E & C : Les DRH et recruteurs peuvent-ils aujourd'hui faire abstraction des réseaux sociaux ?

A. G. : Les réseaux sociaux se développent à toute allure : ils vont avoir un retentissement important dans le domaine professionnel et ils font bouger les frontières entre vie personnelle et vie professionnelle. Les recruteurs membres de notre association ont commencé à s'intéresser à ce sujet à la fin du premier semestre 2009. Les avis étaient partagés sur les pratiques à retenir. Certains cabinets de recrutement prônaient l'interdiction de l'usage de Facebook. D'autres jugeaient l'usage de Viadeo et LinkedIn pertinent, notamment pour le sourcing de candidats. Enfin, une troisième catégorie de recruteurs estimait intéressant d'utiliser Facebook, tout en définissant des garde-fous.

E & C : Justement, quels sont les risques que peut engendrer l'utilisation de ces sites ?

A. G. : Depuis plusieurs années, un gros travail a été entrepris pour toiletter les processus de recrutement de toute dimension discriminante. Or, aujourd'hui, on peut connaître très facilement les opinions politiques, l'orientation sexuelle ou encore la religion d'un candidat, et même les critiques éventuelles vis-à-vis d'un employeur précédent... Ces informations ne sont plus dans nos fichiers - en respect de la loi informatique et libertés -, mais elles sont accessibles aisément sur les réseaux sociaux. Un employeur peut avoir la tentation de les utiliser.

E & C : Quels peuvent être les garde-fous pour éviter ces dérapages ?

A. G. : Notre association a lancé, en novembre dernier, la charte «Réseaux sociaux, Internet, vie privée et recrutement», signée par les cabinets membres. Nous avons été rejoints, en début d'année, par le Medef, l'ANDRH, l'Apec, le CJD, Ethique et recrutement, l'IMS, Prisme, Syntec Recrutement et Viadeo(2).

Par ce document, les signataires s'engagent à garantir leur éthique professionnelle quant à l'utilisation d'Internet et des réseaux sociaux dans le recrutement. Celui-ci doit rester basé uniquement sur les qualifications et les compétences et exclure tout critère d'ordre personnel et privé. Les moteurs de recherche et réseaux sociaux ne doivent pas être utilisés comme des outils d'enquête pour collecter des informations d'ordre personnel. C'est d'ailleurs une des recommandations que nous adressons aux recruteurs dans un kit de communication(3) que nous diffusons à partir du 15 avril par l'intermédiaire de nos partenaires. Ce diaporama leur conseille aussi de ne pas spammer les candidats si ces derniers n'ont pas fait une démarche volontaire pour recevoir des offres de recruteurs. D'autres vidéos, destinées aux candidats, les incitent à activer les paramètres de sécurité lorsqu'ils se trouvent sur des réseaux sociaux de type Facebook. Et nous les sensibilisons au fait qu'ils ont tout intérêt à être vigilants quant aux contenus produits sur les blogs, les chats et les réseaux sociaux, car l'oubli numérique existe rarement.