De l’hôtel où elle fait un stage, elle ne dit rien, ou presque. « Il est beau. » Pas plus de remarques sur le job, le ménage des chambres. Même si cela ne la passionne pas. Sabrina, 16 ans et demi, mère célibataire en foyer, est ailleurs. « Je voudrais faire quelque chose de ma vie », confie-t-elle à son éducateur. Quoi ? Comment ? « Laisse progresser la confiance en toi », répond-il. On sait que ce sera long.
La documentariste Marie Dumora nous le fait sentir, en filmant les déplacements incessants de Sabrina, d’un établissement à l’autre, du foyer à la famille. Ses tiraillements, ses moments de doute et de déprime. Sans commentaire aucun. Car cette adepte de Frederick Wiseman, passionnée par la misère et les personnes qui s’y débattent, préfère nous immerger dans le contexte familial d’une HLM près de Mulhouse, le temps du baptême du fils de Sabrina. C’est rude et frontal, mais sans pathos. C’est toute la force de ce document exceptionnel, pour son parti pris de longueur (110 minutes) et son approche sensible, que l’on finit par regarder comme un film.
Je voudrais aimer personne (110 minutes), de Marie Dumora. Sortie le 5 mai.