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Idées

Haro sur les ronds-de-cuir !

Idées | Livres | publié le : 01.06.2011 | Jean Mercier

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Haro sur les ronds-de-cuir !

Crédit photo Jean Mercier

La thèse de ce pamphlet tient en quelques mots : le lobby des fonctionnaires est devenu tellement puissant en France qu’il se retourne contre l’intérêt collectif et menace les fondements de l’État. Directrice de l’Ifrap, une fondation qui s’est fait une spécialité de traquer les dérives de l’État en matière de dépenses publiques, Agnès Verdier-Molinié développe l’idée que les fonctionnaires, avec la complicité des énarques, ont constitué, depuis les années 70, « le plus grand lobby de France ». L’essayiste décrit une fonction publique qui « cesse d’être un service public pour se mettre au service d’elle-même ». Dans le collimateur, d’abord les grèves. Avec 1,8 million de jours perdus par an, la France détient le record d’Europe en la matière. L’accusation stigmatise aussi le rôle du statut comme frein à tout changement dans le secteur public. Troisième bête noire d’Agnès Verdier-Molinié, les avantages conférés aux syndicats de la fonction publique, ce qui leur permet d’avoir de plus en plus de permanents avec de moins en moins de militants.

Elle rappelle que l’État et les collectivités locales versent 250 euros par fonctionnaire aux syndicats en subventions et mises à disposition de personnel. Son dossier paraît également très étayé sur l’absentéisme dans l’administration, qui serait deux fois plus important que dans le privé. Bien évidemment, la croissance constante des effectifs de fonctionnaires, territoriaux, hospitaliers et centraux, est une cible de choix pour cette Savonarole des ronds-de-cuir. Visiblement, la politique du remplacement d’un seul fonctionnaire sur deux partant à la retraite ne lui paraît pas aller assez vite. Enfin, Verdier-Molinié s’attaque à la question des privilèges, qu’il s’agisse des retraites ou des salaires. Elle bat en brèche l’idée selon laquelle les hauts fonctionnaires seraient moins bien payés que dans le privé, rappelant qu’il existe de multiples moyens d’arrondir le traitement, à commencer par les primes. Dans l’ensemble, soutient l’accusatrice, la rémunération moyenne des titulaires en place deux ans de suite dans l’administration a augmenté de 47 % de 1995 à 2007, contre 23 % pour le privé. Le portrait que l’ouvrage dresse de notre fonction publique souffre d’être uniquement à charge, mais il faut bien reconnaître qu’il frappe parfois juste. Une approche critique tout aussi incisive mais à finalité plus constructive ne lui aurait rien enlevé de sa force et aurait considérablement accru son utilité.

Les Fonctionnaires contre l’État, Agnès Verdier-Molinié. Éditions Albin Michel. 204 pages, 17 euros.

Auteur

  • Jean Mercier