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Accident du travail et obligation de sécurité de l'employeur : vers une sévérité grandissante des juridictions saisies

Enjeux | Chronique juridique par AVOSIAL | publié le : 03.11.2009 |

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Accident du travail et obligation de sécurité de l'employeur : vers une sévérité grandissante des juridictions saisies

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En matière de sécurité, une obligation de résultat (et non de moyen) pèse sur l'employeur : il lui appartient de prendre toutes les mesures nécessaires pour préserver ses salariés contre les risques d'accident du travail ou de maladie professionnelle.

Le manquement à cette obligation constitue une faute dite inexcusable. Si le Code de la Sécurité sociale précise les conséquences de la faute inexcusable pour la victime, il n'en donne, en revanche, aucune définition, laissant à la jurisprudence de la Cour de cassation le soin de le faire. Est désormais considéré comme fautif, l'employeur qui « avait ou aurait dû avoir conscience du danger, sans toutefois avoir pris les mesures de prévention ou de protection pour préserver son personnel ». Peu importe qu'il n'ait pas eu une connaissance effective du danger.

La faute inexcusable de l'employeur peut être invoquée dès lors que l'accident est lui-même reconnu comme accident professionnel ; la demande de reconnaissance de la faute inexcusable devant être adressée à la caisse d'assurance primaire qui engagera une tentative de conciliation. En cas d'échec, la victime exercera son recours devant le tribunal des affaires de Sécurité sociale (Tass).

Les conséquences d'une telle qualification sont lourdes pour l'entreprise. La victime (ou ses ayants droit) peut tout d'abord solliciter une indemnisation complémentaire dans les conditions définies par l'article L.452-2 du Code de la Sécurité sociale. Elle pourra bénéficier d'une majoration de son indemnisation forfaitaire déjà prévue par le Code de la Sécurité sociale, qui lui sera versée directement par la caisse de Sécurité sociale (à charge pour elle, alors, d'en récupérer le montant auprès de l'employeur par le biais d'une cotisation complémentaire). L'augmentation du taux de cotisation de l'entreprise au titre des accidents du travail constituera, par ailleurs, un indice pris en compte par l'inspection du travail dans le cadre de son pouvoir de contrôle.

Indépendamment de cette rente majorée, la victime peut également, en saisissant le tribunal des affaires de Sécurité sociale, solliciter la condamnation de son employeur au versement d'une indemnité visant à réparer différents préjudices qu'elle estime avoir subis. On comprend, dans de telles circonstances, pourquoi ce type de contentieux se développe tant, comme en attestent les deux décisions rendues le 10 septembre dernier par la Cour de cassation.

Deux entreprises ont, ainsi, récemment été sanctionnées, au motif qu'elles n'avaient pas mis en oeuvre les mesures adéquates pour empêcher l'accident survenu ou la maladie professionnelle. Dans la première affaire, le salarié reprochait à son employeur de l'avoir maintenu à son poste (impliquant de nombreuses manutentions) alors qu'il souffrait de tendinites répétées, ce qui avait conduit à la reconnaissance d'une maladie professionnelle. La cour d'appel n'avait pas reconnu l'existence d'une faute inexcusable, retenant que le médecin du travail avait seulement envisagé des examens complémentaires et constaté l'impossibilité de conduire des engins motorisés, sans pour autant exiger un changement ou un aménagement de poste. La Cour de cassation ne partage pas cette analyse : l'état de santé connu du salarié aurait dû permettre à l'employeur d'avoir conscience du danger particulier auquel ce salarié était exposé.

Même sévérité affichée dans une seconde affaire où un salarié se retrouve le pied coincé entre deux engins, dont l'un venait à sa rencontre. La Cour de cassation relève que les mesures de prévention nécessaires pour préserver le salarié du danger n'avaient pas été prises, notamment en organisant la circulation des engins de manutention appelés à intervenir sur un même site et dans une même allée.

Le contentieux de la faute inexcusable est en plein essor ; la prudence et la prévention s'imposent plus que jamais, d'autant que la faute inexcusable de l'employeur pourrait être reconnue dans l'hypothèse d'un suicide reconnu comme accident du travail... A suivre donc.

Isabelle Ayache-Revah, avocate associée au cabinet Raphaël, membre d'Avosial, le syndicat des avocats d'entreprise en droit social.

Précision

Lors de la parution de la chronique intitulée Le DIF : responsabilité des organisations syndicales et des DRH dans notre n° 969, daté du 22 septembre 2009, nous avons malheureusement omis de citer les références. En l'occurrence, cet article avait été rédigé à partir des recherches du mémoire de Cédric Pennarun, Pdg de la société Dypsis, à l'Essec.

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