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Les pratiques

Québec Les hic d'un accord «historique»

Les pratiques | publié le : 13.10.2009 |

Un accord, signé fin 2008 par Nicolas Sarkozy et le Premier ministre québécois Jean Charest, aurait dû permettre aux Français de travailler sans restrictions dans la Belle Province. Ce n'est pas toujours le cas.

«Il reste du travail à faire, mais nous sommes sur la bonne voie. Nous avons pu constater une ouverture dans les ordres de la médecine et de l'ingénierie », a déclaré, optimiste, la ministre de l'Immigration et des Communautés culturelles du Québec, Yolande James, fin septembre. Il y a un an, les autorités françaises et québécoises ont promis de supprimer l'un des principaux points de friction qui existent entre les deux nations dans le domaine de l'emploi, en créant des « arrangements de reconnaissance mutuelle » pour les métiers et les professions. Un accord entre les deux pays a été signé en octobre 2008 et présenté comme une première mondiale par Nicolas Sarkozy et le Premier ministre québécois Jean Charest.

Yann Hairaud, directeur de l'Agence montréalaise pour l'emploi (AMPE-Citi), un organisme d'aide aux immigrants, explique : « Il y a plus de professions réglementées par des ordres professionnels au Québec qu'en France. » Quarante-cinq ordres régissent, en effet, le marché du travail. Les immigrants français (et les autres) qui souhaitent exercer une profession réglementée se sont heurtés au corporatisme, les ordres professionnels locaux ne leur reconnaissant pas de droit de pratique. C'est le cas aussi bien pour les chimistes, les comptables, que pour les professions de la santé, pour ne citer que ces métiers. Situation ubuesque, puisque les diplômes français, eux, sont reconnus depuis des années par le gouvernement de la Belle Province.

Uniquement des diplômes anglo-saxons

Dans les faits, tant les ordres que certains employeurs ne reconnaissent pas les formations universitaires non anglo-saxonnes. « Il faut avoir des diplômes d'ici, faits par des gens d'ici pour des gens d'ici », confie cet ingénieur en génie civil français qui a quitté le Québec, écoeuré.

Les agents de la Délégation du Québec à Paris organisent pourtant régulièrement des conférences afin de convaincre « leurs cousins français » de s'établir dans la Belle province. Plus de 3 500 compatriotes tentent leur chance chaque année. A ce jour, la moitié des métiers et professions, qu'il s'agisse des ingénieurs, des experts-comptables, des techcniciens ou des conducteurs d'engins, ont signé des accords de reconnaissance mutuelle. Pourtant, la situation reste bloquée. Et cela n'augure rien de bon pour les futurs accords qui concernent les conseillers en RH, les contrôleurs de gestion ou les psychologues d'entreprise. « Les ordres ont un pouvoir de décision quasi total sur les exigences d'exercice d'une profession. Je suis vétérinaire. On me demande de repasser un examen dix-sept ans plus tard ! s'indigne Eric Troncy, qui, malgré un diplôme de l'école vétérinaire de Lyon et deux doctorats, n'a pas le droit d'exercer. Que ce soit dans l'industrie pharmaceutique ou en cabinet privé, de nombreux vétérinaires français quittent le Québec pour aller exercer en Ontario, où ils ont le droit de le faire. »

Travailler «clandestinement»

Les professionnels français doivent parfois travailler clandestinement, comme certains ingénieurs, dont la situation devrait pourtant s'améliorer grâce aux accords. « Mon diplôme n'est pas reconnu par l'ordre des ingénieurs du Québec. Tous les salariés de notre cabinet sont dans ma situation, mais cela ne nous empêche pas de travailler », lançait, malicieusement, ce jeune ingénieur, avant la signature des accords. Mais rien n'a changé. « En ingénierie, les spécialités ne sont pas les mêmes. Ingénieur en formation ou ingénieur commercial sont des spécialités qui n'existent pas au Québec », confie Yann Hairaud. Dans cette société de conseil, les ingénieurs reconnus servent « «d'anges gardiens» aux ingénieurs français qui travaillent clandestinement », assure ce consultant français.

L'administration a dû créer un poste de commissaire pour gérer les plaintes contre les ordres professionnels..., et les diplômés français - et les autres - continuent de patienter.