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Tableau de bord

La suppression de la TP peut-elle favoriser l’emploi ?

Tableau de bord | publié le : 01.10.2009 |

Michel Taly Avocat associé chez Arsene Taxand. Ancien directeur de la législation fiscale à Bercy

La réponse est probablement positive… et c’est un paradoxe ! En effet, la taxe professionnelle n’est pas supprimée, elle est remplacée, avec un allégement global. Pour ce qui est de l’allégement, les choses sont claires : une baisse du prélèvement sur les entreprises ne peut que favoriser l’emploi. Pour le remplacement, il faut comparer l’ancienne assiette et la nouvelle. Et c’est là qu’apparaît le paradoxe : en effet, on remplace une assiette qui portait sur le capital productif (les machines) par une taxe portant sur la valeur ajoutée, c’est-à-dire, pour à peu près les deux tiers, sur les salaires ! Affirmer que c’est bon pour l’emploi revient à aller à l’encontre de l’idée reçue selon laquelle il faut remplacer les taxes sur les salaires par d’autres assiettes (c’est d’ailleurs ce que l’on avait fait il y a dix ans en supprimant la part salariale de la taxe professionnelle). Comment expliquer ce paradoxe ? Les économistes avancent que le marché du capital étant plus mondial que celui du travail, taxer le capital détruit plus d’emplois que de taxer le travail. Si l’on accepte ce paradoxe, la réforme envisagée, qui consiste à faire exactement le contraire de ce que l’on a fait il y a dix ans, est une bonne nouvelle pour l’emploi.

Jean-Luc Biacabe Directeur du pôle de politique économique et financière de la CCIP

La réforme de la fiscalité locale supportée par les entreprises est une bonne nouvelle. La suppression de la taxe professionnelle, impôt unanimement critiqué, voire considéré comme « imbécile », devrait améliorer la compétitivité internationale des entreprises et l’attractivité des territoires, et donc favoriser l’emploi. Reste que le résultat final paraît bien éloigné du monde idéal rêvé par les économistes. Si le pilier « foncier » fait l’unanimité, au moins pour assurer l’ancrage territorial des entreprises, la révision des bases locatives (largement obsolètes) reste encore à conduire. De même, le rééquilibrage des contributions entre secteurs ouverts à la concurrence internationale (industrie) et les autres (services) risque d’être atténué par le souci politique de limiter le nombre de « perdants », en particulier dans le commerce, qui représente 13 % des emplois en France. Enfin, la suppression de l’usine à gaz « TP » pourrait être suivie de l’érection d’une nouvelle cathédrale de complexité : la taxe carbone. Et qui paiera les quelque 5 milliards que devraient coûter, in fine, cette réforme ? À court terme, sûrement l’État. À long terme, les collectivités locales.

Gilles Le Blanc Professeur d’économie, Cerna. Mines ParisTech

Pour évaluer les effets sur l’emploi de la suppression de la taxe professionnelle, il faut considérer en priorité le champ de l’industrie. Son mode de calcul, fondé en partie sur les actifs et les investissements, introduisait en effet un biais négatif par rapport aux concurrents étrangers mais aussi aux autres activités économiques du pays. Mais cet allégement fiscal ne se traduira pas automatiquement par des emplois nouveaux pour deux raisons. D’abord, les industriels doivent, pour rester compétitifs, rattraper un retard accumulé d’investissement et de R & D et utiliseront prioritairement à cette fin leur marge de manœuvre financière. Ensuite, l’industrie ne recommencera à créer des emplois qu’avec une croissance significative de l’activité, soit par la conquête de nouveaux débouchés, soit par l’essor de nouvelles activités. Même si la santé, l’environnement ou l’énergie étendent les opportunités, cela prendra un certain temps. En réalité, l’impact positif de cette mesure sera surtout d’améliorer la rentabilité, donc l’attractivité de l’investissement industriel, et de rééquilibrer les conditions économiques des sites de production français au sein des grands groupes globalisés.

Pour en savoir plus

Rapport de l’Assemblée nationale n° 1859, juillet 2009. www.amf.asso.fr.

Rapport d’information du Sénat n° 579, juillet 2009.www.senat.fr.

Projet de loi de finances 2010. www.minefi.gouv.fr.

Insee, « Structure de la fiscalité locale 2007 ». www.insee.fr.

Cour des comptes, rapport sur les finances publiques de l’État, juin 2009. www.ccomptes.fr.