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Enquête

Et le juge décida de ne pas juger

Enquête | publié le : 15.12.2009 |

Chez le fabricant d'ampoules Osram, la médiation, ordonnée par le juge, a permis de débloquer le conflit et a abouti au retrait du PSE au mois de novembre.

« L'idée de la médiation a surpris les deux parties. » Président d'Osram France, André Le Bihan reconnaît que cette voie n'avait pas été explorée pendant les quatre premiers mois d'âpres discussions au sein de cette entreprise d'ampoules électriques, avec, en jeu, le sauvetage de la moitié des emplois (les 400 en fabrication) voués à disparaître par l'effet d'une directive européenne interdisant, à moyen terme, l'usage des produits traditionnels fabriqués sur le site.

Le tribunal impose une médiation

Si les deux parties se sont accordées pour recourir aux services de Bernard Brunhes, le principe de la médiation leur a été imposé le 3 juillet dernier. Par le tribunal de grande instance de Saverne..., qui n'était pas saisi pour cela. FO, le syndicat majoritaire, lui demandait de se prononcer sur la validité du PSE alors en début d'information-consultation. Osram France avait enclenché la procédure devant aboutir au licenciement de 108 salariés au motif qu'ils refusaient une baisse de salaire de 12,5 % - plus exactement une « baisse du taux horaire », selon les termes de la proposition d'avenant au contrat de travail - qui était la condition posée à la survie du site. En contrepartie de cet effort, le groupe allemand acceptait d'affecter à sa filiale française des activités compensant l'extinction de la production actuelle.

Le tribunal a donc choisi de ne pas répondre à la question posée. « Il est des moments où dire le droit apporte de mauvaises solutions », a déclaré son président, à l'audience, avant d'ordonner le recours à un médiateur. La décision était assortie du gel du PSE. Les deux termes étaient inséparables, selon Bernard Brunhes. « Jouer les médiateurs pendant que des licenciements seraient survenus n'aurait eu aucun sens », souligne-t-il.

L'appel à un tiers apparaissait comme le seul moyen de sortir de l'enlisement, de la crispation, du soupçon perpétuel d'arrière-pensées auxquels avait abouti le dialogue entre la direction et les syndicats, dans une entreprise où le climat social est d'ordinaire tempéré.

Méthodologie pertinente

Entamée début septembre pour une durée de trois mois renouvelables, la mission du consultant a débouché sur un accord en moins de deux mois. Une seule réunion plénière, le 1er octobre, a suffi à sortir un projet quasi définitif. Le fruit d'une méthodologie pertinente, selon la direction. « Bernard Brunhes a eu l'heureuse idée de rencontrer les parties de façon séparée pendant un mois (à raison de trois réunions d'une demi-journée avec chacune des deux, NDLR). Sans doute était-ce le meilleur moyen de lever les situations et termes pouvant prêter à confusion. Chacun a pu exprimer ses positions plus facilement que dans une situation de face-à-face », estime André Le Bihan.

Volonté commune : sauver l'usine

« Au départ, les points de vue des uns et des autres étaient rigides et très éloignés sur le fond, mais j'ai tout de suite décelé un accord sur un élément fondamental : la volonté commune de sauver l'usine. A partir de là, travailler à une issue positive était possible », relate Bernard Brunhes. Le médiateur sera rémunéré d'un montant qu'il n'a pas dévoilé - mais qu'il assure modeste -, par le tribunal de Saverne, qui l'a fixé, et devrait en demander le remboursement à parité entre la direction et les syndicats.

Quant à l'accord, il remplace la notion de baisse du taux horaire par un mix de modération salariale et de remontée du temps de travail, qui atteint le même objectif, à savoir la diminution des coûts de 12,5 %. Une très large majorité du personnel l'a approuvé par référendum avant sa signature mi-novembre.

L'issue finale désavoue la ligne dure de départ de FO. Mais le syndicat estime sortir la tête haute de la médiation. « Sans elle, on serait encore en conflit. L'accord préserve l'essentiel, l'emploi, et il est loin du projet radical du printemps. Un vote sur ce texte-là aurait donné 95 % de non », estime Isabelle Astié, secrétaire du CE.

Syndicalistes allemands

« Au moins aussi importante que la médiation a été notre initiative d'impliquer les syndicalistes de la maison mère allemande. Elle a changé le rapport de forces », juge Ralph Blindauer, l'avocat du CE.

Comme il s'y était engagé, le groupe Osram a décidé de doter l'usine des charges de travail suffisantes pour préserver l'intégralité des emplois. Et le PSE passe à la trappe.

OSRAM FRANCE

• Activité : fabrication d'ampoules électriques.

• Effectifs : 800 salariés.

• Chiffre d'affaires monde 2008 : 4,6 milliards d'euros.