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Tableau de bord

Faut-il un nouveau dispositif pour les “fins de droits” ?

Tableau de bord | publié le : 01.04.2010 |

Mathilde Lemoine Directrice des études économiques de HSBC France, membre du CAE

Il ne faut pas regretter l’augmentation du nombre de chômeurs en fin de droits qui est due à la diminution de la période d’affiliation minimale de six à quatre mois pour prétendre à l’assurance chômage. En effet, si les résultats économétriques montrent qu’une hausse des indemnités de chômage crée un accroissement du chômage structurel, la flexibilisation du marché du travail nécessite un accompagnement entre deux périodes d’emploi qui sont de plus en plus courtes pour éviter la dégradation du capital humain. En revanche, une partie de la progression de cette catégorie résulte de l’inadéquation entre l’offre et la demande de travail, très visible en période de crise. Souvent les salariés sont licenciés après de longues années au même poste au sein de la même entreprise, ce qui a dégradé leur employabilité. Or l’employeur doit « veille[r] au maintien de leur capacité à occuper un emploi ». Dès lors, État et partenaires sociaux doivent accepter de les accompagner par des aides au retour à l’emploi et en prolongeant leurs indemnités pour leur permettre de changer de métier et/ou de secteur. Dans les cas extrêmes, certains pourraient être déclarés « invalides », comme aux Pays-Bas, dont le modèle social est tant vanté.

Gilles Saint-Paul Membre de l’École d’économie de Toulouse, chercheur Idei

Etendre la durée de l’indemnisation du chômage présente des dangers. Plus est elle longue, plus elle accroît la durée moyenne du chômage ainsi que le niveau total et la persistance du taux de chômage. De plus, même en période faste, il y a toujours un nombre relativement élevé de chômeurs non indemnisés, qui sont couverts par le RMI. Quant au RSA, il est conçu comme une incitation à la reprise d’activité pour les titulaires du RMI. Que les chômeurs n’y aient pas droit, c’est le prix à payer pour les effets incitatifs du RSA. Si le problème est qu’on trouve le RMI insuffisant, cela est également le cas pendant les phases d’expansion. Mais une hausse du RMI réduira les incitations au travail, bien que le RSA crée désormais un biais pour les travailleurs non qualifiés en faveur du temps partiel plutôt qu’en faveur du non-emploi et au détriment du temps partiel comme c’était le cas auparavant. On voit mal en quoi la crise justifierait en soi une extension de la durée de l’indemnisation. Cependant, il est exact qu’une telle politique aura moins d’effets négatifs sur l’emploi lorsque les embauches sont rares. Mais elle risquerait de retarder la sortie de crise et de se pérenniser en avantage acquis.

Carole Tuchszirer Socio-économiste au Centre d’études de l’emploi

Pour les uns, ils sont 360 000 ; pour les autres, 145 000. Cette querelle de chiffres sur les personnes à secourir a de quoi surprendre ! Car c’est du sort de salariés privés de droits à indemnisation dont il est question : jeunes, salariés en situation précaire, chômeurs de longue durée. Et l’on mesure à travers cette énumération l’incapacité du système indemnitaire français à s’adapter à la réalité du marché du travail. L’État comme les partenaires sociaux sont coresponsables de cette situation et doivent y répondre ensemble. À court terme, d’abord, pour éviter aux personnes concernées de basculer demain dans la pauvreté. Mais il serait illusoire de croire que seules des mesures d’urgence suffiront à colmater les failles du système. À long terme, il faut reconsidérer les liens entre le régime d’assurance chômage et le régime de solidarité sans reporter sur d’autres structures le coût de ces réajustements indemnitaires. Il faut peut-être revenir à la période durant laquelle le régime assurantiel et celui géré par l’État dans le cadre de la solidarité ne faisaient qu’un. Ce retour à un régime unique éviterait en tout cas la dilution des responsabilités et placerait partenaires sociaux et État face à leurs obligations.

Pour en savoir plus

« Rapport 2009-2010 » de l’Observatoire national de la pauvreté et de l’exclusion sociale. www.onpes.gouv.fr.

« Indemnisation et accompagnement des chômeurs : une articulation à revoir », Carole Tuchszirer. www.cee-recherche.fr.

Demandeurs d’emploi inscrits en février 2010 « Dares Analyses-Dares Indicateurs » (publié le 24 mars 2010). www.travail-solidarite.gouv.fr.

« De la prime pour l’emploi au revenu de solidarité active », chapitre de l’ouvrage France, portrait social 2009. www.insee.fr.