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« Le rôle de conseil des Opca est mécaniquement limité »

Dossier | publié le : 29.09.2009 |

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« Le rôle de conseil des Opca est mécaniquement limité »

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Le nombre d'entreprises suivies par un conseiller d'Opca limite mécaniquement le temps qu'il peut consacrer à chacune, et le conseil aux individus est arithmétiquement impossible dans la configuration des Opca, analyse Alain Meignant (1).

« La simplification annoncée et attendue n'est pas au rendez-vous. Le problème de la lisibilité du dispositif par ses bénéficiaires supposés n'est pas près de se résoudre. La dynamique législative étant maintenant largement irréversible, ce regret restera. La seule question vraiment intéressante est de savoir à qui profitera la réforme, au-delà des différentes institutions connectées aux tuyaux. Peut-elle apporter aux entreprises plus de moyens pour mettre la compétence de leur personnel à niveau, et aux individus plus de possibilités de se tracer un parcours ?

Plus de moyens pour les PME

Il y a des avancées positives. Le cloisonnement des fonds mutualisés dans les Opca pour les plus petites entreprises devrait théoriquement leur permettre de disposer de plus de moyens. Ce ne sera pas spontané, et le rôle des Opca dans la stimulation et l'ingénierie de ces projets sera déterminant.

L'évolution du rôle des Opca vers celui de conseil et d'ingénierie est déjà engagée. Mais cette tendance est limitée par leur statut : ils ne peuvent pas se positionner en offreurs de services de conseil, pas plus qu'en offreurs de prestations de formation. Leur nouveau rôle est aussi limité par leur organisation : le nombre moyen d'entreprises par conseiller limite mécaniquement le temps que l'Opca peut consacrer à chacune, ce qui le conduit assez naturellement à s'occuper davantage des «gros» contributeurs et demandeurs que des «petits», sauf si ceux-ci en prennent l'initiative. Quant au conseil aux individus, il est arithmétiquement pratiquement impossible dans la configuration des Opca.

Des approches plus dynamiques

Mais, avant même la réforme annoncée, bien des Opca ont mis en oeuvre des approches plus dynamiques, allant au devant de leurs cotisants et parfois des salariés, grâce à des réunions d'information, des portails Internet. Le potentiel est favorable, encore qu'il soit regrettable que la question du financement du remplacement du salarié absent pour formation n'ait pas été clairement tranchée.

Un autre aspect positif est l'accentuation de la rupture avec une certaine tradition de cloisonnement de la formation par rapport à la gestion de l'emploi. La formation n'est pas une fin «en soi», mais un élément d'un dispositif global, devant être cohérent, de gestion des compétences et des qualifications en relation avec l'emploi. Il s'agit, aujourd'hui, de faire aboutir des processus de professionnalisation, collectifs ou individuels, sans enfermer dans un passage obligé par un cycle de formation. La notion de parcours de professionnalisation est, en ce sens, tout à fait intéressante, mais la complexité du dispositif et de ses financements rend de plus en plus difficile l'autonomie du citoyen dans ses choix.

Le risque est, évidemment, qu'à défaut d'avoir, à proximité, des interlocuteurs bien informés pour s'orienter, il renonce, ou soit renvoyé à des solutions classiques de formation, plus faciles à conseiller et moins exigeantes pour les offreurs de formation, mais moins adaptées à son projet.

Effet de «sur-administration»

La volonté du législateur d'ouvrir les possibilités de choix à l'individu, positive, pourrait, dans la réalité, avoir un effet paradoxal de réduction de fait de son autonomie, par une sorte de «sur-administration» d'un dispositif complexe, avec des intermédiaires obligés et eux-mêmes un peu dépassés par cette complexité, ou contraints par la position qu'ils y occupent.

Au passage, il serait scandaleux de restreindre, comme certains l'ont, semble-t-il, suggéré, les possibilités offertes par le CIF, qui est un soutien significatif apporté à des individus autonomes porteurs d'un projet. Les possibilités d'accès devraient, au contraire, être élargies. »

(1) Auteur de Manager la formation, éditions Liaisons, dont la 8e édition, intégrant les éléments de la réforme, vient de sortir, en septembre.

Socle des connaissances

«La question du «socle de connaissances» nécessaires à un adulte ouvre des pistes de réflexion et d'action très intéressantes. C'est le second étage du socle minimum de connaissances et compétences issu de la formation initiale : maîtrise de la langue française, bases de mathématiques et de culture scientifique et technologique. Le monde de l'enseignement initial, qui «livre» pourtant 150 000 jeunes par an dépourvus de ce socle sur le marché du travail, avait alors réagi avec vivacité, bien que la liste ne comportât, sagement, aucune compétence «comportementale».

Le socle qui est proposé va poser d'autres questions : «Travailler en équipe» fait partie de la liste des connaissances du «socle». Mais est-ce que cela relève de la connaissance ou de la compétence ? Et qui a légitimité pour valider cette compétence ? Certainement pas un système éducatif organisé autour de la réussite personnelle et de la compétition des individus ! Même chose pour «l'aptitude à actualiser ses connaissances», reformulation contemporaine du «apprendre à apprendre» cher aux promoteurs de l'Education permanente des années 1970 comme Bertrand Schwartz. C'était, pour eux, la clé de l'autonomie, et de la liberté de l'individu. L'autonomie, toujours. Bâtissons des dispositifs, mais veillons sur elle. »

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