOISSIER, P-DG DE DCNS
“Le changement doit être maintenant partie intégrante de l’ADN de l’entreprise”

Quelles sont les ambitions de votre plan stratégique Championship ?

DCNS conçoit depuis toujours les moyens navals de la marine française. La construction de bâtiments de surface, de sous-marins et leur entretien représentent aujourd’hui environ 75 % de notre activité. Pour réaliser notre ambition de doubler notre chiffre d’affaires d’ici à 2020, nous voulons garder la marine comme client privilégié. Parallèlement, nous devons nous développer sur d’autres marchés très concurrentiels : le naval à l’export et l’énergie (énergies marines renouvelables et nucléaire civil).

Après la catastrophe de Fukushima, est-il encore opportun de développer le nucléaire civil ?

Je suis convaincu que le monde ne peut pas encore se passer de l’énergie nucléaire. Je constate que Fukushima n’a pas empêché des pays comme l’Inde ou la Chine de dire qu’ils souhaitaient continuer à investir dans le nucléaire et que 40 pays se déclarent intéressés par l’énergie nucléaire. En France, cette catastrophe a conduit à un audit des différentes centrales qui débouchera sur des travaux d’amélioration. Grâce à ses compétences techniques pointues et à sa capacité à gérer des projets très complexes, DCNS peut répondre aux besoins d’entreprises comme EDF.

Les organisations syndicales établissent un lien entre les objectifs ambitieux de Championship et la montée des risques psychosociaux. Qu’en pensez-vous ?

Cette entreprise a démontré une capacité d’évolution phénoménale. Il y a moins de dix ans, DCN était une administration. Aujourd’hui, c’est une entreprise performante, dynamique, en développement. Ce changement, nous le devons aux hommes et aux femmes de DCNS. Mais nous sommes dans un monde qui bouge de plus en plus vite. Si nous ne sommes pas capables de suivre le mouvement, nous allons nous affaiblir. Les nouveaux marchés concurrentiels sur lesquels nous nous implantons nous imposent d’être les meilleurs, de changer en permanence, d’améliorer notre performance. La croissance est la condition nécessaire de la pérennité et du développement de nos sites. Le changement doit être maintenant partie intégrante de l’ADN de l’entreprise. Mais nous n’y arriverons pas sans l’adhésion du personnel.

Près de 300 ouvriers d’État partent chaque année dans le cadre du plan amiante et bientôt d’un plan de départs volontaires. Comment maintenir les compétences ?

Il reste un peu moins de 5 000 ouvriers d’État chez DCNS. Ce sont des personnels qui ont apporté et qui apportent beaucoup à l’entreprise. Leurs compétences ne sont pourtant pas liées à leur statut. DCNS vit un renouvellement de ses personnels plutôt moins rapide que d’autres entreprises. Par ailleurs, nous avons mis beaucoup de moyens en place pour assurer le transfert de compétences. En particulier, nous pratiquons l’alternance en accueillant plus de 500 jeunes par an, la formation interne, le tutorat.

Êtes-vous inquiet de la désindustrialisation de la France ?

Nous avons tous les atouts pour maintenir et développer une base industrielle en France. Mais, contrairement à l’Allemagne, nous n’avons pas la culture industrielle. Les messages envoyés aux jeunes ne les poussent pas à s’orienter vers nos métiers.

Le coût du travail en France est pourtant un facteur de délocalisation ?

Sur les produits simples, la France ne peut sans doute pas lutter contre les pays à bas coûts de main-d’œuvre. Mais sur des produits complexes, de haute technologie, nous avons tous les atouts en main. Je suis convaincu qu’une entreprise telle que la nôtre ne peut être performante sans maîtriser sa base industrielle. Et je suis également convaincu que nous pouvons continuer à maîtriser cette base industrielle en France. Plutôt qu’externaliser pour faire baisser les coûts de production, je préfère engager un cercle vertueux avec un projet de croissance. Championship est aussi un processus de réinternalisation compétitive. Nous avons, par exemple, réalisé à Lorient, sur fonds propres, un patrouilleur hauturier. Les équipes l’ont fait en moins de deux ans là où il en aurait fallu trois auparavant, et ce programme a permis l’embauche de 60 personnes.

Propos recueillis par Anne-Cécile Geoffroy et Jean-Paul Coulange

PATRICK BOISSIER

61 ans.

1987

DG puis vice-P-DG de Tréfimétaux.

1994

DG de la branche chauffage et climatisation du groupe Elfi.

1997

DG puis P-DG des Chantiers de l’Atlantique.

2005

Vice-président du conseil de surveillance de Vallourec.

2007

DG de Cegelec.

2009

P-DG de DCNS.

Cecilia Garroni Parisi

Auteur

  • Anne-Cécile Geoffroy