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Les pratiques

Pologne Les droits syndicaux et les libertés des salariés mis à mal

Les pratiques | publié le : 09.03.2010 |

Alors que la Pologne s'apprête à réformer son Code du travail, les violations du droit syndical, voire des droits des salariés, se multiplient. Au risque de gripper le paritarisme.

Un climat social délétère règne en Pologne actuellement. Exemple parmi d'autres : dans une entreprise électronique de Wroclaw (1 300 salariés), lors d'une grève lancée par les syndicats, la direction propose une augmentation de 5 % aux salariés qui n'ont pas cessé le travail. Puis elle licencie 200 grévistes, dont trois syndicalistes. Et fait filmer les participants à une manifestation de protestation dans l'entreprise.

« En Pologne, aujourd'hui, les cas d'atteintes aux droits syndicaux par les employeurs sont nombreux, explique Marta Pioro, porte-parole du syndicat Solidarnosc-NSZZ. Le plus souvent, les conflits se terminent devant les tribunaux. Hélas, les procédures judiciaires sont très lentes... Et, à l'avenir, si l'on n'y met pas un terme par des jugements plus sévères et des amendes plus fortes, ces attaques risquent de s'amplifier. » Un point de vue partagé par l'inspection du travail.

Des employeurs veulent «durcir» le Code du travail

Les atteintes sont de diverses natures : non-respect de la loi sur la consultation des syndicats lorsque les intérêts des salariés sont en jeu ; obligation faite aux syndicats de fournir la liste de leurs adhérents ; interdiction de distribuer des tracts, y compris à l'extérieur de l'entreprise... Aujourd'hui, certains employeurs proposent même de «durcir» les dispositions du Code du travail. Des responsables de PME demandent, par exemple, que la durée légale du travail ne soit plus limitée à 40 heures par semaine, ce qui entraînerait la suppression des heures supplémentaires. Les grèves «avec occupation» seraient considérées comme illégales et sanctionnées par des pénalités financières... Enfin, pour pouvoir participer à une quelconque négociation, les syndicats devraient prouver qu'ils enregistrent plus de 33 % d'adhérents !

« Les pratiques sont différentes selon le statut et la taille des entreprises, constate Beata Golmento, Pdg d'une PME. Certaines grandes sociétés prennent quelques libertés : on remplace la pointeuse par un cahier de présence, par exemple, et l'on oublie de compter les heures supplémentaires. Dans certaines PME, il n'existe même plus de contrats de travail. Heureusement, ces dérives ne sont pas le fait de tous les employeurs, car elles risquent de gripper le dialogue social, voire le paritarisme. En période de crise, nous n'avons pas besoin de cela. »

Surveillance des salariés

Contrôle des e-mails de travail et du disque dur des ordinateurs, surveillances électroniques des salariés dans l'entreprise et lors de leurs déplacements, détecteurs de mensonges au bureau, enregistrement au scanner de l'iris des salariés et prise d'empreintes digitales... Ces pratiques sont déjà mises en oeuvre dans certaines sociétés. Mais l'inspection du travail a décidé d'intervenir avec fermeté : « S'il y a surveillance illégale des salariés, nous sanctionnerons, affirme Jolanta Zydlewska, de l'inspection du travail de Gdansk. Car l'employeur est tenu de justifier l'objectif et le principe de tout contrôle. »

Projet de loi

Pour sa part, l'inspecteur général de la protection des données personnelles a adressé un projet de loi pour réglementer les contrôles et interdire, par exemple, le détecteur de mensonges. Le juriste Krzysztof Walczak va dans le même sens : « Les lois doivent être très claires. Ainsi, employeurs et employés sauront exactement quelles méthodes de surveillance sont autorisées. » La Commission tripartite (gouvernement-employeurs-syndicats) des affaires sociales et économiques, une institution fondamentale pour le dialogue social en Pologne, s'est déjà saisie de ce dossier complexe, dont l'objectif est la révision des articles du Code du travail. Les discussions, commencées fin 2009, se poursuivent actuellement.