Marx avait prédit, en son temps, que la «classe capitaliste» finirait par laminer la classe moyenne. Comme il l'avait prévu également, c'est bien le mode de production industriel qui, ici, détermine le processus social. Que s'est-il passé ? Après avoir considérablement décuplé les forces humaines et permis une augmentation sans précédent de la plus-value générée par le travail, la technologie semble se retourner contre la grande majorité de l'humanité qu'elle paraissait devoir enrichir.

Le développement des nouvelles technologies, qui réduisent à peu de chose les coûts de transfert de l'information, d'une part, et, de l'autre, la scolarisation massive, qui a augmenté le niveau de formation des classes les plus basses et ouvert la voie à la polycompétence, ont permis de réduire à la portion congrue les classes intermédiaires.

La course effrénée au downsizing et autre reengineering n'a pas été qu'un effet de mode managérial. Cela a bel et bien correspondu à un raccourcissement drastique et généralisé des hiérarchies intermédiaires qui constituaient l'élite salariale. Dans le même temps, la course aux compétences a permis aux meilleurs éléments de ces classes dites moyennes de migrer vers le cercle restreint des plus hautes sphères sociales.

Pour Marc Vittori, journaliste, la juste métaphore pour désigner la structuration sociale actuelle n'est plus la pyramide, mais le sablier, avec l'étranglement de la partie centrale, lentement, mais sûrement. Effrayant !

Marc Vittori est éditorialiste au quotidien Les Echos.