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Le virtuel bouscule les pratiques

Dossier | publié le : 01.05.2009 | S. C.

Annonces et CV en ligne, chats et réseaux sociaux : le recrutement emprunte de plus en plus les canaux virtuels. Des supports qui demandent de nouvelles compétences aux recruteurs.

La plume Sergent Major et la lettre de motivation parsemée de pleins et de déliés ont définitivement été rangées au rayon des antiquités du recrutement. Maintenant, c’est sur le Web que ça se passe. Les experts de Pôle emploi sont en train de boucler une nouvelle étude sur les pratiques de recrutement. La précédente, réalisée en avril 2005 par l’observatoire de l’ANPE, avait révélé que plus de la moitié (54 %) des entreprises d’au moins 200 salariés avaient utilisé Internet pour accroître ou renouveler leurs effectifs. « D’un point de vue structurel, il n’y a pas de raison que les conclusions de l’étude à venir soient très différentes », estime Jean-Louis Zanda, statisticien au sein de l’observatoire de l’ex-ANPE. Bienvenue, donc, sur le Web 2.0, où les digital natives tissent leur toile ! Ces postulants changent bien entendu la donne du recrutement, et les bonnes vieilles méthodes s’en trouvent bouleversées : « Cette mutation du marché du recrutement appelle de nouvelles compétences, reflet de la démocratisation de la pratique du Net et de l’explosion des réseaux sociaux. Si les entreprises se renseignent sur leurs futurs collaborateurs, la réciproque est vraie. Les candidats cherchent de plus en plus d’informations sur les groupes avant de postuler », explique Stéphane Labrouche, P-DG de Wanajob.

Face à des aspirants accros à Internet et superinformés, qui n’ont que faire des fausses promesses du genre « rejoignez une équipe qui gagne », les services de recrutement des entreprises réagissent. Leur priorité : soigner leur e-réputation, par le biais de veilles, de chats avec les internautes, et chercher les jeunes talents – middle managers et ingénieurs – là où ils se trouvent. C’est-à-dire sur les réseaux sociaux professionnels. « Aujourd’hui, nous entrons dans l’ère de la conviction, explique Olivier Fecherolle, directeur général de Viadeo France. Les entreprises ont pour souci majeur de donner envie aux jeunes talents de les rejoindre. » Plutôt inattendu en cette période de crise. Ce phénomène s’explique en partie par la démystification du recruteur, au-delà de l’entreprise qu’il représente, devenu un simple profil parmi tant d’autres, dans une communauté virtuelle.

3,8 millions de CV en ligne. C’est pourquoi de plus en plus de sociétés font appel à des prestataires pour qui les arcanes du Web social n’ont guère de secrets. Ces facilitateurs ne se sont jamais aussi bien portés. Entre juin et octobre 2008, Viadeo France a enregistré une progression de 30 % des inscriptions sur son réseau. Une des conséquences de cette augmentation significative est la multiplication des envois de CV. En 2008, le job board généraliste Monster en a mis en ligne 3,8 millions, gérés par quelque 200 collaborateurs. Contrairement à ce qui se passe en Allemagne, où la procédure écrite, plus solennelle, reste très répandue, en France, un coup de clic suffit pour postuler. Et la quantité supplante la qualité : expériences passées enjolivées, diplômes aux dénominations pompeuses, hermétiques, voire trompeuses. « Aujourd’hui, pour réaliser un faux diplôme, il suffit d’avoir un scanner et une imprimante qui ne vaut pas plus de 100 euros », regrette Emmanuel Chomarat, président de Verifdiploma. La chasse aux faux CV devient un préalable, de plus en plus indispensable, à toute perspective d’embauche. Mais nombre d’entreprises, y compris des groupes du service public, se lancent dans des partenariats inédits avec des professionnels du coaching et du management afin de former leurs recruteurs à la pratique des réseaux sociaux.

Recruteurs sur LinkedIn. Certaines sociétés vont encore plus loin en créant des postes bien spécifiques, comme la SSII Steria. En janvier 2009, Pauline Tirman est devenue chargée des réseaux sociaux. Elle anime une équipe de 10 recruteurs qui ont désormais leur profil sur LinkedIn. Grâce à cet outil, ils chatent et communiquent avec les nouvelles recrues potentielles. Avec ces échanges directs ils apprennent à mieux les connaître. « Chez Steria, la cooptation représente entre 20 et 25 % de nos recrutements. Dans cette logique, les réseaux sociaux sont devenus incontournables. Ils nous permettent de repérer plus facilement les jeunes diplômés et les personnes qui disposent d’un haut niveau de qualification qui, pour la grande majorité, ont créé un profil sur le Web », affirme Emmanuelle Pays, responsable du recrutement et de la mobilité.

Pour ne pas être en reste, les job boards traditionnels jouent aussi la carte des communautés virtuelles. Ainsi, l’Apec a signé, en mars 2008, un contrat avec le réseau LinkedIn. Objectif : permettre aux jeunes cadres demandeurs d’emploi d’enrichir leur capital social sur Internet. Le « Pôle emploi » des cadres organise en parallèle des chats de recrutement (une trentaine l’année dernière) qui réunissent jusqu’à 600 personnes à la fois. Un véritable vivier pour les entreprises ! Reste que si les supports de travail ont radicalement changé, les recruteurs se posent toujours la même question existentielle : ce candidat est-il bien fait pour le job ?

Un grand flou autour des sites d’emploi

Bien malin qui pourra dire quel est le meilleur, le plus efficace et le plus pertinent des sites d’emploi. En tout cas, aucune étude récente et sérieuse n’est en mesure d’apporter une réponse précise. La dernière étude de l’observatoire de ce qui était à l’époque l’ANPE, « Les employeurs qui recrutent par Internet », parue en 2005, dépeint un état des lieux de l’année… 2003. Cette enquête, fondée sur un panel de 15 000 sociétés, révélait que le site de… l’ANPE arrivait en tête, mentionné par 56,9 % des entreprises dépositaires d’offres d’emploi en ligne et par 35,1 % de celles qui ont consulté des candidatures sur le Web Depuis, plus rien : aucun chiffre, aucune statistique. Et il faudra attendre encore un peu avant que Pôle emploi ne fasse connaître les prochains résultats. Bien sûr, il existe des classements, à l’image du top Focus RH réalisé par Xiti, un spécialiste de l’audience sur le Net. Un palmarès obtenu grâce au nombre de connexions sur les sites d’emploi, arrêté en 2008, qui ne donnait pas une vision réelle du marché.

Car il ne prenait pas en compte des sites ayant pignon sur rue, comme l’Apec ou Monster, qui revendiquent respectivement 5 millions et 3,8 millions de CV en 2008. Et, du côté des spécialistes, pas d’autres éléments de réponse. Impossible de savoir si les jeunes recrutés ces derniers temps sont passés au préalable par tel job board ou tel réseau social professionnel.

Auteur

  • S. C.