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Enquête

Comment le 39 39 passe par la Lorraine

Enquête | publié le : 01.10.2011 | Stéphane Béchaux

Les renseignements administratifs par téléphone ont été regroupés début 2010. Un nouveau départ pour le 39 39 avec une équipe réduite, quasi novice. Mais sans casse sociale.

Reconversion expresse pour François Koessler. Technicien en télécoms dans l’armée de l’air, ce militaire a postulé, voilà deux ans, pour un emploi de contrôleur du travail au centre d’appels interministériel (CAI) de Metz. « On est une soixantaine à avoir passé des entretiens à Paris. Je fais partie des 22 qui ont été retenus. On a bénéficié de deux mois de formation théorique intensive puis d’une semaine de pratique dans une unité territoriale », précise l’intéressé. Depuis le début de l’année 2010, il répond aux interrogations des usagers qui, perdus dans les arcanes du droit du travail, composent le 39 39 sur leur téléphone.

À l’image de François Koessler, l’écrasante majorité de la soixantaine de téléconseillers de Metz est novice dans le métier. Et pourtant, la cellule de renseignements administratifs, rattachée aux services du Premier ministre, n’a rien d’une start-up. Lancée en 1957, elle s’appuyait jusqu’à la fin 2009 sur un réseau de neuf centres régionaux, employant quelque 120 fonctionnaires – greffiers, contrôleurs du travail, policiers… Des agents faisant du renseignement de second niveau, après filtrage des appels par des téléconseillers de la société B2S, chargés de répondre aux questions les plus simples.

Six spécialités conservées sur 23. La réorganisation remonte au 12 décembre 2007, lorsque le Conseil de modernisation des politiques publiques acte le regroupement des centres régionaux sur un site unique, à échéance de deux ans. Douche froide pour les fonctionnaires. « Beaucoup avaient fait carrière dans ces centres. Ils ont subi une longue période d’incertitude quant à leur avenir, sans même savoir où serait implanté le site », témoigne le cédétiste Xavier Béal. Des 23 spécialités d’origine, seules six sont conservées : le travail, la consommation, la justice, l’intérieur, le logement et la fiscalité. D’abord prévu à Pantin, le centre interministériel est finalement implanté à Metz, dans d’anciens bâtiments de l’armée de terre. Une décision purement politique, dictée par la nécessité de recréer de l’emploi dans l’agglomération messine désertée par les militaires.

Aide au déménagement, prime de 15 000 euros, accompagnement professionnel du conjoint… La panoplie déployée par les services du Premier ministre pour faciliter les mobilités s’avère haut de gamme. En vain. Aucun téléconseiller n’opte pour son transfert à Metz sinon… le délégué CGTde l’époque ! Un échec, mais sans casse sociale. « On a mis en place une cellule de reclassement ad hoc, pilotée par un préfet. Tous les fonctionnaires ont été suivis individuellement dans leur réorientation professionnelle », détaille Marc Missud, responsable du 39 39 à la sous-direction de la diffusion et de l’administration électronique. Finalement, tous les agents ont retrouvé un poste et empoché quelque 4 000 euros de prime.

Boudée par les anciens, la plate-forme messine a dû, dans l’urgence, embaucher massivement. Pas simple. « Nous n’avons eu aucun candidat pour les 22 avis de vacance de postes de contrôleurs du travail. Il a fallu faire jouer les emplois réservés du ministère de la Défense », illustre Nadège Cressonnier, chef du secteur travail et ex-inspectrice à Metz. Un manque d’attrait aujourd’hui évanoui. Mais, vingt mois après l’ouverture, quelques postes ne sont toujours pas pourvus. « Les ministères n’ouvrent pas facilement les vannes des mises à disposition. Car eux aussi sont en sous-effectif », explique Bruno Valdevit, le directeur du CAI.

En moyenne, le centre reçoit de 700 à 800 appels quotidiens. Un flux gérable par les équipes, dont les conditions de travail s’avèrent bien meilleures que dans les call centers traditionnels. « On peut faire un travail de qualité, dans un cadre plutôt agréable. Ce qui pose problème, ce sont nos statuts. On est mis à disposition par quatre ministères différents, ce qui rend difficile la cohésion. On n’a même pas d’instance locale de dialogue social », déplore la cégétiste Andrée Traeger.

La fraîcheur des troupes contribue à la bonne ambiance de travail. Pour l’instant tout au moins. Car le 39 39 voit sa toile s’étendre. Une vingtaine de préfectures testent actuellement le renvoi d’une partie de leurs appels vers le numéro de renseignements. Et des connexions sont prévues avec les caisses de Sécurité sociale. De quoi alourdir la charge si les équipes ne s’étoffent pas…

Auteur

  • Stéphane Béchaux