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Pouvoir et savoir

Enjeux | Chronique de Meryem Le Saget | publié le : 29.09.2009 |

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Pouvoir et savoir

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Pendant des années, pour ne pas dire des siècles, le pouvoir appartenait à ceux qui détenaient les informations importantes. Garder son pouvoir consistait donc à barrer l'accès à ces ressources privilégiées. Et c'est ainsi que la planète relationnelle s'est structurée.

Le précarré au lieu de la rizière. Si l'eau est le symbole de l'information, surtout, on ne tend un verre d'eau à personne. On feint l'expertise inaccessible aux autres, on ne donne ses chiffres qu'au dernier moment et, de préférence, sous forme incompréhensible. On s'exprime dans un jargon métier et l'on interdit à quiconque de faire des remarques sur des sujets qu'il ne maîtrise pas. Partager la stratégie, mettre en place des plateformes collaboratives, travailler en projet ? Beaucoup trop risqué. Que chacun reste chez soi et les moutons seront bien gardés.

L'individualisme au lieu du partage. Partager l'information en équipe ? Les collaborateurs n'en ont pas besoin pour faire leur travail. Communiquer sur les réunions auxquelles on a participé ? Perte de temps, puisqu'on sait ce qui s'y est passé. Aller à des réunions pour faire avancer des projets transverses ? Pas le temps. Si d'autres ont des journées à perdre en réunionite, soi, on a un vrai job à plein temps.

Nous vivons donc au Moyen Age, à l'époque des seigneurs, des fiefs et des châteaux forts. Comme c'est un peu gênant d'en être encore à ces logiques ancestrales, on prône l'esprit d'entreprise et la valeur de l'exécution, c'est-à-dire davantage de vassaux et de serfs, mieux alignés et totalement dédiés.

Il se peut que tout cela soit en train de changer. Le pouvoir du troisième millénaire émerge tranquillement, sur les logiques du web 2.0. et des réseaux sociaux. Le jeu n'est plus d'amasser de l'information mais de la publier, de la partager, de la faire circuler. On n'est plus dans le stock bien gardé mais dans le flux. Celui qui veut profiter d'une communauté sans jamais y contribuer se fait vite repérer. Celui qui veut copier l'innovation d'un autre, échangée dans un esprit open source, peut toujours le faire, mais il sera vite mis hors jeu. Le pouvoir ne se mesure pas dans ce que l'on engrange ou protège, mais dans ce que l'on diffuse et échange, afin d'alimenter une dynamique de coconstruction et d'enrichissement mutuel qui propulse chacun vers l'avant.

Le mouvement gagne du terrain, comme le niveau de la mer à marée montante. Les jeunes collaborateurs veulent discuter de la stratégie de l'entreprise et travailler sur des sujets transverses. Ils trouvent bizarre de ne pas être dans la boucle des grandes initiatives d'entreprise ou de ne pas pouvoir s'exprimer librement dans les systèmes d'information de l'entreprise. Et si c'était cela, la révolution des travailleurs du savoir, dont les études de prospective nous annonçaient l'avènement. Des personnes engagées, qui veulent écrire ensemble la suite de l'histoire en partageant le savoir ; une intelligence collective prête à se mobiliser pour avancer ; et non des bac + 10, spécialisés dans les tâches nobles du secteur tertiaire, déléguant aux pays pauvres les activités à moindre valeur ajoutée.

Meryem Le Saget est conseil en entreprise à Paris. < www.lesaget.com >