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Un rapport ministériel suggère des pistes opérationnelles

L'actualité | publié le : 23.02.2010 |

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Un rapport ministériel suggère des pistes opérationnelles

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Un rapport sur la prévention du stress remis à François Fillon souligne la responsabilité des dirigeants et préconise d'inscrire «la performance sociale» parmi les critères de leur rémunération.

La prévention du stress ne quitte pas l'agenda gouvernemental. Outre la publication éphémère (lire ci-contre), le 18 février, par le ministère du Travail, des listes d'entreprises classées en fonction de leur état d'avancement dans ce domaine, le Premier ministre rendait public, la veille, le rapport réalisé à sa demande sur les pratiques nécessaires à l'amélioration de la santé psychologique au travail.

Ce document sera versé aux débats du Conseil d'orientation des conditions de travail (Coct), dans lequel les partenaires sociaux doivent contribuer à l'élaboration du plan Santé au travail. « Il ne s'agit pas d'un rapport d'experts mais de «praticiens» », signalent, en avant-propos, ses auteurs, Henri Lachmann, président du conseil de surveillance de Schneider Electric, Christian Larose, vice-président (CGT) du Conseil économique, social et environnemental, et Muriel Pénicaud, DRH de Danone.

De fait, ils se sont efforcés de traduire en pratiques opérationnelles dix propositions (lire ci-dessous). Parmi elles, quelques-unes risquent de faire grincer des dents du côté patronal.

Des indicateurs

La première préconisation consiste à renforcer l'implication de la direction générale et de son conseil d'administration, en complétant les critères habituels d'attribution de la rémunération variable aux managers dirigeants par des objectifs qui prennent en compte la performance sociale de l'entreprise. Une pratique encore rare, mise en oeuvre notamment par... Danone. Les auteurs suggèrent des indicateurs de santé, de sécurité et de conditions de travail, « par exemple le turn-over, les accidents du travail, la satisfaction des salariés, la promotion interne ».

Sensibilisation des managers dès leur formation

Insistant sur ce point, le Premier ministre a souhaité que cette proposition soit aussi examinée dans le cadre de discussions entre partenaires sociaux sur le partage de la valeur ajoutée, dossier ouvert le 15 février par Nicolas Sarkozy. Une sensibilisation des managers qui doit être mise en oeuvre très en amont, dès la formation : sous trois ans, les diplômes de titre I ou II délivrés par les écoles de commerce et d'ingénieurs devraient tous inclure obligatoirement un module de formation à la RSE et au management d'équipe, prévoit le rapport. Muriel Pénicaud a d'ailleurs stigmatisé les grandes écoles « où l'on forme des élites managériales sans leur parler des hommes ». « Le problème de santé n'est pas un problème de médecine du travail, c'est un problème de management », a souligné Henri Lachmann. Les auteurs souhaitent donc que soit réaffirmé le rôle des managers de proximité, notamment en conseillant aux entreprises « d'atténuer le caractère excessivement matriciel de certaines organisations », pour permettre au salarié d'identifier plus clairement son supérieur hiérarchique, et de conférer des marges d'adaptation et de décision aux managers de proximité.

Redéfinition du rôle des CHSCT

D'autres propositions apparaîtront tout aussi sensibles, comme la redéfinition du rôle et des moyens des CHSCT, déjà renforcés par la jurisprudence. Le rapport conseille de compléter la formation de leurs membres, de réévaluer les seuils minimaux d'heures de délégation, mais aussi de « donner une nouvelle légitimité aux CHSCT » par l'élection directe de leurs membres (aujourd'hui désignés en collège des titulaires CE et délégués du personnel).

Christian Larose, qui a jugé « consternant » l'accueil réservé aux rédacteurs du rapport ministériel par les organisations patronales, se dit prêt à en assurer avec eux « le service après-vente ».

Les dix propositions

L'implication de la direction générale et du conseil d'administration est indispensable.

La santé des salariés est d'abord l'affaire des managers, elle ne s'externalise pas.

Donner aux salariés les moyens de se réaliser dans leur travail.

Impliquer les partenaires sociaux dans la construction des conditions de santé.

La mesure induit les comportements (mesurer les conditions de santé).

Préparer et former les managers au rôle de manager.

Ne pas réduire le collectif de travail à une addition d'individus.

Anticiper l'impact humain des changements (mesurer l'impact humain et la faisabilité avant toute réorganisation).

La santé au travail ne se limite pas aux frontières de l'entreprise (impact sur ses fournisseurs).

Ne pas laisser le salarié seul face à ses problèmes.

Listes «stress» : la reculade du ministère du Travail

Le ministère du Travail n'a pas mis longtemps ses menaces à exécution concernant la mobilisation des entreprises sur la prévention du stress. Un jour après la parution, le 18 février, sur le site < travailler-mieux.gouv.fr >, des listes d'entreprises de plus de 1 000 salariés classées selon leur engagement dans ce domaine, les mauvais élèves ont déjà disparu : les listes orange et rouge n'étaient plus consultables.

Sur 1 500 entreprises répertoriées, 900 avaient répondu au questionnaire du ministère. Parmi elles, 33 % sont réputées avoir signé un accord ou engagé un plan d'action concerté avec les IRP et sont sur liste verte ; 55 % déclarent avoir déjà tenu plusieurs réunions de négociation ou avoir engagé des discussions sur un diagnostic ou un plan d'action, et se trouvent sur la liste orange ; 12 % n'ont rien entamé et sont sur la liste rouge, de la même façon que les 600 entreprises qui n'ont pas répondu au questionnaire ou n'ont apporté aucun document permettant de constater un engagement de négociation.

La liste verte demeure sur le site, transformant cette initiative inédite de name and shame en simple annuaire d'employeurs de référence. « Parmi les 600 entreprises qui n'avaient pas répondu au courrier, énormément se sont connectées immédiatement pour demander un login, remplir le questionnaire sur le site, et faire part de leurs intentions d'engager ou de poursuivre des démarches en matière de lutte contre le stress, indique-t-on au ministère du Travail. En ce sens, le name and shame a fonctionné. » Sans compter la fureur du Medef et de nombreuses entreprises «blacklistées». Le ministère annonce qu'il refera une photographie de la situation « dans quelque temps ».

Parmi les 600 entreprises listées en rouge figuraient, par exemple, 3M France, Aérospatiale Matra missiles, BP, DCNS, FagorBrandt, Motorola, Nestlé Waters, Siemens SAS, Veolia Transport, Xerox... Mais, la liste exhaustive des 1 500 entreprises qui ont reçu le courrier de la DGT figurant toujours sur le site, au côté de la liste verte, les mauvais esprits peuvent toujours s'essayer à la soustraction.

G. L. N.