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Éditorial

Le succès de l’alternance dépendra des entreprises

Éditorial | publié le : 01.12.2010 | Jean-Paul Coulange

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Le succès de l’alternance dépendra des entreprises

Crédit photo Jean-Paul Coulange

Le modèle allemand hante décidément nos dirigeants politiques. Visiblement en panne d’idées pour doper l’emploi des jeunes, dont près d’un quart sont actuellement au chômage, le président de la République a promis le doublement du nombre de jeunes en alternance. Qui passerait, contrats d’apprentissage et de professionnalisation confondus, de 600 000 à 1,2 million. Un classique du genre puisqu’il avait fixé, il y a six mois, le cap à 800 000 apprentis à l’horizon 2015. En 2006, durant le quinquennat de Jacques Chirac, l’objectif était de 500 000 apprentis en 2009. Des chiffres à comparer au 1,6 million d’Azubis (ou apprentis) chez nos voisins allemands…

Il ne s’agit pas de remettre en cause les vertus de l’apprentissage. Une étude toute fraîche du ministère du Travail confirme l’excellente insertion professionnelle des jeunes passés par l’alternance. En 2004, 61 % des jeunes sortis de l’apprentissage avaient un emploi, un score qui atteint 86 % trois ans après. Encore faudrait-il disposer de données postérieures à la crise de 2008 pour conclure définitivement à la supériorité de l’alternance sur tout autre mode de promotion sociale. Ce que la Dares reconnaît, en pointant l’embellie conjoncturelle de la période 2004-2007. Mais si l’on veut comparer l’alternance à la française avec le système dual allemand, allons jusqu’au bout de la démonstration.

Combien d’entreprises françaises peuvent citer en exemple un itinéraire comme celui de Jürgen Schrempp, qui a commencé sa carrière en tant qu’apprenti chez le constructeur allemand Daimler pour l’achever, trente ans plus tard, à la présidence de Daimler-Benz ? En tout cas pas EDF, dont le P-DG, Henri Proglio, diplômé de HEC, est pourtant l’un des champions français de l’apprentissage, puisqu’il a décidé de porter à 4 % le pourcentage d’apprentis dans son groupe. Ni Veolia Environnement, l’entreprise dont il a fait une vitrine de l’apprentissage et qui est désormais présidée par Antoine Frérot, un X-Ponts. Pas plus que GDF Suez, autre poids lourd de l’alternance, avec 7 000 jeunes recrutés en 2009 et 2010, dont le P-DG, Gérard Mestrallet, cumule les titres : Polytechnique, École nationale de l’aviation civile et ENA.

Tout cela pour dire que les incantations gouvernementales sont une chose, mais que le succès de l’alternance dépend en grande partie des entreprises. La première condition est qu’elles contribuent à redorer le blason de l’apprentissage, dévalorisé aux yeux des jeunes et guère prisé dans l’Éducation nationale. La deuxième est qu’elles respectent l’obligation – légale – d’employer 3 % de leurs effectifs en alternance, en privilégiant les bas niveaux de qualification, délaissés au profit des étudiants du supérieur. La dernière est qu’elles encadrent solidement, à grand renfort de tutorat, les apprentis, dont un sur quatre abandonne en cours de route. C’est à ce prix que le pari de l’alternance pourra être gagné.

Auteur

  • Jean-Paul Coulange