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Tableau de bord

Va-t-on vers une nouvelle division internationale du travail en 2020 ?

Tableau de bord | publié le : 01.03.2009 |

Fabrice Hatem Professeur associé à l’École de management de Normandie

De trop nombreux économistes, sur la base de statistiques inadaptées et de définitions réductrices, continuent à gravement sous-estimer l’ampleur des phénomènes de délocalisation. Or la crise actuelle pourrait se traduire par une forte accélération de ces tendances. Les grandes multinationales sont en effet engagées aujourd’hui dans des opérations de restructuration violentes dont les maîtres mots sont : suppressions massives d’emplois et fermetures de sites dans les pays développés ; poursuite des investissements et des augmentations de capacités dans les pays émergents, recours systématique à des stratégies d’outsourcing. Un contraste qui s’explique par l’attrait à la fois de marchés en croissance rapide et de coûts de production compétitifs. Ces tendances, loin d’être limitées aux industries dites de main-d’œuvre, touchent également les services, les industries de moyenne, voire de haute technologie et la R & D. Conséquence sociale dans dix ans : une ingérable société duale, où les gagnants (toujours nombreux) de la mondialisation seront confrontés à la rancœur d’une masse croissante d’exclus. Un défi majeur, dont on perçoit d’ailleurs les inquiétantes prémisses et face auquel il faut enfin cesser de se voiler la face.

Marc Lhermitte Associé chez Ernst & Young

L’économie française est plus généraliste que ses concurrentes britannique, espagnole ou allemande. Sa culture du non-choix lui sauve la mise en cette période difficile. Néanmoins, pour affronter l’avenir, le pays va devoir faire des choix de compétitivité, se spécialiser, investir davantage sur moins de secteurs et miser sur leur capacité exportatrice. En toile de fond, on prévoit une réduction des écarts entre pays forts de quelques industries de pointe et ceux qui en offrent une palette élargie, entre pays à bas coûts et économies occidentales en haut de la pyramide des salaires et de la productivité. On peut aussi tabler sur un renforcement de la délocalisation d’activités à fort volume, mais aussi de la relocalisation de fonctions plus stratégiques. À l’horizon 2020, la France aura une capacité à valoriser sur son sol, outre ses forces industrielles reconnues dans les équipements de transport, l’énergie ou le luxe, quelques pôles tertiaires puissants, tels que l’environnement, le tourisme ou le multimédia. Les fonctions tertiaires directement attachées aux industries plus délocalisables, telles l’automobile, l’aéronautique ou la pharmacie, pourraient en revanche suivre les sites de production attirés par les marchés de croissance des pays émergents.

Gilles Le Blanc Professeur d’économie à Mines ParisTech

Réfléchir à l’avenir de l’industrie en France peut sembler vain à l’heure où les délocalisations se multiplient et où la crise frappe de plein fouet les secteurs industriels. En même temps, l’étalage des délirants excès financiers souligne le rôle crucial de l’industrie comme source de gains de productivité, d’innovation et d’accroissement du niveau de vie. Pour échapper à ce paradoxe et à l’énumération désespérante des entreprises en difficulté, il est indispensable de revenir aux fondamentaux économiques de l’industrie. Celle-ci est un équilibre dynamique entre trois logiques : la standardisation (qui permet d’exploiter les économies d’échelle et d’augmenter la productivité), la recherche de différenciation (pour exploiter la variété de la demande et éviter la concurrence en prix) et l’innovation (qui crée de nouvelles utilités pouvant être valorisées monétairement). Notre territoire dispose d’atouts pour chaque dimension. La difficulté des stratégies d’entreprises comme des politiques publiques visant à les soutenir réside dans leur articulation pertinente et efficace. Les modèles réussis inventés par plusieurs entreprises petites ou grandes démontrent heureusement que c’est toujours possible en France.

Pour en savoir plus

Baromètre de l’attractivité européenne 2008. Ernst & Young. http://www.ey.com

Revue Sociétal n° 57 et 58. Fabrice Hatem. www.societal.fr

Conférence des Nations unies sur le commerce et le développement. www.unctad.org

Organisation internationale du travail. www.ilo.org

Agence française pour les investissements internationaux. www.invest-in-france.org