Grand spécialiste du sujet, Jacques Freyssinet tente de dresser le bilan de cinquante ans de négociations interprofessionnelles consacrées aux problèmes d’emploi et de formation. Il montre comment s’enchaînent les préoccupations, l’une s’ajoutant à l’autre, ce qui se traduit par un haut degré de complexité de l’architecture générale. L’emploi n’est entré « officiellement » dans le champ de la négociation interprofessionnelle qu’en 1958. La dégradation du contexte économique à la fin des Trente Glorieuses va ensuite jouer un rôle essentiel dans le changement d’attitude des trois acteurs, État, patronat et syndicats. Dès lors, une interaction complexe se met en place entre les initiatives du législateur et les accords entre partenaires sociaux, la hiérarchie des normes laissant le dernier mot à l’État. Bientôt, l’approche se sophistique avec des négociations portant sur des thèmes spécialisés complémentaires des thématiques générales comme l’égalité professionnelle hommes-femmes ou les mutations technologiques. Avant les premiers essais de « négociations multidimensionnelles » telle la « refondation sociale » initiée par le Medef. Une part importante de cette remarquable synthèse est consacrée à la négociation de 2008 sur la modernisation du marché du travail, innovante à plusieurs égards. Jacques Freyssinet pose toutefois la question : « accord historique ou modeste compromis ? », reconnaissant que « la lecture de l’accord laisse sur deux impressions contradictoires ». Difficulté plus générale que l’on rencontre, souligne l’auteur, quand il s’agit de juger de l’efficacité de cette spécificité française.

Négocier l’emploi : 50 ans de négociations interprofessionnelles sur l’emploi et la formation, Jacques Freyssinet. Éditions Liaisons. 312 pages, 32 euros.