logo Info-Social RH
Se connecter
Newsletter

Idées

Quand les urgences tuent la réforme

Idées | Bloc-Notes | publié le : 01.06.2010 | Bernard Brunhes

VOUS AVEZ DIT RIGUEUR ?

À un journaliste qui lui demandait s’il fallait parler de « rigueur », le Premier ministre, se relâchant quelque peu, a répondu : « Comment vous appelez cela, je m’en contrefous. » François Fillon a raison : plutôt que de sémantique, parlons d’outils. Comment agir à court terme sur les déficits publics ?

Réduire rapidement les dépenses publiques, c’est soit s’attaquer aux traitements des fonctionnaires, soit assécher les subventions. La première solution passe mal ; la seconde peut mettre en danger des organismes nécessaires à l’équilibre social en cette période de doute et d’inquiétude. L’opposition et les syndicats seraient peut-être prêts à entrer dans un débat constructif sur les mesures à prendre, même, et surtout, s’il faut s’attendre à des sacrifices.

L’autre tour de vis touche évidemment la fiscalité : les responsables politiques glosent sur le bouclier fiscal, ses trous à venir ou sa porosité éventuelle. Il serait bon qu’on cesse de tourner autour du pot et que l’on prenne des mesures au moins provisoires qui touchent les hauts revenus – sans toucher aux revenus modestes, au risque de freiner la reprise économique.

LA FRANCE BONNE ÉLÈVE ?

Après la débâcle grecque et les angoisses espagnole, portugaise ou balte, la France, affichant un lourd déficit public et bien connue pour ses mauvaises habitudes en la matière, doit marquer sa volonté de tenir ses finances. Derrière les mots et les artifices de communication, il faut des gestes forts. On comprend, dès lors, le choix du gouvernement en ce qui concerne la réforme des retraites : reculer l’âge légal de départ au-delà de 60 ans. C’est la mesure la plus spectaculaire et surtout la plus efficace pour réduire le déficit à court terme. Mais c’est aussi la plus injuste, puisqu’elle frappe directement ceux qui ont commencé à travailler tôt et est indifférente à ceux qui ont commencé tard et n’ont donc pas suffisamment cotisé à 60 ans pour bénéficier du taux plein. La vraie réforme des retraites est beaucoup plus compliquée à concevoir et à mettre en place ; mais il y a le feu, et on fait mal et vite. En France, les réformes ne se font qu’en temps de crise, dit-on. Oui mais, du coup, ce sont des réformes mal conçues.

UNE OPPOSITION EN PANNE ?

C’est le président de la République qui mène la danse : trop occupée à réagir à ses propos, l’opposition ne nous parle plus guère des questions sociales que la majorité actuelle néglige et que l’on sait pourtant au premier rang des préoccupations des Français : le logement social, encore en panne ; l’Éducation nationale, qui ne sait plus donner leur chance aux enfants des familles les moins favorisées ; l’animation économique et sociale des banlieues ou encore la précarité des emplois, qui rend l’avenir incertain, voire angoissant pour des millions de personnes. Les colloques ne manquent pas, les idées fusent, les rapports se multiplient, mais le débat politique les ignore.

Auteur

  • Bernard Brunhes