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Enquête

Un suivi post-exposition amiante menacé

Enquête | publié le : 02.02.2010 |

Les salariés du BTP des Alpes-Maritimes bénéficient d'un suivi post-exposition amiante, mais la poursuite du programme pose le problème de son financement.

Dans plusieurs régions de France, les salariés du BTP bénéficient de centres de santé paritaires, spécialisés dans leur métier. Ainsi, l'APST (Association paritaire de santé au travail) BTP 06 se concentre-t-elle sur les 30 000 salariés de cette branche dans les Alpes-Maritimes.

Compte tenu de la présence courante de l'amiante sur les chantiers, ses médecins ont mis en place, en 2008, un suivi post -exposition amiante pour les salariés âgés de plus de 50 ans. « Ce que nous dépistons actuellement, ce sont les expositions antérieures, explique la docteure Antoinette Pittilloni. Dans ce cas, il y a contre-indication formelle à tout risque de nouvelle exposition. Aussi pouvons-nous déclarer les salariés concernés en inaptitude sur tout ou partie des postes de travail. »

69 % des salariés exposés

En dix-huit mois, une évaluation a été faite pour plus de 2000 salariés de 58 ans et plus. Il s'avère que 69 % d'entre eux ont été exposés à l'amiante. Parmi eux, 500 ont bénéficié d'un bilan complet avec scanner. Sur les 300 premiers scanners réalisés avant septembre 2009, 200 ont permis de repérer précocement diverses anomalies : micronodules, fibroses, plaques pleurales, images tumorales bronchiques. Les médecins du travail ont estimé qu'un quart d'entre elles sont des pathologies liées à l'amiante. Mais ils ont constaté des discordances d'appréciation, par les médecins traitants, sur l'imputabilité des anomalies et une méconnaissance des procédures de déclaration des maladies professionnelles. A ce jour, neuf maladies professionnelles ont été déclarées.

En 1999, la conférence de consensus sur l'amiante avait recommandé le suivi post-professionnel pour tous les salariés de 50 ans et plus susceptibles d'avoir été exposés.

Dispositif coûteux

Mais les multiples tâches des médecins du travail, en voie de pénurie, et le coût des examens entravent son application. L'équipe de l'ASPT met en cause « l'absence de prise en compte par les législateurs des implications d'un tel dispositif, nécessairement coûteux, tant en termes financiers qu'organisationnels ». Les salariés concernés se montrent favorables au programme. Ils acceptent volontiers ce suivi qui peut leur ouvrir la voie à la reconnaissance de leurs droits : déclaration de maladie professionnelle, indemnisation par le Fiva (Fonds d'indemnisation des victimes de l'amiante) ou cessation anticipée d'activité.

Service paritaire

« Nous avons la chance d'être dans un service réellement paritaire, avec des responsables sensibilisés aux questions de santé au travail et avec des cotisations mutualisées », se félicite Antoinette Pittilloni. Il n'empêche que le seul coût des scanners et radios pulmonaires nécessaires - 250 000 euros par an - impliquerait une augmentation des cotisations de 10 % pour les entreprises adhérentes à l'ASPT. Aussi, Antoinette Pittilloni estime-t-elle que « l'Etat, responsable du retard dans l'interdiction de l'amiante, devrait participer au financement de ce suivi. »

Amiante : les préretraités de Moselle Est remportent des points dans la bataille de l'indemnisation

Une bataille juridique d'envergure se prépare dans l'Est mosellan, où les salariés exposés à l'amiante sur la plate-forme pétrochimique de Carling comptent bien obtenir réparation de la perte de revenus d'environ 35 % induite par l'allocation de cessation anticipée d'activité des travailleurs de l'amiante (Acaata).

Le 24 novembre 2009, deux jugements émis par la section encadrement des prud'hommes de Forbach ont condamné Arkema à verser à deux anciens salariés des dommages et intérêts correspondant à la différence entre les allocations versées et les salaires qu'ils auraient perçus en restant en fonction.

Sachant pertinemment que 280 autres «pré-retraités amiante» de l'Est mosellan s'apprêtent à s'engouffrer dans la brèche, le chimiste a interjeté appel. Cette décision n'entame en rien la détermination de Marcel Nicolaus, l'un des deux plaignants, par ailleurs président de l'association de défense des victimes de l'amiante en Moselle Est et membre du bureau et du conseil de l'Union fédérale des retraités de la chimie et de l'énergie CFDT : « Les prud'hommes de Forbach ont admis que notre départ anticipé en retraite, lié à une espérance de vie réduite, occasionne une perte de revenus dont l'employeur est responsable. En appel, nous contesterons la prescription quinquennale prévue par le Code du travail pour demander la prescription trentenaire applicable en matière de dommages et intérêts. »

Courant 2009, deux autres décisions, rendues à Sens et à Bergerac et accordant également gain de cause à des bénéficiaires de l'Acaata, ont été confirmées en appel. A Sens, où 36 anciens salariés de l'entreprise ZF de Saint-Denis-les-Sens, ont obtenu confirmation du jugement par la chambre sociale de la cour d'appel de Paris, l'employeur s'est pourvu en cassation. Le jugement, attendu au printemps prochain, fera jurisprudence.

P. B.

Michelin reconnu coupable de «faute inexcusable» à Golbey

Le 25 janvier dernier, le tribunal des affaires sociales d'Epinal a jugé Michelin coupable de faute inexcusable dans un dossier opposant l'industriel à dix anciens salariés de l'usine de Golbey (Vosges), spécialisée dans la fabrication de renforts métalliques entrant dans la composition des pneus.

Le produit fini ne comporte pas d'amiante, mais le process de fabrication - notamment le système de freinage des machines - a engendré une contamination.

Le tribunal estime que l'industriel aurait dû avoir connaissance des risques dans ce site, qui a employé jusqu'à 1 200 salariés, contre 600 aujourd'hui. Le syndicat Sud s'apprête à déposer 13 nouvelles plaintes et recense, à Golbey 55 cas reconnus de maladies professionnelles liées à l'amiante, dont 19 se sont déclarés en 2008 et 16 au cours des six derniers mois.

Selon Michelin, qui envisage un appel, les expositions sont antérieures aux années 1990, période durant laquelle la gravité du risque amiante était, selon elle, méconnue. Sud assure, au contraire, que les premières machines n'ont été désamiantées qu'en 2001, les derniers dépoussiérages n'étant intervenus que mi-2009.

P. B.