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Le bloc-notes

35 heures : on devient raisonnable

Le bloc-notes | publié le : 01.04.1999 | Bernard Brunhes

35 heures : les mœurs s'adoucissent

Dix-huit mois plus tard, les gros mots d'octobre 1997 sont oubliés. Le président du Medef et le vice-président, Denis Kessler, ont pris acte de la volonté du gouvernement et du Parlement. La ministre de l'Emploi et le patronat ont enfin engagé le débat. Que demande le patronat ?

D'abord un délai supplémentaire d'un an. La seconde loi, nécessaire à la mise en œuvre réelle de la première, ne devrait pas être votée avant l'automne : trop tard pour que les entreprises soient prêtes au 1er janvier.

À l'évidence, les contraintes politiques interdisent au gouvernement d'accepter ce délai. Mais la voie est ouverte pour la recherche de dispositions provisoires susceptibles de donner aux entreprises le temps de s'adapter : par exemple un contingent élevé d'heures supplémentaires et une réduction du coût de celles-ci entre 35 heures et 39 heures. Il s'agirait de mesures transitoires, par exemple pour deux ans.

La deuxième demande du patronat prend le gouvernement à son propre jeu. Celui-ci a insisté depuis dix-huit mois sur sa volonté de tenir compte des résultats des négociations de branche. Le patronat dit « chiche ! » et demande que l'accord UIMM soit entériné, donc étendu par l'État, et qu'il inspire la seconde loi. Sans être devin, on peut prévoir aujourd'hui que les dirigeants de l'UIMM et la ministre de l'Emploi trouveront un moyen terme. L'UIMM a lancé le bouchon un peu loin, mais il y a moyen de s'entendre.

La troisième remarque du patronat est plus floue. Elle concerne le destin des salariés proches du smic. Quelle mesure pourraient prendre les pouvoirs publics pour que la hausse nécessaire du salaire horaire, dans les plus basses rémunérations, ne vienne pas tuer la compétitivité des entreprises ? Autrement dit, que va faire le gouvernement en matière de réduction des charges sociales ? Sur ce point, les dossiers sont encore ouverts. On a parlé d'une aide structurelle de 5 000 francs aux entreprises passées aux 35 heures, c'est-à-dire qui ne font pas d'heures supplémentaires : c'est peu praticable. On a parlé de réduction de charges pour les seuls bas salaires. Ne pourrait-on pas, comme lors de la hausse de 15 % du smic en 1981, instituer une réduction, en « biseau » et transitoire, des charges sur les bas salaires. Les services du ministère du Travail sont plus ouverts sur cette seconde loi que certains discours politiques ont pu le faire croire. Aux partenaires sociaux de jouer ; le Medef a commencé.

Fusion des entreprises et fonte des effectifs

Lorsque deux, a fortiori trois entreprises fusionnent et qu'elles sont sur les mêmes marchés, c'est qu'elles espèrent un effet d'échelle apportant une meilleure productivité. N'en déplaise aux grands barons qui se lancent dans de grandes fusions, ils ne peuvent masquer que c'est par la réduction des effectifs qu'ils obtiendront la meilleure rentabilité promise, et donc de nouveaux développements dans un environnement très concurrentiel. Si la BNP et la Société générale rapprochent leurs réseaux et leurs structures centrales, elles réduiront leurs coûts : la fusion des entreprises entraînera la fonte des effectifs.

La vraie question est donc la manière dont cette réduction se fera. Quand et à quel rythme ? Comment et avec quelles compensations ? Où iront ceux et celles qui se retrouveront en sureffectif ? Les dirigeants des grands groupes ne peuvent, ne doivent plus se contenter de répondre aux exigences des analystes financiers, des actionnaires d'outre-Atlantique ou de la place.

Ils peuvent et ils doivent mettre noir sur blanc leurs intentions quant à l'avenir de leurs employés et les leur présenter. On ne peut douter qu'ils y pensent : demandons leur d'être explicites !

Europe sociale. 1999 sera l'année de l'Europe :

une élection au Parlement européen, une crise sans précédent de la Commission, la naissance de l'euro et les premiers pas de la Banque centrale européenne. Quel agenda !

1999 sera aussi l'année de l'entrée de la CGT à la Confédération européenne des syndicats (CES). Événement attendu et somme toute anecdotique ? Peut-être pas. Au moment où la monnaie unique contraindra à un rapprochement des politiques salariales et des finances sociales, la CES va prendre un poids sans précédent : un contrepoids utile aux politiques monétaires strictes que Wim Duisenberg et ses collègues ne pourront manquer de défendre. Sans la CGT, la représentation française à la CES, dominée par des cédétistes imaginatifs et actifs, était incomplète. Saluons cette entrée comme un signe positif au moment où le dialogue social européen peut et doit changer d'ampleur.

Auteur

  • Bernard Brunhes