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Idées

L’enfer vide du chômage

Idées | Culture | publié le : 01.05.2010 | A.-C.G.

Ciseaux, papier, caillou sonne juste. Même si le parti pris de la lenteur rime parfois avec longueurs.

Kevin (Carlo Brandt), ancien tailleur de pierre, est au chômage depuis dix-huit mois. À son ami, il assure sans vraiment y croire : « Je tiens le coup. » À sa femme trop fatiguée, il parle peu, préfère les silences, les phrases inachevées. « Qu’est-ce qui ne va pas Kevin ? Je veux que l’on parle », supplie-t-elle. À sa fille de 15 ans, il dit, sans reproche : « Avant tu m’aimais plus qu’aujourd’hui. » Kevin vit la lente descente aux enfers de l’inactivité. Il perd pied, parle seul ou à sa chienne, se débat pour rester debout malgré tout. « Regarde mes putains de mains ! » hurle-t-il à sa femme, impuissante.

Des phrases courtes, des mots crus, des silences lourds de sens, Ciseaux, papier, caillou est un douloureux poème sur le vide qui s’installe quand on a tout donné à son travail, quand le contrat social qui nous liait au monde a été rompu. La pièce de Daniel Keene, appuyée par la mise en scène dépouillée de Marie-Christine Soma et Daniel Jeanneteau, sonne juste sans être misérabiliste. Elle souffre malgré tout de certaines longueurs qui tiennent aussi à l’interprétation des acteurs, donnant parfois le sentiment d’assister à une pièce au ralenti. Peut-être pour nous faire sentir tout le poids du rien.

Ciseaux, papier, caillou, pièce de Daniel Keene (2 heures). Jusqu’au 5 juin au Théâtre national de la Colline, Paris XXe.

Auteur

  • A.-C.G.