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La filière des jeux vidéo tente de structurer sa politique sociale

Les pratiques | publié le : 03.11.2009 |

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La filière des jeux vidéo tente de structurer sa politique sociale

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Avec une centaine d'entreprises et quelques milliers d'emplois, la filière des jeux vidéo cherche à se structurer et à développer une politique RH commune, notamment en matière de formation.

Jeux pour ordinateurs, consoles de salon ou portables, réseaux sociaux ludiques, serious games... Le chiffre d'affaires du jeu vidéo français atteint 3 milliards d'euros, dont 1,6 milliard d'euros pour les jeux eux-mêmes. Le «secteur» est hétérogène. L'essentiel de la production repose sur 1 500 professionnels répartis dans une centaine de studios de développement, petits ou moyens, aux côtés des mastodontes Ubisoft et Vivendi Games. En ajoutant les éditeurs et les distributeurs, la filière représente quelque 5 000 emplois.

Sur le site de l'Agence française pour le jeu vidéo (AFJV), qui draine les offres de postes et de stages du secteur, CDI, CDD, sous-traitance, missions de free lance, créateurs ou auteurs relevant de la Maison des artistes ou des Agessa se partagent l'emploi aux côtés des intermittents du spectacle. Seules les sociétés audiovisuelles et les activités artistiques peuvent légalement faire appel à ce type de contrat. D'autres le font alors qu'elles relèvent d'une vingtaine de codes NAF et d'autres conventions collectives : métallurgie, bureaux d'études, jeux, jouets et puériculture, informatique, services aux entreprises...

Elaboration d'un statut collectif

Corollaire de cette diversité et de l'absence d'une convention collective unique, les entreprises doivent verser leur contribution formation obligatoire à une multitude d'Opca : Fafiec, Afdas, Opcalia, Opcareg, Agefos-PME... D'où la difficulté d'avoir une offre de formation correspondant aux besoins de la filière.

C'est peu dire qu'il y a encore du chemin à parcourir avant que le «secteur» n'harmonise sa politique sociale. Côté syndicats, on juge qu'une convention collective unique - mais pas forcément nouvelle - est nécessaire. « C'est un sujet déterminant, mais pas d'actualité », tempère, de son côté, Julien Villedieu, délégué général du jeune Syndicat national des jeux vidéo (SNJV), qui regroupe les entreprises de production et les associations régionales de la profession. Julien Villedieu mise sur « l'élaboration d'un statut collectif dans les cinq ans » et reconnaît volontiers un rôle de « défricheur » à l'association Capital Games. Car la filière a tout de même cherché à s'organiser pour faire face à plusieurs défis : guerre internationale des cerveaux, turn-over, maintien des compétences...

Capital Games, l'une des six associations régionales conçues comme interlocuteurs des collectivités locales et bénéficiaires d'éventuelles subventions, a travaillé avec la CGT, la CFDT et la CGC au sein d'une commission paritaire locale (CPL) francilienne, encouragée par les pouvoirs publics. « Il fallait rendre le secteur attractif pour éviter la fuite des salariés qualifiés », rappelle Jean-Christophe Toutlemonde, de la Direction régionale du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle, intervenu comme conseil aux côtés de l'Aract. « Pour de petites entreprises dépourvues de représentants du personnel, il faut jouer sur la décentralisation et la mutualisation », ajoute-t-il.

« L'envie d'un dialogue social »

La CPL, réunie de 2006 à 2008, a permis de négocier avec un émetteur la distribution de titres repas et de Cesu, « comme un grand compte », au nom d'une quarantaine de petites entreprises. Un accord a également été conclu avec une mutuelle pour un contrat à adhésion facultative pour les entreprises, « mais il n'a jamais été déployé, par manque de communication », regrette Benoît Hozjan, gérant du studio Kheops, qui mise sur la relance prochaine de la CPL et de l'offre de mutuelle.

Malgré la modestie des résultats, en dehors de la formation (lire encadré p. 16), Michel de La Force, président de la Fieci CFE-CGC (bureaux d'études techniques, cabinets d'ingénieurs-conseils, sociétés de conseil), rend hommage à la CPL, car il a perçu chez les employeurs « l'envie d'un dialogue social dans l'intérêt collectif ». Ivan Beraud, secrétaire national de la F3C CFDT (communication, conseil, culture), lui, y a vu la recherche d'une caution sociale au niveau du secteur par des entreprises « qui ne veulent pas de délégués chez elles ».

Des chantiers à venir

La CPL devrait être reconvoquée après un an de sommeil. Maud Berthier, chargée de mission, précise que l'Aract Ile-de-France va intervenir pour aider à la finalisation de fiches métier et à l'élaboration d'une GPEC du secteur. Quant à Lise Hesse, toute nouvelle directrice générale de Capital Games, elle évoque la possibilité de création de groupements d'employeurs de la profession. « Nous voulons aussi créer un site Internet participatif, ajoute-t-elle, pour sensibiliser les adhérents aux thèmes RH et échanger les bonnes pratiques. »

Une offre de formation mutualisée

La Commission paritaire locale (CPL), créée en 2006 en région parisienne, a permis la mise en place d'un plan de formation interentreprises pluriannuel, destiné aux salariés des petites et moyennes entreprises du secteur. « Les entreprises adhérentes versent une contribution sur une base volontaire à Opcalia, qui leur propose des formations ouvertes pour tous leurs salariés », explique Lisa Hesse, directrice générale de Capital Games.

Démarches facilitées

Dans de petites entreprises dépourvues de service RH ou de responsable formation, on apprécie cette externalisation de l'élaboration et de la gestion des programmes de formation. « C'est plus simple pour les employeurs et les salariés », résume Benoît Hozjan, gérant de Kheops, dont les six collaborateurs ont suivi une ou plusieurs formations en 2007 et 2008.

Financements publics

Opcalia propose des formations répondant aux besoins de la filière : anglais, management de projets multimédias, propriété intellectuelle, contrats commerciaux. Ivan Beraud, de la CFDT, rappelle que le jeu vidéo a bénéficié de financements publics pour la formation. « Cela peut permettre de diversifier les contenus et de favoriser le retour sur investissement », se satisfait-il.

Mais la profession souhaite revisiter globalement l'offre de formation. « Une analyse de l'adéquation entre l'offre et la demande de compétences sera rendue publique avant la fin de l'année », indique Géraldine Lévèque, chargée de mission compétences et formation à Cap Digital, le pôle de compétitivité des contenus numériques.

Quant au SNJV (Syndicat national des jeux vidéo), il ne cache pas ses ambitions : rationaliser la formation initiale et développer la formation continue. « Nous envisageons une démarche de labellisation », confie son délégué général Julien Villedieu.

M. R.

L'essentiel

1 Le jeu vidéo est un petit «secteur» très hétérogène comportant une centaine d'entreprises, du petit studio au mastodonte, tel Ubisoft.

2 Sans convention collective, la filière ressent tout de même le besoin de se doter d'une politique sociale.

3 Un dialogue social territorial a permis d'avancer, notamment sur le dossier de la formation.