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Métropoles

Une politique de l’emploi volontariste

Métropoles | publié le : 01.05.2010 | Hubert Heulot

La métropole axe son action sur l’insertion des jeunes sans formation et des personnes éloignées de l’emploi.

Au début de 2010, Nantes comptait 59 000 demandeurs d’emploi, 9 000 de plus qu’un an avant. Le taux de chômage dépasse 8 %, un gros point de moins que la moyenne nationale. Les raisons Beaucoup d’emplois peu qualifiés, facilement pourvus ; des entreprises rétives à licencier par peur de se retrouver nues au moment de la reprise et une politique locale de l’emploi volontariste qui a pris de l’ampleur depuis la création de la Communauté urbaine, en 2001.

CLAUSE D’INSERTION

L’une de ses réussites a été l’application têtue de la clause d’insertion dans les marchés publics. Nantes Métropole impose aux entreprises de confier entre 5 et 7 % des heures de travail à des salariés en insertion ; 25 autres acteurs publics (communes) et parapublics (sociétés HLM, d’économie mixte) ont été invités à en faire autant. Jean-Marc Ayrault vient d’en établir le bilan : sept grands chantiers depuis quatre ans dont un Zénith, un nouveau quartier, une ligne de transport ; 1 million d’heures créées ; près de 1 100 salariés concernés (jeunes, chômeurs de longue durée, handicapés), dont la moitié ont fini leur chantier avec une embauche de six mois au moins ou une nouvelle qualification.

Devant le risque, bien connu, de n’améliorer qu’à court terme sa situation avant un retour à la case départ, l’ex-chômeur est suivi de près. « D’abord dans les entreprises, pour vérifier ce qu’elles lui apportent, ensuite pendant douze mois s’il n’a pas obtenu de travail auprès des acteurs publics de l’insertion. Tous, comme les entreprises, s’engagent au départ via un cahier des charges », explique Didier Oble, directeur du service d’assistance à la maîtrise d’ouvrage, créé à Nantes Métropole. En amont, il aide aussi les entreprises à satisfaire aux conditions de la clause d’insertion : évaluer le nombre d’heures à y consacrer, trouver les personnes correspondantes. Si elles ont d’abord décrié ce système, les entreprises passent aujourd’hui à 80 % par des organismes spécialisés dans l’insertion.

DEUXIÈME CHANCE

De manière plus ciblée sur les jeunes, Nantes lance à l’automne une école de la deuxième chance pour ceux qui se trouvent en échec, sans diplôme ni métier. Ces futurs stagiaires, de 16 à 30 ans, seront 110 par an, recrutés par la maison de l’emploi, la mission locale et les plans locaux d’insertion par l’économie. Ils le seront aussi par les associations, de manière à « accrocher » des jeunes des quartiers défavorisés. Tous les acteurs de la formation et de l’emploi sont impliqués : État, notamment l’Éducation nationale, collectivités locales, chambres de commerce et de métiers. Ensemble, ils mettent 1,4 million d’euros sur la table. L’école s’appuiera sur 300 à 400 entreprises. Elle prendra le temps nécessaire pour donner à chacun un métier. « Il faut faire quelque chose, parce qu’une quantité d’aides et de dispositifs existent mais ne sont jamais adaptés aux gens des quartiers », souligne Yamna Chriraa, présidente d’une association nantaise de créateurs d’entreprise issus de ces quartiers. Pour elle, la nouvelle école gagnera son pari si elle réussit cette médiation.

Il y a urgence. En 2009, les services sociaux municipaux ont aidé 1 770 foyers supplémentaires. En février, Nantes a lancé un microcrédit de 300 à 3 000 euros à 3,5 % pour « lutter contre les nouvelles formes de précarité et d’exclusion financière ». Il est destiné à ceux dont les revenus sont trop faibles ou trop incertains pour avoir accès aux banques quand il faut acheter une voiture ou une machine à laver.

JEAN-MARC AYRAULT, député-maire PS de Nantes
“Nantes est une ville de conquêtes”

Comment Nantes traverse-t-elle la crise ?

La période est difficile. Le secteur industriel est très touché. Le chômage a progressé de 22,7 % en 2009 dans l’agglomération, le nombre de travailleurs pauvres a augmenté de 10 %. Nous utilisons tous les outils disponibles, notamment au travers de notre maison de l’emploi et de ses six antennes dans les quartiers.

Quels sont les atouts nantais ?

Il existe ici un réel esprit de partenariat et de pragmatisme. Quand la situation l’exige, tous les responsables politiques et économiques se mettent à travailler ensemble. Une telle mobilisation a eu lieu pour aider des entreprises en difficulté comme Goss ou Tereos. Ces jours-ci, tous les élus des Pays de la Loire ont interpellé François Fillon pour que l’État rachète les actions STX qu’Alstom est en train de céder.

D’où vient cet état d’esprit de coopération ?

Il est lié à un contexte historique et aux individus. Je suis arrivé à la mairie en 1989, deux ans après la fermeture des Chantiers navals. À cette époque, j’ai ressenti le besoin de construire quelque chose de neuf, de créer une dynamique de renouveau en mettant en mouvement la société civile. À cette époque, la CCI, présidée alors par Alain Mustière, aujourd’hui président du conseil économique et social, a bien compris l’enjeu et a joué un rôle important dans la mobilisation des chefs d’entreprise. À la Région, Olivier Guichard, à l’origine du concept de métropole d’équilibre, a pris le relais sur les grands dossiers structurants permettant à la métropole Nantes-Saint-Nazaire de renouer avec l’ambition, notamment sur le dossier enseignement supérieur. Le travail que nous menons avec Rennes pour monter un pôle universitaire relève de la même logique : unir nos forces pour gagner en efficacité.

Comment donner un second souffle à Nantes ?

Nantes est une ville de conquêtes et nous avons de nombreux projets. Nous voulons faire du futur hôpital un hôpital du xxie siècle mêlant la clinique, la formation et la recherche. Le quartier de la Création, sur l’île de Nantes, est en train de se constituer dans un esprit campus avec 50 entreprises innovantes, les écoles d’architecture, de design, de communication. L’aéroport de Notre-Dame-des-Landes doit pour sa part désenclaver la ville d’ici à trois ans. Plus globalement, il s’agit de remettre en débat et en perspective le projet à vingt ans. Un de nos défis est d’être mieux identifiés à l’international. Nous travaillons sur la marque Nantes-Saint-Nazaire ainsi que sur les outils. Mais je crois qu’il faut aussi travailler sur l’imaginaire pour mettre les gens en mouvement. Propos recueillis par Laure Dumont et Jean-Paul Coulange

Auteur

  • Hubert Heulot