L'expression «usine à gaz» a une connotation péjorative. Elle peut désigner une entreprise si complexe qu'elle en devient ingérable, voire inutile. L'image de «l'usine à gaz», avec ses gigantesques gazomètres et ses métiers pénibles, a cependant vécu. Gaz de France est aujourd'hui une entreprise moderne dans ses infrastructures, devenues le plus souvent invisibles au passant, et surtout dans ses métiers de plus en plus orientés vers la prospection et la recherche.

La logique commerciale a peu à peu pris le pas sur la logique industrielle. L'image du gaz naturel, relayée par la publicité, a remplacé la représentation industrielle du gaz produit dans les cokeries, nettoyant, pour ainsi dire, l'image du produit, de plus en plus réduit à la dimension de service. Dans le même temps, l'entreprise française s'est internationalisée, diversifiée et même, plus récemment, ouverte à la concurrence.

Alain Beltran et Jean-Pierre Williot retracent deux siècles d'histoire au cours desquels l'entreprise a fait la preuve, à de multiples reprises, de son aptitude à changer en réinventant en permanence son métier et ses métiers. En 2008, GDF et Suez fusionnent, donnant ainsi naissance à l'un des tout premiers groupes mondiaux d'énergie et de services et amorçant la réconciliation de deux images perçues souvent comme antagonistes, celle d'une entreprise à vocation de service public et celle de l'innovation.

Alain Beltran est directeur de recherche au CNRS, historien de l'énergie et des matières premières.

Jean-Pierre Williot est professeur d'histoire contemporaine à l'université François-Rabelais de Tours.