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Le mercato des Opca

Dossier | publié le : 01.09.2010 | S. D.

Avec un seuil de collecte de fonds fixé à 100 millions d’euros pour être agréés, nombre d’Opca sont menacés et cherchent des partenaires. Mais les unions sont difficiles à conclure.

Les grandes manœuvres ont commencé. La réforme de la formation professionnelle conditionne l’agrément des Opca notamment à un seuil de collecte fixé par décret à 100 millions d’euros. Quelque 26 organismes collecteurs agréés dont l’agrément arrive à échéance au plus tard le 1er janvier 2012 sont voués à disparaître. Un cataclysme qui s’inscrit dans la droite ligne de l’évaluation de l’Igas qui préconisait, en 2008, de « relever à 100 millions le seuil plancher de l’assiette de la collecte afin de faciliter le développement de services aux TPE ». Les Opca condamnés ont un an pour se mettre en conformité. L’idéal étant un mariage entre compagnons d’infortune qui s’inscrit dans une logique de filières, de métiers, de secteurs d’activité. Si possible entre Opca de même taille pour limiter les inévitables guerres d’ego. Un rapprochement avec un gros collecteur (de plus de 100 millions) aiguise la crainte d’être absorbé. L’intégration à l’un des deux Opca interprofessionnels serait un pis-aller.

Si des rapprochements paraissent naturels sur le papier, la réalité est plus complexe, les Opca constituant un enjeu de pouvoir politique et financier pour les partenaires sociaux. Chaque branche professionnelle cherche à préserver son influence ; les poids respectifs dans un nouvel ensemble se négocient âprement. Les partenaires sociaux doivent s’entendre sur les règles de paritarisme, les syndicats refusant par exemple de voir les délégations de gestion patronale (telles celles de l’Opcaim ou du Forthac) se développer. La perspective d’Opca sectoriels se heurte à la difficulté d’asseoir autour de la même table donneurs d’ordres et sous-traitants ou concurrents acharnés. La naissance d’un gigantesque Opca industriel regroupant par exemple l’Opcaim, le Forthac, C2P, Plastifaf, Formapap, l’Opciba, For­cemat a fait long feu. Les plus petits craignant de se noyer dans l’Opcaim, qui, de surcroît, délègue sa gestion à des associations non paritaires (Adefim).

La Confédération de l’artisanat et des petites entreprises du bâtiment (Capeb), qui assure actuellement la vice-présidence du Fafsab (pour les artisans du BTP qui emploient moins de 10 salariés), s’est prononcée en faveur d’un Opca de la construction, à l’issue d’un vote serré au sein de son conseil d’administration le 6 juillet dernier. L’autre option, soutenue par l’Union professionnelle artisanale (UPA), présidée par Jean Lardin, ancien président de la Capeb, consistait à créer un Opca artisanal avec l’Opcad (alimentation de détail) et l’Opcams (artisanat des métiers et des services). Regroupant le Fafsab, l’Opca Bâtiment et son homologue des travaux publics, l’Opca TP, le nouveau mastodonte pèsera plus de 346 millions. Après plusieurs mois de discussions, la Capeb a réussi à faire jeu égal avec les puissantes fédérations patronales du bâtiment et des travaux publics (FFB, FNTP), notamment en s’assurant la majorité des sièges employeurs au sein de la nouvelle section professionnelle pour les entreprises de moins de 10 salariés.

Risque de phagocytage. Si tout va dans le ­bâtiment, le cœur de Plastifaf balance encore entre un rapprochement avec le Forthac (textile), C2P (chimie, pétrole et pharmacie) ou l’Opcaim. L’Opca a commandé trois études d’opportunité aux groupes Cohérence et KPMG pour évaluer « les potentialités de valeur ajoutée qu’apporterait le nouvel ensemble formé, tant pour les branches elles-mêmes que pour les entreprises et les salariés ». L’option Opcaim, qui aurait pu être une première étape vers un Opca industriel, a été écartée en raison d’un risque de phagocytage. Le Forthac, proche par la taille, les certificats de qualification professionnelle, etc., avait les faveurs du patronat, inquiet à l’idée de perdre son identité en rejoignant C2P, la chimie étant perçue comme le donneur d’ordres. C’était sans compter avec les organisations syndicales, favorables à un mariage à trois avec C2P et le Forthac. Pas chaud, ce dernier a frappé à la porte de l’Opcalia et de l’Opcaim. Reste Plastifaf et C2P. Un vrai cirque !

Le FAF Propreté n’est guère plus avancé. Désireux de faire cause commune avec un secteur ayant les mêmes problématiques concernant les premiers niveaux de qualification, l’illettrisme, le recrutement, il s’est rapproché du Fafih, du FAF Transport-Logistique et du FAF Travail temporaire. Seul le premier s’est montré intéressé. En désespoir de cause, les administrateurs du FAF Propreté ont demandé en avril une dérogation au secrétaire d’État à l’Emploi, Laurent Wauquiez. En revanche, les négociations entre Formapap (industrie papetière), l’Opciba (métiers du bois et de l’ameublement) et Forcemat (matériaux pour la construction) devraient aboutir rapidement à un nouvel Opca 3+, avec des services mutualisés et trois sections détenant chacune un tiers des voix. Reste à s’entendre sur les règles de paritarisme, les prérogatives des sections… « Avec l’Opciba et Forcemat, nous nous inscrivons dans une logique de filière industrielle, nous avons des métiers et des problématiques d’emploi communes, des politiques de branche similaires, se félicite Christophe Brisset, délégué général de Formapap. Rejoindre un Opca interprofessionnel, c’est comme posséder un petit studio dans un immeuble. En se rapprochant à deux, trois, vous possédez un étage dans une maison. »

L’accord portant sur la création d’un Opca unique de la construction est historique. Il rassemble toutes les forces et donne plus de poids à la branche professionnelle. Reste à le mettre en œuvre.

Armel Le Compagnon, président de la commission nationale de la formation à la FFB

Concilier notre sens du service, notre cohésion interbranches, nos méthodologies avec d’autres cultures organisationnelles : face aux pistes de rapprochement possibles, autant d’Opca de conscience.

Xavier Royer, secrétaire général du Forthac

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  • S. D.