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Le cynisme, cette solution facile

Enjeux | Chronique de Meryem Le Saget | publié le : 15.09.2009 |

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Le cynisme, cette solution facile

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Quand les évidences se font plus rares, le cynisme occupe le terrain. Passant pour un comportement dur, cette façon de réagir face aux personnes ou aux événements est, en fait, celle qui demande le moins de courage et d'exigence envers soi-même. La solution facile, en somme.

A l'égard des personnes, le cynique aime lancer des petites piques qui vont faire mal, l'air de rien. Même si ses remarques sont déguisées en traits d'esprit, ce sont des critiques. Il ne peut pas s'empêcher de saper le moral de son interlocuteur, de tuer son enthousiasme et les efforts qu'il entreprend sur ses projets. Comme il adore le faire en public, il écorne en même temps l'image de la personne auprès de son entourage. Vous nourrissez un espoir, vous vous accrochez à quelque chose ? Il vous le détruit, plutôt que de risquer l'écoute, l'échange, la compréhension, le dialogue. Ces explorations en dehors du cadre sont trop élaborées, trop risquées, trop incertaines. Il préfère camper sur ses positions de « la personne lucide à qui on ne la raconte pas ». Il vous dit : « Tu peux essayer, les échecs sont toujours instructifs » ; ou « Les efforts que tu fais sont louables, mais peut-être que tu n'arriveras jamais à changer » ; ou bien, « Dans la vie, ce sont les méchants qui gagnent, pas les gentils ». Subtilement, il se maintient dans la position supérieure de celui qui en sait davantage et il vous rabaisse. Son malaise et sa frustration face à la vie lui font préférer l'attaque.

Cela ne lui suffit pas de s'attaquer aux personnes, il commente aussi de façon acerbe les situations. Il se préserve, ainsi, des faux espoirs ou des blessures. « L'exception, c'est quand une relation se passe bien ! » ; « Moi, j'ai arrêté depuis longtemps de croire au Père Noël ». Parfois, le fiel est plus violent, comme la pieuvre qui projette son encre : « Les licenciements, ça fait le nettoyage, après, on repart du bon pied. »

En proclamant sa distanciation, le cynique évite de s'impliquer ou de croire qu'il est possible d'agir sur une situation : « Ce projet est pourri d'avance » ; ou bien, « L'économie n'a pas fini de dégringoler ». A les écouter, vous n'avez plus qu'à aller vous coucher... D'autant que les plus perfides vous laissent entendre que cette situation, vous l'avez bien cherchée. Donc, quelque part, c'est un peu de votre faute.

Quand un tel état d'esprit s'étend à une entreprise, c'est grave. Cela signifie que le climat de confiance s'est fortement dégradé. Quand les médias et les différentes couches de la société font preuve d'un cynisme croissant, c'est que notre modèle est malade. On sent un monde qui décroît et on ne sait pas par quoi le remplacer. Ce réflexe bien instinctif, apparenté aux mécanismes de survie, nous engage pourtant dans une voie de garage. Ce n'est pas le moment de baisser les bras ou de se laisser désabuser. Mieux vaut redonner à l'homme ses lettres de noblesse. Je crois profondément que l'être humain possède en lui, individuellement et collectivement, la capacité de résoudre les situations les plus complexes. Les solutions ne viendront pas de l'attaque ou de la fuite, ni de la distanciation et encore moins de l'inhibition. Nous avons besoin d'individus toniques, apparemment isolés, mais tellement nombreux en réalité, qui choisissent de se tenir debout, de croire en leurs projets, de faire confiance à la vie, à la collaboration et à la créativité collective. Ce qui doit être créé, socialement, économiquement et personnellement ne l'a encore jamais été. Est-ce une raison pour s'asseoir avec les cyniques sur le banc de touche ?

Meryem Le Saget est conseil en entreprise à Paris. < www.lesaget.com >