logo Info-Social RH
Se connecter
Newsletter

Idées

La « Déliaison sociale »

Idées | Livres | publié le : 01.05.2010 |

Image

La « Déliaison sociale »

Crédit photo

S’il faut un signe que la France est un terreau fertile pour la psychologisation des relations sociales, la place prise par la question du suicide au travail remplit parfaitement ce rôle. Le sociologue essaie d’expliquer pourquoi le concept de souffrance au travail a pris une telle importance dans notre pays. Depuis trois à quatre décennies, note l’auteur, « le mal-être est progressivement devenu un trait de nos modes de vie, et un consensus solide s’est construit sur la causalité entre pathologie mentale et société ». Si crise sociétale il y a en Amérique, il s’agit plutôt d’une crise de la confiance en soi. Pour les Français, le foyer du malaise social actuel ne se trouve pas dans une crise de l’assertion personnelle mais, à l’opposé, dans cette obligation nouvelle que nous impose le néolibéralisme et ses prolongements managériaux de nous affirmer, d’avoir de l’initiative, d’être à la fois compétitifs et coopératifs, particulièrement dans le monde du travail. L’ouvrage explore ensuite ce caractère spécifique du « mal français ». La « désolidarisation » qui se manifeste sous la forme d’un recul de l’État providence et la montée de la précarité représentent les deux vecteurs privilégiés de la « souffrance sociale » en France. « À la différence de ce qui se passe aux États-Unis, chez nous, c’est un monde qui se trouve assiégé, une manière de vivre qui est ébranlée jusque dans ses tréfonds », observe Alain Ehrenberg. Le mal individuel, sous la forme de la souffrance psychique, est étroitement intriqué au mal sociétal, c’est-à-dire la « déliaison sociale »: une originalité qui explique peut-être la propension de nos concitoyens à se vivre malheureux et à se défier de tout et de tous.

La Société du malaise, Alain Ehrenberg. Éditions Odile Jacob. 440 pages, 23,90 euros.