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Les pratiques

Un objectif de départs trop bien rempli ?

Les pratiques | Retour sur... | publié le : 08.09.2009 |

Fin 2008, ArcelorMittal annonçait un plan de départs volontaires de 1 400 salariés, prêts à quitter l'entreprise dans les six mois. Le sidérurgiste a atteint son objectif dans les fonctions supports et élargi le plan aux opérateurs, au risque, selon les syndicats, de déstabiliser l'entreprise.

En décembre dernier, ArcelorMittal annonçait un plan de 9 000 départs volontaires dans le monde, dont 6 000 en Europe. En France, où la «contribution» prévoyait 1 400 départs volontaires, soit 5 % d'un effectif de 28 000 salariés, les syndicats craignaient des pressions pour activer le processus.

2 855 départs

Le plan s'est déroulé sans conflit et l'opération se solde, à ce jour, par 2 855 départs, dont 1 440 déjà concrétisés dans les fonctions supports, initialement les seules concernées par le plan, et 1 415 prévus parmi les opérateurs, inclus dans le dispositif au terme de trois mois de négociations. Les trois organisations signataires de l'accord - CFE-CGC, CFTC et FO - ont obtenu de porter la prime de départ à sept mois de salaire, contre cinq initialement prévus, et de majorer l'aide à la retraite des salariés nés en 1949 ou avant.

Majoritaire et fermement opposée au plan, la CGT a tenté de faire valoir son droit d'opposition sur la base d'expertises démontrant que la suppression de 5 % des effectifs mettait en péril les 95 % restants. Il lui a manqué l'appui de la CFDT, également non signataire, pour obtenir l'annulation du programme.

Un contexte social positif

« La mise en oeuvre du plan s'est déroulée sans heurts dans un contexte social positif, voire consensuel », souligne Jean-Pierre Mullié, coordonnateur des ressources humaines France d'ArcelorMittal. « L'accord a permis à des ouvriers de production, usés par des années de travail posté, de partir en retraite anticipée. Certains cadres ayant accumulé une longue ancienneté ont vu l'occasion de préparer leur retraite dans des conditions financières peut-être plus favorables qu'à l'occasion d'un plan social », estime Xavier Lecoq, représentant de la CFE-CGC métallurgie à ArcelorMittal. Les termes de la convention collective de la métallurgie ont permis à certains cadres et ingénieurs d'obtenir une prime de départ correspondant à vingt-cinq mois de salaire.

Perte de compétences

Le départ de près de 10 % des effectifs ne sera pas neutre dans le fonctionnement futur de l'entreprise. En dépit de leurs dissensions, les syndicats s'inquiètent unanimement de la perte de compétences. « Le plan constitue une aberration en termes de ressources humaines : on sort un maximum de personnes de l'effectif, puis on voit comment continuer. Or, qu'il s'agisse des opérateurs de production ou des ingénieurs, des informaticiens, des commerciaux, toutes les fonctions sont stratégiques. Nous assistons à une véritable Bérézina des compétences au nom d'une logique comptable », accuse Philippe Verbeke, coordinateur de la CGT chez ArcelorMittal Atlantique et Lorraine.

Les soubresauts de la conjoncture ont influé sur les départs. De la fin 2008 au printemps 2009, ArcelorMittal n'a cessé de réduire sa production en Europe. En avril, le sidérurgiste avait, ainsi, fermé 14 de ses 25 hauts-fourneaux européens, dont un à Fos-sur-Mer (Bouches-du-Rhône), et le P6, ultime haut-fourneau en service à Florange (Moselle). « Voyant la situation de la sidérurgie s'aggraver, hésitant à se lancer dans l'inconnu en pleine crise et craignant les réactions de leurs collègues, les candidats au départ ont souvent attendu la dernière minute avant de faire part de leur décision. Certains sont même partis sans rien dire à leurs collègues, déstabilisant d'autant plus les services », souligne Patrick Auzanneau, représentant national de la CFDT à ArcelorMittal.

Mise en place d'une GPEC renforcée

La direction affiche, en revanche, une certaine sérénité et voit dans le redémarrage réussi des installations de Florange, mi-août, la démonstration de la capacité de ses sites à s'adapter aux retournements de conjoncture (lire Entreprise & Carrières n° 966). A moyen terme, la mise en place d'une GPEC renforcée doit permettre d'engager les formations et les rééquilibrages nécessaires au sein d'un effectif réduit.

« Compte tenu de l'objectif de réduction des frais fixes pour faire face à une situation conjoncturelle, notre méthode était la bonne », affirme Jean-Pierre Mullié. Dubitatifs, les syndicats soulignent que des licenciements opérés dans le cadre d'un PSE auraient coûté cher à l'entreprise en termes d'image, tout en la contraignant à s'engager dans des actions de revitalisation. A l'inverse, le plan de départs volontaires a permis à ArcelorMittal de supprimer des postes sans heurts, tout en s'affranchissant de l'obligation de redynamiser les territoires concernés.